FALLING

45. Twisted Game

"L'essentiel est sans cesse menacé par l'insignifiant."

René Char

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Swann

C'était le jour du match. Un match contre l'équipe universitaire de Leeds qui s'était déplacée jusqu'ici, à Oxford. Nous avions l'avantage de jouer chez nous alors que la dernière fois, nous étions l'équipe en déplacement. C'était aussi un match très important, nous devions le gagner pour espérer continuer la compétition. Alors nous devions rester concentrés, imperturbables, l'esprit fixé sur cet objectif invitant à la cohésion de notre équipe. Nous ne pouvions pas nous permettre de laisser passer cette chance.

J'en étais conscient.

Pourtant, je n'arrivais pas à rentrer dans ma bulle et ne penser qu'à ce match. Je n'arrivais pas à faire le vide dans mon esprit parce que celui qui le parasitait ne cessait de me regarder, me jetant des œillades, sans jamais agir.

En effet, Hugo ne faisait rien d'autre que de m'observer depuis le début de semaine, depuis qu'il avait été témoin de cette conversation entre Kaitlyn et moi. Et cette information qu'il détenait à mon propos, il ne l'avait toujours pas utilisée. Et c'était particulièrement angoissant, parce que je ne savais pas ce qu'il attendait pour s'en servir contre moi, je ne savais pas ce qu'il se tramait dans son esprit pour qu'il mette autant de temps à en faire quelque chose.

Je ne savais pas ce qu'il attendait. Mais je connaissais Hugo, malheureusement il n'était pas le genre de personne à laisser cette histoire couler. Il aimait trop retourner les choses en sa faveur, il aimait trop utiliser une pression sur son entourage pour se croire tout puissant, il aimait trop utiliser les faiblesses des autres à son avantage. Et il détestait trop ce que j'étais pour ne pas m'en faire baver. Parce qu'il était trop con pour comprendre que je ne faisais rien de mal et que ça ne devrait pas compter.

Alors j'attendais, la boule au ventre, de savoir quel serait le sort qu'il me réserverait.

Et pour l'instant, je ne comprenais pas son comportement. Les jours qui avaient suivis cette révélation, Hugo s'était bien sûr éloigné de moi comme si j'avais la peste, mais il ne m'avait adressé que quelques regards. Des regards mauvais, mais sans paroles ni actes pour les accompagner. Je m'étais attendu, peut-être, à en voir de toutes les couleurs quelques heures plus tôt alors que je me rendais à notre entraînement d'avant match, mais toujours rien. Evidemment, je ne pouvais pas dire que j'étais déçu, mais cela renforçait ma crainte ainsi que ma vigilance.

Très étonnamment, l'entraînement s'était déroulé sans encombre, et aucun autre membre de l'équipe ne m'avait regardé de travers, signe que Hugo n'avait encore rien dévoilé à personne. Je pensais pourtant que ce serait son premier réflexe, qu'il se ferait un plaisir d'en informer toute la fac. Mais il n'en était rien, aucun joueur ne m'avait fait de remarque, ne m'avait confronté ou même bousculé. J'étais bien obligé de constater que Hugo avait gardé le silence. Dans quel but ? Peut-être me croyait-il ? Non, non c'était impossible, sinon il n'aurait pas adopté ce comportement avec moi. Mais alors qu'attendait-il ?

Certes, il semblait méfiant et distant envers moi, me fixant durement, mais sans jamais agir, ni même simplement me confronter. Il restait là, calme comme un océan avant une tempête. Je ne savais pas à quoi il jouait, mais ça ne me rassurait pas.

Au contraire, malgré le bon déroulement technique de notre entraînement, je ne me sentais pas bien. Je n'étais pas serein, et je ne me sentais pas en sécurité. Alors je restais sur mes gardes.