Un sentiment que rien n'efface

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Texte by LielASkyangel

Elle jugeait de son regard impassible quiconque se présentant devant sa personne, tout le monde craignait son verdict. Le moindre rictus sur son visage d'ange faisait tressaillir mon cœur, pourquoi je réagissais ainsi ? Je ne lui avais jamais parlé mais je l'aimais néanmoins même si son attention m'échappait. Je connaissais Roxane depuis mon enfance, depuis qu'elle avait emménagé sur le palier en face de chez moi et jamais elle ne m'avait parlé.

Elle était une femme ravissante avec ses longs cheveux noirs tombant en cascade sur ses épaules menues, son visage pâle à la peau translucide gardait précieusement dans un écrin d'amande deux saphirs d'une pureté remarquable, qui transperçait l'âme de n'importe qui d'un seul regard. Son élégante silhouette, ses courbes et ses volutes faisaient de Roxane, la plus belle femme que je n'avais jamais vu en ce bas monde. Lorsqu'elle passait dans les couloirs, elle laissait derrière elle un doux parfum fleuri, voilà comment rapidement sa présence m'était devenue indispensable.

Pendant des années, je n'eus pas le courage de l'aborder, la trouvant inaccessible comme une illusion gracieuse. La plus douce des chimères où je me laissais emmener volontairement rien qu'en me réfugiant derrière mes paupières pour m'abandonner à la plus savoureuse des drogues : l'imagination. Je n'avais pas le courage de parler au mirage de cette créature qui avait mon cœur entre ses mains. Lorsqu'elle me regardait, je n'avais pas l'impression d'exister, comme si elle ne me voyait pas.

D'autre arrivait à obtenir ses grâces à lui parler, à la faire rire jusqu'aux larmes. Je continuais mon chemin en baissant la tête parfois des larmes coulaient le long de mes joues. Il m'était impossible de rester loin d'elle trop longtemps alors d'un revers de manche j'effaçais les traces de mon échec pour continuer à la contempler des heures durant sans qu'elle ne me remarque, sans qu'elle ne jette une fois son regard vers moi. Je restais alors seul, à distance du sujet de mes sentiments, comme une ombre qu'elle dissimulerait derrière elle.

Je n'étais pas le plus populaire des étudiants, je dirais même que je fais parti des indigents, de ceux qu'on remarque seulement quand on a besoin d'eux pour prendre les cours, faire les devoirs etc. J'étais même en dessous de ça puisque personne ne m'adressait la parole dans l'université, j'étais ignoré de tous, l'impression d'être un nuisible me pesait lourdement. Je me demandais parfois comment je faisais pour me lever le matin et continuais cette routine. Le pire était l'ambiance à la maison, mes parent ne se parlaient plus, je voyais ma mère pleurer constamment sans raison apparente et chacune de mes tentatives pour lui remonter le moral étaient vaines. Mon père lui m'ignorait complétement, à ses yeux je n'existais pas sans doute je n'étais pas assez bien pour Monsieur, d'un autre côté je le comprenais un peu, j'avais peur de parler à une fille, y avait de quoi avoir honte.

Je me souviens un jour avoir parlé à Roxane. C'était le jour de l'accident, en sortant des cours j'avais suivi Roxane jusqu'à notre arrêt, elle avait ses écouteurs roses bien enfoncés dans ses oreilles et n'entendait pas le monde qui l'entourait. Elle était concentrée à balancer ses hanches au rythme de la musique et n'avait pas vu la voiture sombre qui arrivait à vive allure. Il m'avait fallu juste quelques secondes pour réagir, je courus vers elle pour la pousser hors de la trajectoire du véhicule. Je n'avais pas pensé que je me prendrais le parechoc en pleine poitrine, allongé sur le dos je cherchais à reprendre mon souffle et à ce moment elle se pencha vers moi, elle me regarda pour la première fois et je pus lui dire dans un souffle entrecoupé un timide salut.

Depuis elle m'ignore complétement, depuis tout le monde m'ignore comme si je n'existais pas. Enervé, je suis allé la voir pour avoir une explication, elle s'est tournée vers moi et traversa mon corps, je n'existais plus.

Concours d'écritureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant