§ Chapitre onze §

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Deanna ouvrit la grande boîte blanche en tirant sur le ruban rouge qui la tenait fermer. Le tissu semble si doux. Je m'approche et caresse la robe du bout des doigts. Je la saisis et la déplie pour voir à quoi elle ressemble. Elle est toute noire, mais tout le corsage est argenté et se dégrade au niveau de la taille. Jamais de ma vie on ne m'avait offert quelque chose d'aussi beau. Je me suis tournée vers Deanna, un sourire me montant jusqu'aux oreilles.

- J'ai fait faire la même pour moi, mais en blanc et or. Dit-elle.

- Je...je ne peux pas l'accepté... Soufflais-je en l'admirant, les yeux pétillants de fascination comme ceux d'un enfant pour un jouet.

- Tu sais très bien qu'on n'a pas le droit de refuser mes présents. Rétorqua-t-elle en posant son menton sur mon épaule. Dis toi que c'est pour rattraper tes deux anniversaires où je n'étais pas là pour toi.

Je rigolais avant de plaquer ma main sur la sienne.

- Tu es pardonné... Chuchotais-je, ne pouvant élever la voix de part l'émotion.

Elle rigola à son tour avant de me serrer contre elle. J'avais ma propre robe de bal. Je n'aurais pas à la rendre, parce qu'elle m'appartient, à moi.
Deanna m'encouragea à l'enfiler. Je n'osais pas me déshabiller devant elle qui a un corps si parfait, sans vergetures, sans rondeurs imparfaites, et sans tâche dorée. Mais elle m'a dit de ne jamais avoir honte de mon corps de femme, qui sera toujours joli pour les gens qui auront la chance de le contempler. Alors j'ai enlevé ma robe de dame de chambre, et j'ai laissé mes défauts à l'extérieur de la pièce. Ici, je suis jolie! Ici, je me trouve belle parce qu'on me le dit explicitement. Cela aussi m'avait manqué, de me trouver jolie plus que serviable. En un instant, je suis passée de servante crasseuse à presque princesse, belle, séduisante, fière, et épilée ! Grand dieu je n'aurais jamais cru penser ça de moi. Je sens si bon, et je ne suis pas fatiguée alors que nous sommes bientôt en fin d'après midi. C'est un sentiment si doux et nouveau que de se sentir comme on l'a toujours rêvé. De ne pas avoir peur du jugement de l'autre.

Pourtant, lorsque je me suis regardée dans la glace, portant cette robe hors de prix, j'ai aperçu une personne complètement différente. Ce n'était pas moi, mais Elizabeth VanBach. Le temps d'une soirée qui était sensée être merveilleuse pour Addison, je vais la passer dans la peau d'une autre. Je porte une odeur que je ne connais pas -bien qu'elle me plaise-, je ressemble à une personne inconnue, et à une fille inintéressante. Comment ce fait-il que j'ai l'impression d'être tombé au plus bas, alors que je suis habillée aussi richement qu'une Marquise peut l'être ?

- Tu es magnifique... Bafouilla Deanna.

- Merci! Souriais-je timidement.

- Je vais te coiffer.

Sur ces mots elle m'asseoit à sa coiffeuse et défait les nattes dans mes cheveux avant de les brosser. Elle s'applique tant qu'elle en tire la langue. Sa tête me fait rire. Ça me rappelle les après midi que l'on passait à se coiffer mutuellement. À cette époque là déjà, elle avait ce tic de tirer la langue lorsqu'elle se concentrait. Je la regarde faire sans rien dire, en me perdant dans des souvenirs lointains et longtemps enfouis.

- Fini! S'exclama-t-elle en souriant, visiblement fière d'elle.

J'examine son travail. Deux petites tresses partent de chaque côté de ma tête pour se rejoindre dans un chignon bouclé. Je trouve cela si beau.

- C'est ravissant Deanna! Dis-je en me tournant vers elle.

Elle resta le visage figé dans une expression bizarre, comme choqué par quelque chose.

- Comment tu m'as appelé ? Balbutia-t-elle.

- Euh...Deanna... Répondis-je.

Elle me serra dans ses bras un certain temps, le temps que je réalise que c'est la toute première fois depuis très longtemps, que je suis pleinement consciente de l'appeler de nouveau par son prénom. Elle se redressa et me sourit avant de rigoler à gorge déployée. Je la suivis, ne pouvant m'en empêcher.

Carpe DiemOù les histoires vivent. Découvrez maintenant