3. You ( Don't ) Know Me

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"Les étoiles sont éclairées pour que chacun puisse un jour retrouver la sienne."

Le Petit Prince - Antoine de Saint-Exupéry

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Swann

Des lèvres humides se posèrent sur ma joue alors que je passai les portes de l'université. Je me décalai rapidement en grognant. Je n'avais pas besoin de regarder sur ma droite pour savoir qui venait de m'infecter de ses bactéries.

- Joyce ! Arrête de faire ça, putain, c'est dégueulasse ! grondai-je en m'essuyant la joue.

- Ça va, arrête un peu de te plaindre, c'est juste un bisou. Je fais ça parce que je t'aime. Et puis, je n'ai pas la peste non plus, ria-t-elle.

- Encore heureux ! Mais tu seras sympa, je ne suis pas tellement d'humeur pour tes effusions d'amour en public aujourd'hui.

- Tu n'es jamais d'humeur en ce moment, remarqua-t-elle. Et ça en devient sacrément ennuyant. Mais c'est pas grave, parce que tu es mon ami et que je supporterais n'importe quoi pour toi, y compris tes humeurs massacrantes. Et je sais que tu en ferais de même pour moi, parce que je suis ton amie, et que tu m'aimes, alors tu auras beau te plaindre autant que tu veux, tu me laisseras quand même continuer mes effusions d'amour, comme tu les appelles.

- C'est bien parce que c'est toi, soufflai-je. Je ne laisserais pas faire n'importe qui.

- Je préfère ça, dit-elle en plaçant son bras droit sous le mien.

Nous marchâmes quelques secondes en silence au centre de ce couloir principal. Quelques personnes me saluaient au passage, des amis, ou en tout cas des connaissances que je m'étais faites depuis mon entrée à l'université. Mon moment de calme ne dura pas puisque, comme à son habitude, Joyce décida de briser le silence. C'était trop beau pour durer.

- Alors, avec ton père, comment s'est passé ce retour ? lança-t-elle.

Et en plus il fallait qu'elle aborde ce sujet là. Elle savait que mon père était revenu après avoir passé quelques jours à Londres, et elle se doutait que notre échange ne s'était pas fait dans le calme et la bonne humeur. De ce fait, elle aurait aussi dû se douter que je n'aurais pas envie d'en parler. Et si elle ne l'avait pas encore compris, je crois que le regard noir que je lui servis fut assez compréhensible.

- D'accord, j'ai compris ! sourit-elle en levant les deux mains en l'air. Ça s'est mal passé, vous vous êtes engueulés, tu as fini par passer ta soirée seul dans ta chambre à fumer, et tu ne veux pas en parler. Je connais la chanson.

Je la regardai, un sourcil haussé et un rictus collé au visage. Elle avait tout compris, et me connaissait très bien. Mais ça m'amenait aussi à me demander si ma relation conflictuelle avec mon père était si évidente que ça. En même temps ce n'était pas un secret. J'aurai tellement aimé avoir une bonne relation avec ma famille, où l'on serait à l'écoute les uns des autres, indulgents, tolérants, mais je crois que je pouvais toujours rêver.

Je tentai de ne plus penser à ça au risque de me taper un foutu mal de crâne de bon matin et laissai Joyce m'entraîner au détour d'un couloir.

- Au fait, tu ne devineras jamais qui j'ai croisé hier ! s'écria-t-elle en se plaçant devant moi.

Je plongeai mon regard dans ses yeux noisettes, ils pétillaient tandis qu'un grand sourire lui barrait le visage. Au contraire, j'avais bien peur de deviner, justement. Après la scène à laquelle j'avais assisté hier, après avoir passé la nuit à y repenser, après avoir admis que ce n'était certainement pas une hallucination, alors oui, j'arrivais aisément à deviner. Surtout avec ce qui se trouvait devant mes yeux, cette personne qui arrivait du couloir de gauche et qui était désormais dans mon champ de vision.

FALLINGOù les histoires vivent. Découvrez maintenant