Je suis réveillé par le froid et par une douleur intense aux bras, aux épaules.
Je pendouille dans l'obscurité, pendu par les poignets à quelque chose qui grince.
Je sens un parfum de lotion après-rasage, il y a quelqu'un là-bas, dans le noir.
Mon cœur accélère.
"Sors, montre-toi !"
Une allumette brille, la lueur m'aveugle, je serre les paupières et les dents, un crépitement de tabac et un point rouge apparaît dans le noir, c'est un point qui respire, parfois plus intense, parfois plus opaque.
Une odeur de cigare m'envahit les narines, un bref moment de plaisir.
Le point rouge poursuit sa pulsion rythmique, pendant un temps indéfini, indifférent à ma présence.
Le crépitement s'éteint, un de talons fait écho dans la pièce, des pas décidés, autoritaires, militaires.
La lumière jaillit du plafond, je plisse les yeux, une grimace.
Mes yeux s'habituent doucement, et je vois un homme assis sur une chaise, la soixantaine, les cheveux blancs, avec la raie de côté, un uniforme militaire vert, le pantalon enfoncé à l'intérieur des bottes.
Je suis dans un sous-sol, il n'y a pas une seule fenêtre, des escaliers donnent accès à la porte d'entrée.
Il allume à nouveau son cigare, se lève, vient devant moi, me scrute, me tourne autour, me regarde droit dans les yeux, puis il siffle, fort, près de mon oreille. Je me tords.
De la porte, deux jeunes hommes, eux aussi en vêtements militaires, descendent rapidement les escaliers, les yeux excités, ils font mine de boxer entre eux, à mains nues.
Arrivés devant moi, ils se tournent vers l'homme au cigare et effectuent un salut militaire, le chef répond. Ils sont massifs, deux poids-lourds.
Ils se mettent derrière mon dos et je les entends bricoler je ne sais quoi avec la corde qui me lie au plafond, je commence à descendre, puis la corde se bloque et je me retrouve à hauteur d'homme, mais pas assez bas pour toucher le sol avec les pieds.
Les deux jeunes se placent face à moi, se retournent et regardent l'homme au cigare, ils attendent un signal.
J'imagine ce qu'ils vont me faire, mes muscles tremblent.
"Ton nom ?" demande l'homme au cigare, avec la voix rauque de celui qui a toujours fumé.
Rien ne me vient à l'esprit, je le regarde droit dans les yeux, sans répondre.
Le chef prend une longue bouffée, les yeux mi-clos, fait un signe de la tête.
L'un des deux hommes me décoche un direct sur le côté gauche, suivi par l'autre qui me frappe au côté droit ; la douleur est très forte et m'empêche un instant de respirer.
L'homme au cigare lève la main droite, les deux reculent.
Il tire une autre bouffée et me répète la même question, même intonation :
"Quel est ton nom ?"
Je le regarde, je halète, je rassemble le peu de forces qui me restent :
"Va te faire foutre ! " je lui réponds sans hésitation.
Il me plante un coup de poing en plein estomac, recule et attend que j'arrête de me tordre de douleur.
Quand j'ouvre les yeux, il me fixe, me souffle sa fumée à la figure, se tourne vers l'un des deux hommes et hoche la tête.
C'est le signal qu'ils attendaient, ils sont très excités maintenant, comme des chiens de chasse avant une battue.
En une fraction de seconde, ils se ruent sur moi, l'un me frappe au visage et aux côtes, l'autre me massacre les jambes avec son talon.
Un direct m'atteint à la mâchoire et tout devient noir.
VOUS LISEZ
L'hôte
Science FictionGiuliano vit à Paris. Un jour, il se réveille en 1936. Comment est-ce possible ? Comment revenir en arrière ? Si Giuliano change le cours de l'Histoire, que se passera-t-il dans son présent ? Une succession d'événements dans l'espace et dans le te...