§ Chapitre quarante-huit §

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La mer était calme en ce cinquième jour de traversée. Le vent fouettait mon visage tandis que j'observais les alentours du pont. Le Capitaine Barden Hackney vint se mettre à ma hauteur, sans pour autant entamer la conversation.

- Dragan ne parle plus que de stratégie. Il ferme à peine l'oeil depuis que nous sommes en mer. Dis-je, rompant le silence.

- Je ne crains pas sa fatigue. Je sais que ça ne l'empêchera pas d'être d'aplomb lorsqu'il faudra parler alliance avec les Loups. Rétorqua-t-il, en appuyant sur ses derniers mots.

- Vous pensez que les Loups refuseront d'êtres de notre côté. Affirmais-je, sans le regarder.

- Je n'ai pas dit cela. Je viens simplement à toi pour te prévenir que les Loups sont connus pour être encore plus méfiants que les Elfes. Passer un marché avec un Loup n'est bizarrement jamais équitable. Siffla-t-il.

- Je sens de l'amertume dans votre voix. Est-ce que vous parlez par expérience mon Capitaine? Demandais-je en me moquant de lui.

- Très amusant. Souria-t-il. Néanmoins, j'insiste sur le fait que vous devrez être prudents. Ajouta-t-il tandis que je portais mon regard sur lui.

- Dois-je comprendre que vous ne nous accompagnerez pas à terre?

- Disons simplement que je ne souhaite pas allonger la liste de divergents que j'ai avec les populations de la forêt de l'Est. Je ne suis pas bien fier de beaucoup de choses que j'ai pu faire au cours de mon existence. Mais heureusement j'ai su reconnaître celles qui en valait vraiment la peine, et j'ai su ne pas les gâcher. Dit-il en passant sont bras sur mes épaules.

Nous restâmes un petit moment ainsi. L'air marin, l'odeur de tabac et de café du manteau du Capitaine me réchauffant le cœur. Ce n'était pas une odeur agréable, mais elle me réconfortait. Je me rappelais que Gaya, lors de mes premiers jours à Browndeck Hall, avait cette même odeur de tabac froid et de café moulu. Elle disait que les gens qui sentaient ainsi s'attiraient souvent la bonne humeur des gens, car ils avaient l'étrange habitude d'être les personnes les plus rassurantes du monde. Leurs mots étaient justes, et leurs phrases ne faisaient pas de détour.

Mais Gaya n'était plus la gentille vieille sorcière que j'avais connu étant plus jeune. J'avais grandi, elle avait rajeuni. Je fus prise d'une nostalgie maladive. Les jours innocents me manquent.

- Je devrais retourner voir Dragan. Après tout j'ai dit que je serais avec lui dans cette guerre, et je ne suis pas du genre à aller à l'encontre de mes promesses. Dis-je, me dégageant du cocon réconfortant qu'était la présence du Capitaine Hackney.

- Ma p'tite, ne te perd pas dans cette guerre. Me souria-t-il tandis que je m'éloignais pour rejoindre le bureau à l'autre bout du bateau.

Il était là. Pencher sur plusieurs cartes de Dubhorror. Certaines étant des représentations plus vastes que d'autres. Il ne sembla même pas sentir ma présence lorsque je fermais la porte derrière moi. Il but une gorgée d'un liquide rose pâle, qui dégageait la même odeur que la boisson que j'avais bu à mon premier réveil au Bois de la Veuve Noire. Je ne connaissais pas les réelles vertues de ce nectar, mais je pensais qu'il pouvait potentiellement servir à tenir éveillé. Dragan usait de tous les moyens possibles pour rester debout, voilà sûrement l'une des raisons qui expliquaient son manque considérable de sommeil. Je passais derrière lui pour passer mes bras autour de sa taille, mais il se dégagea rapidement de mon étreinte.

- Je dois être prêt pour dans deux jours. Je ne parviens même pas à trouver les avantages que nous avons pour les énumérer aux Loups... Je n'ai pas le temps pour autre chose que la stratégie et la préparation de discours mensongers. S'énerva-t-il, balançant les pions posés sur la carte en face de lui.

Carpe DiemOù les histoires vivent. Découvrez maintenant