Oracles (4) - Renwyck

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La nuit était tombée depuis quelques heures et un brouillard épais avait envahi les abords du village. Adossé à la clôture du potager, Renwyck attendait dans l'obscurité la plus complète. Son souffle se condensait en des vapeurs indissociables de la brume environnante et malgré sa veste en peau de mouton, il grelottait dans le froid.

Ce soir, ils attendaient un voyageur en provenance de la capitale, le Château de Nacre. Avec l'hiver, les visites clandestines de Magians s'étaient interrompues, mais quelques semaines auparavant, sa mère avait reçu une commande. Celle-ci leur avait été portée par une hirondelle sous la forme d'un petit parchemin scellé que seule Aiwe pouvait ouvrir. Celle-ci s'était donc affairée à la tâche et les différentes préparations étaient achevées. Seul manquait désormais leur commanditaire.

Soudain, entre deux nappes de brouillard, Renwyck aperçut une masse sombre, énorme et menaçante. Il songea aussitôt à une bête sauvage. L'obscurité l'empêchait d'en déterminer la nature. L'instant suivant, la brume l'avait de nouveau engloutie dans des vapeurs d'argent.

L'inquiétude l'avait gagné. En temps normal, il n'aurait pas pris peur à l'approche d'un animal sauvage mais la bête entraperçue lui avait semblé énorme. L'omniprésence de la brume le mettait mal à l'aise. Il ne voyait rien. Tous les sons semblaient étouffés. Le danger pouvait venir de n'importe où. Il scrutait avec attention la direction dans laquelle il avait aperçu la bête, tentant de percevoir un mouvement, un son.

Un craquement retentit dans son dos et Renwyck se retourna, le cœur battant à tout rompre.

Un homme se tenait devant lui dans la brume, difficile à distinguer dans l'obscurité. Renwyck ne pouvait que deviner sa silhouette encapuchonnée et son bâton de marche. Tâchant de garder son calme, il l'interpella :

— Qui va là ?

— Juste un marcheur dans la nuit.

— Et où allez-vous ?

— Là où me mènent les Toiles.

— Et que cherchez-vous ?

— Ce qu'il me sera donné de trouver.

Renwyck acquiesça, il s'agissait des réponses convenues. D'un signe, il invita l'étranger à le suivre. Ils passèrent la clôture, traversèrent le potager et rejoignirent la porte arrière de la bâtisse. Sans un bruit, Renwyck fit jouer les clefs et ils entrèrent. La pièce était plongée dans le noir. Seules rougeoyaient encore quelques braises dans l'âtre. Sans s'attarder, ils se dirigèrent vers l'escalier de bois et montèrent à l'étage où Aiwe les attendait dans la pièce à vivre.

Il y régnait une douce chaleur baignée de la lumière orangée des chandelles. Le contraste avec les ténèbres humides au-dehors était saisissant. Un petit foyer était aménagé dans un coin de la pièce ; il y brûlait une bûche et une marmite en fonte était suspendue au-dessus des flammes. Renwyck humait les odeurs réconfortantes de la fumée et d'une soupe de lentilles et de champignons séchés. Sa mère se tenait près du feu, elle les accueillit avec un sourire.

— Soyez le bienvenu, Maître Akhbar. La route est longue depuis le Château de Nacre et le temps n'est pas encore clément pour les voyageurs. Venez donc vous réchauffer près du feu et manger quelque chose de chaud.

À la lueur des chandelles, Renwyck put enfin observer leur visiteur. C'était un homme dans la force de l'âge, plus âgé que sa mère, au physique imposant. Il portait une barbe châtain bien fournie et ses cheveux étaient coupés très courts, probablement pour ne pas mettre en avant sa calvitie naissante. Ses yeux frappèrent le plus Renwyck. D'une couleur gris vert, ils recelaient un regard perçant où se lisaient intelligence et volonté. Lorsqu'il prit la parole, sa voix était grave, mélodieuse.

L'Herboriste - Les Thaumaturges IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant