Les catacombes avaient toujours eu mauvaise réputation. Connues du grand public pour être le foyer des morts qui pullulaient dans ce qu'il restait d'Agrisa, elles étaient source de bien des histoires et d'effroi. Officiellement, leur réveil avait été causé par une série de sombres rituels nécromantiques il y a plusieurs siècles. Mais il n'en était rien ; juste un mensonge de plus diffusé par les Sages des Grandes archives.
En vérité, l'influence néfaste des Abysses était responsable de cet éveil.
Depuis la désertion de la cité, les morts veillaient. Après tout, cet endroit avait toujours été le leur. Ils y étaient nés, y avaient vécu et y étaient décédés. Et même si la Nouvelle-Essenie venait un jour à tomber, cela n'aurait aucune importance. Ils continueraient de défendre farouchement ces lieux comme ils l'avaient toujours fait, avec une volonté inébranlable, jusqu'à l'anéantissement complet de leur âme et jusqu'à ce que leurs os tombent en poussière.
Les catacombes étaient un sanctuaire, le dernier endroit que beaucoup pouvaient encore appeler "maison". Ils y étaient très attachés. D'une certaine façon, ces lieux symbolisaient le début et la fin de leur existence ou plutôt de ce qu'il en restait.
Réservées par le passé aux habitants des troisième et quatrième niveaux, les catacombes avaient été agencé de façon assez désorganisées. Des couloirs de toutes tailles s'étiraient dans diverses directions sans suivre de plan précis et de petites chambres funéraires pouvaient se retrouver perdues au milieu d'autres plus grandes. La tombe la plus ancienne datait d'il y a environ mille cinq cent ans, vers le milieu de la Quatrième Ère. C'était la tombe d'un riche marchand de l'époque.
Depuis la redécouverte d'Agrisa, nombreux étaient ceux qui s'étaient aventurés dans ces couloirs obscurs pour en soutirer ses secrets. Pendant un temps, ces ruines furent le centre de bien des attentions.
Mais aujourd'hui de nouveau, sa paix avait été troublé.
Un groupe d'étrangers avait brutalement investi l'endroit et en avait chassé les morts. Ces inconnus, aux intentions encore troubles, avaient érigé en quelques heures une barrière impénétrable, excluant ces âmes d'un lieu qui était légitimement leur.
Calderon Nimra, un des deux chefs de l'expédition, s'était installé dans une des petites chambres funéraires vers le centre de la zone. La pièce avait été garnie d'un couchage de fortune mais relativement confortable ainsi que d'une table et de deux chaises en bois. Une vingtaine de chandelles disséminées un peu partout éclairaient la pièce. Leur cire avait suffisamment fondu pour les maintenir droites et collées au sol.
Calderon, installé à cette table, écrivait dans un petit carnet depuis une vingtaine de minutes. Un second livre un peu plus grand, se trouvait ouvert non loin de lui sur ses dernières pages écrites. Sa couverture était marron et beaucoup plus usée.
Calderon était concentré, sa plume glissant sur le papier avec vitesse et précision. Les quelques mots rédigés ici se réservaient à une future lettre qu'il destinait à sa famille, en particulier à son épouse et à ses enfants. Ils les savaient inquiet mais ils devaient comprendre. Cette tragédie d'il y a treize ans les avaient tous bouleversés et Calderon ne trouverait pas le repos tant qu'il ne saurait pas la vérité. Ce souvenir le hantait depuis trop longtemps.
Il terminait tout juste son brouillon lorsque le contremaître vint à sa rencontre.
— Mon seigneur !
Calderon releva la tête tout en posant sa plume.
— Qu'y-a-t'il ?
— Nous sommes enfin parvenu à libérer l'accès au passage.
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Toi qui apportes la nuit
FantasyLes légendes parlent des Abysses comme d'une vision sombre et tordue du monde, comme d'un cauchemar éveillé dont nul ne pourrait s'échapper. Dans leurs sillages ne se trouvent que mort et désolation et les rares survivants qu'elles laissent derrière...