La chapelle était étrangement silencieuse. Quand elle ouvrit la lourde porte, un huis grinça et le bruit se répercuta à l'infini, faisant vibrer les tuyaux de cuivre de l'orgue. Des cierges, allumés un peu partout, donnaient un semblant de lumière, et les ombres qu'ils projetaient faisait se mouvoir les ombres des statues. La nef était déserte, occupée des seuls bancs de bois qui s'alignaient tout le long, face à l'autel. Derrière l'autel, un grand crucifix dominait le chœur.
Lilian s'avança, un peu intimidée. Ce n'était pourtant pas la première fois qu'elle mettait les pieds à la chapelle, mais pour une raison qu'elle ne parvenait à comprendre, elle ne s'y sentait pas à l'aise. Elle avait l'impression que les statues et les peintures sur les parois la dévisageaient pour la juger. Fuyant ces regards, elle jeta un œil devant elle, apercevant l'autel sur lequel était toujours posé le cercueil du Doyen.
Au pied de cet autel, sur le marbre froid, Christel était étendu sur le ventre, les bras en croix. Il portait une sorte de robe en toile brute, et ses pieds étaient nus.
Lilian le regarda allongé, en silence. Elle avait encore du mal à assimiler tout ce qui avait pu se passer depuis ces dernières heures. À son réveil, se savoir morte l'avait tellement bouleversée qu'elle avait perdu son sang-froid. À ses yeux, c'était fini, elle avait échoué dans sa mission. Se retrouver décédée avait constitué pour elle ce point de non-retour où plus rien n'était possible. Elle n'avait pas voulu écouter les explications de Christel, elle avait cru que personne ne pouvait comprendre ce qu'elle pouvait ressentir en cet instant. Mais elle s'était vite rendu compte qu'elle se trompait. Elle n'était pas la seule, dans ce cas-là. Elle n'était pas la seule à être morte. James, Lulu, Misa, Christel... Ils étaient tous morts, et ce pour la plupart depuis bien longtemps. Après cette révélation, Christel avait disparu, et l'intérêt pour elle avec. Des heures durant, elle s'était morfondue, seule au fond de ce lit, à se demander où il pouvait être, jusqu'à ce que Lulu vînt lui apprendre qu'il était à la chapelle. Elle n'avait pas réfléchi une seconde, et s'était précipitée sur place.
Elle s'approcha de lui, sans dire un mot, puis s'allongea à ses côtés comme lui. Il ouvrit les yeux en l'entendant faire, et elle eut un pauvre sourire.
– Comment tu te sens ? chuchota-t-elle doucement.
Christel hésita, ne sachant pas quoi faire. Il prit alors le parti, d'un imperceptible mouvement de la tête, de lui faire comprendre qu'il ne pouvait pas lui parler. Sa main partit néanmoins sur sa gorge, caressant la cicatrice du pouce.
« Lilian ? »
Une voix douce s'était soudain élevée, comme venue de nulle part. La jeune fille releva la tête et se redressa précipitamment en retenant un cri, en constatant de quoi il s'agissait.
« Ne criez pas, vous n'avez rien à craindre. »
Lilian ne bougea pas, prise de court par ce qu'elle voyait. Une pâle et translucide silhouette blanche se dressait devant elle.
– Qu'est-ce que c'est que ça ? Vous êtes qui ? balbutia la jeune fille.
Dans sa tête, lui revinrent toutes ces vidéos et ces photos montrant des fantômes, et elle se crut face à l'un d'eux. L'apparition se contenta cependant de doucement lui faire signe de s'approcher et de s'asseoir. Lilian jeta un coup d'œil incertain vers Christel, qui, d'un clignement d'yeux, lui fit comprendre que tout allait bien. Elle s'approcha alors, avec précaution, et s'assit sur un bout de banc.
« Veuillez excuser Christel, expliqua l'apparition, mais il ne peut pas vous parler, dans l'immédiat. Il fait une pénitence qui va durer plusieurs heures, et sa bonne réalisation nécessite un silence absolu. »
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Requiem Æternam Dona Eis [TERMINÉ]
ParanormalLondres, 1215. Voulant vivre leur amour loin des interdits, un moine et une jeune fille ne verront rien du bonheur qu'ils s'étaient pourtant promis de trouver. Fuyant leur abbaye, c'est la mort qui leur ouvrira les bras, sous la pire forme qu'ils po...