Chapitre 40 (partie 1)

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– Enfin, quand je dis « petite », façon de parler. Parce que ça va être assez long, en fait.

Lilian le rassura d'un geste de la main et s'assit sur le lit.

– Oh, t'inquiète, j'ai toute la mort devant moi.

Christel sourit bien malgré lui. La Dame lui avait rapporté son nouvel humour. Il ignorait pourquoi, mais il avait souvent constaté ces changements d'attitude, chez les nouveaux venus. Il s'agissait pour beaucoup de faire passer la pilule, mais l'humour noir semblait être devenu l'arme ultime contre le cafard post-mortem.

– L'existence est injuste, ajouta-t-il. Vivant, on a la possibilité de mourir, mais une fois mort, on le reste.

– La mort appartient à ceux qui décèdent tôt.

Ils échangèrent un regard amusé.

– Pas mal, jugea Christel avec un sourire, je suis mort de rire.

Et l'hilarité de la jeune fille éclata franchement.

– D'accord, tu as gagné, abdiqua-t-elle.

– Elle était pourtant facile, celle-là.

Il s'approcha, et vint à son tour s'asseoir sur le lit. Lilian le regarda faire en plantant son menton dans sa main.

– Bon, mises à part ces blagues... mortelles..., commença-t-elle.

Elle le regarda fermement dans les yeux.

– Alors, comme ça, vous êtes morts ?

Christel leva les yeux sur elle, notant le ton direct de sa voix, puis hocha finalement la tête avec fatalisme.

– Oui.

Un silence de circonstance suivit sa réponse.

– Tout le monde ? insista Lilian.

Christel ouvrit vaguement les mains de résignation.

– Oui, tout le monde. Tous les gens que tu as pu croiser ici, il n'y en a pas un seul de vivant.

Lilian acquiesça vaguement, et sa main qui soutenait son menton retomba.

– Je suppose que ça explique bien des choses... Je m'étais toujours demandé pourquoi vous employiez ce mot, « néantiser ». Pourquoi pas « tuer », directement ? Mais je suppose qu'on ne peut pas « tuer » quelqu'un qui est déjà mort.

Puis elle eut un geste défaitiste de la main.

– Oui, je sais, sémantique, se soumit-elle.

– Crois-moi, Lilian, se défendit Christel, si j'avais pu ne pas te mêler à ça, je l'aurais fait. Mais la contingence n'est qu'une grosse salope.

La jeune fille ne put réprimer une exclamation amusée.

– Tu as l'intention de blâmer les probabilités ?

– Qui d'autre ? Toi ? Moi ? Smith ? Le maudit qui t'a tuée ? On a tous été victime d'une contingence à la con, pour la plupart, ça a tenu à trois poils de cul.

Lilian marqua un court silence devant l'argumentaire.

– Qu'est-ce qui s'est passé ? demanda-t-elle à la place.

– Aux autres ? Ils ont chacun leur histoire, des raisons pour lesquelles ils sont là. James est mort au cours d'un duel avec un mec qui s'est avéré être un maudit. Lulu était une veuve sans enfants, elle s'est refusée au djinn qui voulait l'épouser. Tu vois, il n'y a pas de circonstance-type, certains étaient juste au mauvais endroit au mauvais moment, d'autres étaient dans la ligne de mire. Pour certains, ça a été rapide, vite fait-bien fait, pour d'autres, ça a été un calvaire qui a duré des mois.

Requiem Æternam Dona Eis [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant