Chapitre 40

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L'homme rangea le pistolet dans sa poche et s'approcha d'elle en tendant une main amicale.

— Bonjour. Je me présente, je suis le docteur Clifford Steinbeck.

— L'homme du rêve !

— C'est bien moi.

Effectivement. Sauf que, contrairement à ses apparitions oniriques, il ne tenait pas de cor de chasse et n'était pas vêtu d'un caleçon. L'homme était de taille et de corpulence moyennes, les yeux marron et la chevelure châtain foncé, grisonnant aux tempes. Il devait avoir la quarantaine et, pour une fois, donc, portait une tenue correcte : chemise blanche, pantalon gris en toile et mocassins en cuir noir.

— Comment m'avez-vous retrouvé ?

— Ce n'était pas très dur. En fait, j'étais détenu dans la cellule à côté de la vôtre. Quand je vous ai entendue sortir, j'ai compris que quelque chose clochait au niveau de la sécurité. J'ai ouvert ma porte et constaté que vous étiez déjà partie. J'allais me précipiter à votre suite quand les bruits de votre échauffourée avec le gardien me sont parvenus. En constatant qu'il venait par ici, je me suis à nouveau enfermé.

— Et vous m'avez laissée me débrouiller seule ? Merci, très sympa.

— Qu'aurais-je pu faire ? Je ne sais pas me battre : je suis un scientifique.

— Et votre arme ?

— Ce n'est pas la mienne. Pendant que ce type (il désigna du doigt le cadavre de John) vous étranglait, je me suis faufilé dans son dos pour récupérer le pistolet sur le corps du garde. Vous ne m'avez pas vu ?

— Non. Je ne faisais plus vraiment attention à grand-chose à ce moment-là.

— Je comprends.

— Quoi qu'il en soit, je vous dois une fière chandelle. Sans vous, je serais morte. Merci.

— De rien.

— Mais, dites-moi, pourquoi étiez-vous prisonnier ?

— Eh bien, lorsque votre ex-employé a balancé aux agents de la base que vous aviez fait un rêve vous envoyant à l'entrée secrète du site, ils ont tout de suite compris que j'étais dans le coup : je suis le seul à maîtriser la communication subconsciente à distance.

— Une technologie extraterrestre, je parie.

— Exact.

— Comment est-ce que ça marche ? Parce que c'est quand même bizarre cette façon de...

— Désolé, nous n'avons pas le temps pour les explications. Nous devons quitter la base et nous mettre à l'abri.

— Attendez, j'ai d'abord une autre question, encore plus importante que la précédente.

— Je vous écoute.

— Avez-vous des cigarettes ?

Quand le docteur sortit un paquet de Lucky Strike de sa poche, Shirley eut une bouffée de reconnaissance pour l'univers.

Merci, ô Jésus, Bouddha, Jéhovah ! Merci de me donner ma dose de nicotine quotidienne. Soyez loués jusqu'à la fin des temps !

Elle tira une clope du paquet, qu'elle coinça dans sa bouche, et demanda du feu. Il lui tendit un zippo.

Elle enflamma la cigarette et la téta goulûment. La fumée âpre lui arracha délicieusement la gorge ; les goudrons s'incrustèrent généreusement dans ses alvéoles pulmonaires et son cerveau pleura de bonheur quand la merveilleuse nicotine vint lui caresser les neurones.

Dévoré de l'intérieur [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant