Chapitre 11

12 3 0
                                    

Mohamad était arrivé à Los Angeles en août 2003, avec en poche les maigres économies qu'il avait pu sauver de son périple. De quoi survivre quelques jours, pas plus.

Immédiatement, il s'était fait embaucher au noir dans un restaurant. Il faisait la plonge, de vingt heures à deux heures du matin, pour une poignée de dollars. Il vivait dans une chambre d'hôtel miteuse, avec la peur permanente de se faire arrêter par les services de l'immigration. Il avait alors cru bon de se procurer de faux papiers auprès de truands, qu'il n'avait évidemment pas les moyens de payer. Il avait donc accepté de vendre de la drogue pour eux, jusqu'à ce que sa dette soit épongée.

Là, il avait eu la plus mauvaise idée de sa vie : tenter de doubler ses employeurs. Il avait pris la poudre d'escampette en emportant dans ses bagages plusieurs kilos de coke. Avec l'argent qu'il pensait en retirer, il pourrait intégrer une université. Malheureusement, les malfrats le retrouvèrent et lui posèrent un ultimatum : il avait deux semaines pour rembourser ou ils le tueraient. Et qu'il ne tente pas une nouvelle fois de fuir...

Ironiquement, il dut son salut à la police. Arrêté alors qu'il dealait, il ne se fit pas prier pour balancer aux flics tout ce qu'il savait sur les mafieux qui le pourchassaient. Ainsi, il pouvait espérer que ses poursuivants iraient en prison pour longtemps, quand lui-même bénéficierait de l'indulgence du procureur.

Le résultat alla au-delà de ses espérances. Le policier qui l'avait arrêté le prit en sympathie. L'histoire du jeune garçon l'avait touché. Il admirait son courage et sa ténacité. Il accepta de le laisser libre et de ne faire apparaître son nom nulle part dans le compte-rendu de l'affaire. Il se proposait même de l'aider à obtenir des papiers en règle. Pour l'université, il ne pouvait rien faire – trop cher – par contre, il pouvait le pistonner pour un emploi.

Mais surtout, il était en mesure de le protéger de la mafia en lui faisant intégrer le programme des indics de la police.

Marché conclu : le réfugié irakien était devenu pourvoyeur d'informations et, depuis cette époque, entre les deux hommes, c'était « à la vie, à la mort ».

Ce représentant des forces de l'ordre s'appelait John P. Hayes.



Dans le vide-poche du taxi, le téléphone fit entendre sa sonnerie. Il utilisa l'oreillette pour répondre.

— Allo ?

— Salut Mohamad, c'est John.

— Hayes ! Comment vas-tu ?

— Très bien. Je suis sur une affaire et...

— Tu as besoin de mon aide, c'est ça ?

— Exact. On ne peut rien te cacher.

— De quoi s'agit-il cette fois-ci ? Suivre une femme adultère ? Dévoiler la double-vie d'un notable ? À moins que Britney Spears n'ait égaré son chihuahua ?

John avait l'habitude de l'humour de son ami.

— Pas du tout. Je travaille pour Shirley McAllister, la présentatrice.

— La classe ! Toujours dans les paillettes, en somme ?

— Comme tu vois.

— Je ne comprendrai jamais pourquoi tu as quitté la police pour faire ça. Traquer les cartels de la drogue, ça a quand même plus de gueule que de s'occuper des petites affaires de la jet set.

— La jet set rapporte plus et il y a moins de paperasse.

— Ah, d'accord. Mais passons. Que puis-je pour toi ?

Dévoré de l'intérieur [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant