Chapitre 39

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CHAPITRE 39

La puissance des mots n'a pas de limite. Ceux-ci peuvent calmer les douleurs les plus profondes, apaiser les chagrins trop grands et même calmer vents et marées se donnant en spectacle dans l'esprit. Mais un mot mêlé à la rage reste une arme sans égal. Il poignarde le cœur et agresse l'âme pour rester en écho dans les pensées, revenant sans cesse comme les flots caressant la plage. Mais que l'eau est salée et envahissante lorsqu'elle se trouble de douleur !

La nuit s'était installée depuis des heures déjà. La lune répandait sa lueur glacée sur les arbres d'une forêt épaisse et les tours d'un vaste manoir perdu quelque part dans le Wiltshire. Malgré l'obscurité environnante et le calme plat qui régnait, Lucius Malfoy ne parvenait pas à trouver le sommeil. Les paroles de son fils résonnaient en lui comme autant de bris de verre tailladant son cœur. Comment avait-il pu penser une chose pareille ? Ne faisait-il pas assez de choses pour rendre son fils heureux et s'assurer qu'il ait une bonne place dans la communauté magique ?

L'homme aux longs cheveux presque blancs fixait le plafond de sa chambre sans parvenir à se défaire de ces pensées noires. Le silence de la demeure Malfoy n'arrangeait en rien le tourbillon de pensées qui envahissait son esprit. Mais il restait trop fier pour se remettre en question ou pour en parler à qui que ce soit. Tôt ou tard, il devrait accepter la terrible vérité : il ne pourrait pas venir à bout de ce problème seul.

- Lucius ?

Des heures plus tard, Lucius s'était assis dans son habituel fauteuil dans le salon avec un verre de vin. À son air absent, sa charmante femme s'était aperçue de son mal-être. Mais elle n'en connaissait pas la raison et ne pouvait que s'inquiéter sans savoir. On pouvait bien dire ce que l'on voulait des Malfoy : s'ils étaient froids en apparence, ils restaient soudés en toutes circonstances. Narcissa vouait à son fils et à son mari un amour inconditionnel qui pourrait bien la pousser à donner sa vie pour eux.

La mère du jeune Draco s'approcha de son mari. Ce dernier n'avait pas répondu à son appel et elle se doutait à son silence que ce qui le tourmentait était de taille. Il en fallait beaucoup pour déstabiliser ce cher Lucius Malfoy. Elle passa une main douce dans les longs cheveux de celui qu'elle avait épousé des années plus tôt. Ce fut la seule chose qui fit réagir Lucius, ce dernier relevant la tête vers elle.

- Je ne t'ai pas entendu arriver, dit-il d'une voix lointaine.

- Qu'as-tu donc ? demanda Narcissa sans détour. Tu es absent depuis hier.

- Le Ministère et ses affaires. Tu sais ô combien ces sujets peuvent m'agacer.

- Ces choses ne t'atteignent pas autant. Tu as parlé à Draco hier soir chez Stanislas. Quelque chose t'a contrarié dans son attitude, je le vois.

Lucius se raidit, serrant son verre dans sa main puis en faisant tournoyer le contenu. Il porta le verre à ses lèvres et but quelques gorgées de vin. Il avait beau aimer Narcissa, la capacité que celle-ci avait à le cerner l'agaçait véritablement.

- Draco est insolent. Comme toujours, lâcha-t-il sans plus de précisions.

- Ne me prends pas pour une idiote, Lucius.

- Je n'ai pas envie d'en parler ! s'écria alors son mari avec force en dardant sur elle un regard froid.

Les lèvres pincées, Narcissa fit volte-face pour quitter la pièce et Lucius la laissa volontiers faire. Il souhaitait être seul pour réfléchir aux paroles de son fils même si celles-ci lui fendaient le cœur. Il cherchait en vain l'erreur qu'il avait pu commettre avec Draco. Mais il ne voyait rien là où une personne censée en aurait compté des dizaines.

A travers les yeux du serpentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant