§ Chapitre dix §

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Est-ce possible, que quelqu'un puisse attendre plusieurs années avant de se sentir enfin redevable ? Il existe des dettes avec un prix plus élevé que pour d'autres, il en existe aussi certaines que l'on refuse de payer, et d'autres qu'on traîne toute notre chienne de vie. Et si il y avait une dette entre Dragan et moi? Et si nous étions redevable l'un à l'autre? Il est vrai que je lui ai empêcher d'être puni, mais ce n'est rien à côté du fait qu'il m'ait sauvé la vie. De part son adoption, il m'a permis de m'émanciper du Berceau de la Chaire, et aujourd'hui je n'ai plus à y retourner. Certes, mes débuts au Berceau des Lumières furent compliqués et tourmentés, mais jamais je n'ai regretter l'orphelinat et la tutelle des Gardiennes.

La cloche de la chambre de la Marquise s'est mise à tinter. Je sors alors de ma rêverie et monte les marches quatre à quatre. Ça doit faire deux bonnes heures que je suis levée, pourtant, j'ai l'impression de ne m'être jamais réveillée. Je donne une tape sur l'épaule de Daniel, qui en donne une à Christian. Je n'ai pas dit un seul mot. J'ai juste marcher jusqu'à l'endroit où l'on m'attendais.

- Addi!!! S'écria Deanna en me sautant littéralement dessus.

- Bonjour... Répondis-je.

- On va passer la journée ensemble à se préparer pour ce soir.

- Oui... En parlant de ce soir...je ne suis pas sûre que ma place soit parmi les convives. Enfin, je veux dire que je serais mieux au service.... Bafouillais-je.

- La place de Addison Clark-Lee est derrière le bar, mais celle de Elizabeth VanBach est parmi les invités. Souria-t-elle en me tendant une grosse boîte blanche.

- Tu n'as pas saisi ce que j'ai dit? Il est trop tard pour faire table rase du passé, comme il est trop tard pour nous.

- Essaie la au moins... S'il te plaît. Me supplia-t-elle.

- Tu ne changeras pas d'avis n'est-ce pas ?

Elle s'approcha de moi, et posa ses mains fines sur mes épaules.

- Tu me connais, alors à toi de me dire si je le ferais ou non.

À cette instant, lorsque je l'ai regardé dans les yeux, je l'ai retrouvée. Cette amie, cette soeur, que j'ai connue et toujours adorée. J'ai poser le paquet sur le canapé, et je l'ai serrée si fort dans mes bras, que j'ai presque cru lui casser une côte. Elle avait cette même odeur de rose et de pêche. Au final, elle n'a pas tant changé que je ne le croyais.

- Ça te dit un petit déjeuner ? Quand as tu mangé de vrais toasts pour la dernière fois ?! S'offusqua-t-elle, ce qui me fit rire.

Des toasts...la seule et unique fois où j'en ai mangé c'était avec Deanna, lorsque j'avais 13 ans. Le morceau de pain grillé vous fond sur la langue et le goût du beurre fondu vous reste collé au palais. Un toast, c'est comme un carré de chocolat, c'est petit, mais il suffit d'y goûter une seule fois pour être conquis.

Deanna et moi avons passé la matinée à rattraper le temps perdu, en discutant des choses que nous avions traversées l'une sans l'autre. Nous rigolions comme si nous ne nous étions jamais séparées, comme si il n'y avait jamais eu de distance entre nous deux. La mère de Deanna disait toujours que deux vrais amis, quoi qu'il arrive, seront toujours la lumière de l'autre, et ça peu importe l'intensité de l'obscurité qui les sépare. Je ne comprenais pas cette phrase jusqu'à aujourd'hui. Et puis, il ne faut pas oublier que les vrais amis ne le sont pas, s'ils ne se sont jamais disputés.

- Ahah... Oh mon dieu... Être en ta compagnie m'a tant manqué. Enfin je veux dire, tu sais?

- Oui... Toi aussi tu m'avais manqué, grande soeur. Souriais-je.

- Oh non ne m'appelle pas comme ça ! Cela me vieillit atrocement ! Rigola-t-elle en prenant de grands airs.

Je rigolais à mon tour avant de croquer dans mon dernier toast. J'ai dévoré mon assiette lentement, pour être sûre de me souvenir de la saveur.

- Bon! Il faut commencer à se préparer ! Dit-elle en se levant.

- Quoi?! Mais il est tout juste onze heure.

- Justement ! Grand dieu! Il est déjà bien tard. Il est temps qu'on s'y mette. Tu penses que j'ai besoin de m'épiler les jambes?

- T'épiler les jambes ?! Mais ta robe te les cache.

Elle plissa les yeux sur moi en lâchant les volants de sa robe.

- Est-ce que tu as déjà épilé tes jambes? Me questionna-t-elle en me coinçant sur mon siège.

- Euh...non...oui...je...je ne sais pas...

- Montre les moi! Ordonna-t-elle.

- Quoi?! Non mais certainement pas ! M'exclamais-je en plaquant mes mains sur mes bas.

- Addi...? Montre moi tes jambes. Fit -elle en pointant un doigt sur moi avec un air strict.

- D'accord... Soufflais-je, ayant peu envie de me disputer de nouveau avec elle.

- Ah! Mais c'est quoi tout ces poils?! S'indigna-t-elle. Il est absolument hors de question que tu ailles au bal avec toute cette fourrure.

- J'en ai pas autant, et puis...ça tient chaud l'hiver... Mouronnais-je entre mes dents.

- On va t'enlever tout ça. Et tes aisselles ?

- Mes...mes aisselles...? Déglutais-je en levant les sourcils.

- C'est pas vrai... Heureusement que je nous ai réservé nos après-midi respectifs. Siffla-t-elle avant de demander qu'on lui apporte de la cire. Tu verras, après ça tu auras la peau aussi douce que celle d'un bébé et les hommes adorent ça, si tu vois ce que je veux dire. Ajouta-t-elle en me faisant un clin d'il.

- Beurk! Les hommes aiment avoir l'impression de peloter un nourrisson ?!

Deanna éclata de rire pour bien montrer qu'elle se moquait de moi ouvertement. Comment suis-je sensé comprendre les hommes alors qu'aucun ne m'a jamais courtisé ? Sauf Esteban, mais ça ne compte pas, nous étions tout deux des enfants lorsque nous étions amoureux, nous n'avions pas la tête à ces choses là. Devenir une femme me semble être une chose bien difficile.

- Ce qu'ils aiment c'est la douceur. Ricana Deanna.

- Pourtant, on m'a dit que les hommes n'étaient pas doux du tout! Chuchotais-je.

- Cela dépend, mais tu sais, tu n'es pas obligée de chuchoter. Il n'y a rien de mal à parler de sexe.

Je lui fis des yeux ronds, ce qui la fit rire davantage. Je crois que je n'ai plus l'habitude de sa franchise. Il va falloir que je m'adapte.

- Alors mesdemoiselles, nous pouvons commencer ? Demanda une femme aux cheveux gris, attachés en une longue natte qui lui descendait dans le dos.

- On va commencer par Mademoiselle Elizabeth VanBach ! Me souria-t-elle.

Je lui souris, un peu réticente envers cette cire, mais tant que je le fais avec Deanna, ce ne peut qu'être agréable.

- Aïe! Criais-je.

Je retire ce que j'ai dit! Ça fait un mal de chien! Les jambes, ça a été, mais grand dieu, qu'ais-je fait pour souffrir autant?! Je n'arrive même plus à baisser les bras. Au moins mon amie a raison, je n'ai jamais eu la peau aussi douce. En plus je sens l'amande et le sucre, mélangé au beurre de charité.

- C'est fini! À la prochaine fois mesdemoiselles. Souria la sorcière à la cire.

- Super! Je me sens plus légère.

- Plus légère, plus légère... J'ai l'impression d'avoir la peau à vif. En plus on dirait une écrevisse, regarde comme je suis rouge! Râlais-je en tendant les bras en direction de mes jambes.

- Mais c'est normal, ne t'inquiète pas. Rigola-t-elle. Et si on essayait ta robe maintenant ?

- Tant que ce n'est pas aussi douloureux que de se faire épiler les aisselles je suis partante. M'écriais-je.

- Parfait! Allez viens! Souria-t-elle.

Carpe DiemOù les histoires vivent. Découvrez maintenant