Chapitre 44 (partie 2)

9 2 0
                                    


– C'est un don inestimable que nous acceptons avec plaisir, annonça-t-il. Nous te sommes très reconnaissants. Sois assurée que nous saurons remercier ta générosité à sa juste valeur.

– La seule chose que je te demande, demanda la jeune fille, c'est de me donner tous les moyens qu'il faudra pour pouvoir venger mes parents.

Il s'inclina face à sa demande.

– C'est entendu, décida-t-il. En contrepartie de ta donation, je mettrai Smith entre parenthèses et ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour t'aider. « Je t'instruirai et te montrerai la voie que tu dois suivre ; Je te conseillerai, j'aurai le regard sur toi. »

Elle joignit les mains.

– Encore une chose, Christel... Suite à ma visite à mon oncle, je me suis occupée de mes parents. J'ai contacté la morgue pour leur signifier que j'allais récupérer leurs corps, mais je ne sais pas quelle cérémonie choisir pour eux. Je songeais à les faire crématiser puis à disperser les cendres, mais je tenais à avoir ton avis.

Christel haussa les épaules, malheureusement peu apte à l'aider.

– S'ils n'avaient pas souscrit de contrat obsèques, fais comme ils auraient voulu que tu fasses, c'est le meilleur conseil que je puisse te donner. Tu voudras une messe ?

– Pardon ?

– Une messe funéraire. Tu en voudras une ?

Elle le considéra avec surprise.

– Tu peux toujours dire des messes ? Je croyais que tu étais défroqué.

– Défroqué en apparence, seulement, je n'ai jamais renié mes vœux. C'est vrai que depuis que je suis Doyen, je n'ai plus trop ce droit, mais bon, une exception comme la tienne, ça peut toujours passer.

Lulu donna à James un complice coup de coude.

– C'est moi, ou il est étrangement de bonne composition ? ricana-t-elle. Qu'est-ce qui t'arrive, c'est la crise du millénaire qui te travaille ?

– Ah, écoute ! protesta Christel. Quand tu reçois une donation de plusieurs dizaines de milliards de dollars, tu fermes ta gueule et tu dis « oui, mademoiselle » ! Lilian, pourquoi tu souris comme ça ?

Il regarda la jeune fille qui retenait un petit rire.

– Désolée, s'excusa-t-elle, c'est juste que...

– C'est juste que quoi ?

– La crise du millénaire. C'est quoi ça ?

Christel leva les yeux au ciel, songeur.

– Ah, la crise du millénaire, rêva-t-il tout haut. J'en connais pas beaucoup qui peuvent se vanter de l'avoir vécue.

James leva la main.

– Moi, bientôt : encore trois cents ans. À peu près.

Lilian les regarda avec amusement.

– J'ignorais qu'il existait des crises de l'âge, chez vous, avoua-t-elle. Je connaissais la crise de la quarantaine, de la cinquantaine, mais celle du millénaire, jamais.

Christel ouvrit une main docte.

– En fait, on considère qu'il y a trois crises importantes à passer, dans cette existence. La première arrive après deux cents ans, et on dit généralement que si elle n'est pas passée à cinq cents ans, c'est foutu pour la suite.

– Ça veut dire que la personne ne sera jamais un macchabée sain, traduisit Lulu.

– En revanche, poursuivit Christel, si on passe sereinement le cap des cinq cents ans, vient ensuite la crise du millénaire. Pour beaucoup, c'est une phase de remise en question. Pour faire bref, c'est comme les vivants : on se cherche à quinze ans, on se trouve à vingt-cinq, et on remet tout en question à quarante.

Requiem Æternam Dona Eis [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant