FALLING

15. Let The Games Begin

"Notre bonheur, c'est une joie au conditionnel permanent, où plane le spectre de la déception, de la perte et de la souffrance. Nous ne serons jamais aussi heureux qu'à travers le doute."

Maxime Chattam

♠️♠️♠️

Yaël

Je ne tenais plus en place.

Je ne savais pas pourquoi je me comportais comme ça mais j'étais particulièrement intenable. Ma soeur était calme à côté de moi, alors c'était dire à quel point je devais être insupportable.

Je courais partout dans la maison sous les yeux interrogateurs de Selia. Indécis et insatisfait, j'avais dû changer trois fois de pull alors que c'était inutile puisque ce dernier serait caché par mon manteau. Et, à chaque fois que je passai devant un miroir, je ne pouvais pas m'empêcher de me recoiffer, tentant de replacer mes indomptables boucles brunes.

Je crois que j'essayais de faire passer le temps, impatient d'être à ce soir, impatient d'assister à ce match si important pour Swann. je savais que c'était le premier de la saison et qu'il se mettait une grande pression, obsédé à l'idée de le gagner pour prouver qu'il avait sa place dans cette équipe et dans ce sport.

C'était important pour lui, alors c'était important pour moi.

C'était comme si je ressentais moi-même une pression sur mes épaules. Je sentais cette excitation courir le long de mon corps et traverser mes veines. J'avais hâte d'y être. Et j'étais aussi terriblement impatient de le revoir jouer un vrai match pour la première fois depuis six ans. Ça m'avait touché qu'il me propose lui-même de venir le voir jouer. Et je crois que c'était pour ça que j'étais dans cet état, comme un pauvre ado qui ne saurait pas contrôler ses émotions.

Pourtant je savais bien que ce n'était pas comme s'il s'agissait d'un rencard, loin de là. J'allais juste le voir jouer au foot de loin, du haut des gradins et accompagné de ma soeur. Je ne savais même pas si j'aurais l'occasion de lui parler avant ou après le match. Et j'étais conscient que Swann se fichait de la couleur de mon pull comme de sa dernière copine. Mais je n'arrivais pas à me calmer.

C'était ridicule. J'étais ridicule.

En passant pour la troisième fois devant le salon, je vis ma mère me regarder avec un sourire amusé tandis que Selia, assise tranquillement sur le canapé, avait un sourcil haussé. Les mains sur ses genoux, elle était particulièrement calme et semblait m'attendre avec patience et assurance. Deux mots qui semblaient s'être momentanément volatilisés de mon vocabulaire.

- Dis Yaya, pourquoi tu cours partout ? lança-t-elle. La dernière fois que tu t'es comporté comme ça, c'était quand tu avais rendez-vous avec ton ancien amoureux. Là on va juste voir un match, pas la peine de t'inquiéter.

Je m'étais figé sur place, comme tétanisé par ce que venait de dire ma soeur. Mes yeux écarquillés se dirigèrent dans sa direction avant de se reporter sur ma mère qui pouffait dans son coin. Les yeux plissés, je leur envoyais aussitôt un regard noir.

Insupportables. Elles étaient insupportables. Il n'y en avait pas une pour rattraper l'autre. Mais qu'est-ce que j'avais fait pour atterrir dans cette famille ?

De toute façon, ma soeur ne savait pas de quoi elle parlait, elle n'avait que neuf ans. Elle n'allait quand même pas se mettre à analyser le comportement des autres alors que le seul problème dans sa vie était de déterminer quel était son dessin animé préféré. Et je ne vois pas pourquoi ma mère venait se mêler de ça. Mon comportement était tout à fait normal, merde !