Buenos Aires, 1er janvier 1941.
Les premiers coups de revolver ne sont pas immédiatement entendus par la foule, ils sont masqués par les bruits des feux d'artifice, puis, quelqu'un parmi le public réalise ce qui se passe, la vague de panique se propage, la foule s'échappe dans toutes les directions, contournant les gens tombés par terre ou leur marchant dessus, dans une cacophonie de cris hystériques.
Je gis face à la pelouse, j'arrive à peine à respirer, une douleur aiguë à la poitrine, je sens qu'il me reste peu de temps, ma respiration est faible, je suis une petite flamme, toute faible en train de s'éteindre.
Quelqu'un s'approche et me palpe.
« Il est encore vivant, mais il est mal barré, c'est pas une bonne nouvelle pour Fresco. »
« Fais gaffe, il arrive, putain la gueule qu'il fait, il est en colère. »
Je sens des pas s'approcher à toute vitesse.
« Il va survivre ? »
Je connais cette voix, c'est la voix du politicien qui était derrière le drap, c'était Fresco donc.
« Je crains que non, Monsieur »
« Putain, merde ! Putain ! »
J'entends Manuel crier, pas loin, parmi le bruit de la foule :
« Lâche pas Giuliano ! Laissez-moi passer ! Laissez-moi passer ! »
J'entends des pas sur l'herbe, à toute allure, qui s'approchent :
« Monsieur, le Président n'a pas survécu, il est mort. Et il y a un deuxième cadavre, c'est le docteur Valso, il a été descendu avec un coup à bout portant, à la nuque. Un règlement de comptes, c'est évident. »
Rodrigo l'a exécuté, bien fait, salaud de traître !
Quelqu'un se baisse et vient me murmurer à l'oreille :
« Italien, t'as toujours refusé de coopérer, mais tu peux même pas savoir le service que t'as rendu à ce pays, nous débarrassant de cet être indigne de porter deux boules entre les jambes ! » C'est Fresco qui parle.
Fresco et ses hommes s'éloignent, je n'arrive plus à distinguer leurs mots, mais au ton de leur voix je capte une joie à peine dissimulée.
J'entends la voix d'Anabella qui cherche à se frayer un chemin dans la foule, elle se jette sur moi, doucement elle me tourne vers le haut, me soulève délicatement la tête, me prend dans ses bras, son odeur m'envahit les narines. Elle ne veut pas me montrer qu'elle pleure, mais ses larmes tombent sur mon visage.
« Giuliano, ne me quitte pas, ne nous quitte pas... comment je ferais pour vivre sans toi... je t'aime Giuliano ! »
Je cherche à dire quelque chose mais ma voix ne sort pas, elle se baisse, approche son oreille de ma bouche, j'arrive à lui murmurer :
« Je t'aime Anabella, tu seras une maman magnifique. »
Puis, les hommes de Fresco arrivent, ils l'arrachent avec force, je comprends qu'ils veulent l'emmener au commissariat, sûrement pour en savoir plus sur moi et sur sa complicité éventuelle.
J'espère qu'ils ne lui font pas de mal.
Pendant qu'ils l'emmènent avec eux, parmi le bruit de la foule, je l'entends qui essaye de me dire quelque chose, mais sa voix m'arrive distordue, incompréhensible :
« Lamedegé ! »
C'est tout ce que j'arrive à entendre.
Les lumières et les sons se dissolvent.
ؼG%
VOUS LISEZ
L'hôte
Science FictionGiuliano vit à Paris. Un jour, il se réveille en 1936. Comment est-ce possible ? Comment revenir en arrière ? Si Giuliano change le cours de l'Histoire, que se passera-t-il dans son présent ? Une succession d'événements dans l'espace et dans le te...