31. Cette porte qui nous sépare du monde

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- Kazue... ouvre la porte...

Elle entend la voix de Kyoka, mais ne bouge pas pour autant.

Elle est là, assise sous son bureau, les jambes repliées, et les joues baignées de larmes.

Après son malaise dans l'ascenseur, elle s'est enfuie dans sa chambre sans un mot. Et pour la première fois depuis très longtemps, elle s'est mise à pleurer.

Elle ne l'a pas fait, quand cette femme lui a fermé la porte au nez. Elle ne l'a pas fait, quand on l'a emmenée loin de Monsieur Hikawa. Ni quand elle est revenue. Ni quand il est mort.

Mais maintenant, elle pleure pour tout à la fois. Y compris pour avoir eu mal quand elle s'est cassé les jambes. Ou pour le froid qu'il faisait dans cette petite cellule qu'elle a longtemps habité. Elle pleure, et personne ne peut la prendre dans ses bras comme celui qui vient de mourir à son tour l'a fait en dernier.

Elle l'a sentit partir du plus profond d'elle même. Elle sait qu'elle ne le reverra jamais.

Elle finit par sourire tristement en laissant ses jambes se détendre un peu.

Il aura tenu sa promesse. Elle ne le reverra jamais.

- Qu'est ce qui se passe ? demande une voix derrière la porte.

- C'est Kazue... je ne sais pas pourquoi, mais elle s'est enfermée dans sa chambre et elle ne répond pas...

Elle s'éclaircit la voix.

- Tout va bien. Mais j'ai besoin d'un peu de calme. S'il-vous-plaît.

- Tu es sûre .... ?

C'est Tsuyu.

- Certaine, murmure-t-elle.

Elle ferme les yeux, bercée par le bruit des pas qui s'éloignent.

Une dizaine de minutes plus tard, elle les rouvres.

- Je sais que tu es derrière cette porte-fenêtre.

La porte coulisse doucement.

- Excuses-moi, je ne voulais pas te déranger.

- J'aimerais être un peu tranquille.

- Tout le monde s'inquiète, en bas.

- Je suis désolée. Je ne suis pas encore capable de gérer toutes mes émotions.

Il soupire et s'approche.

- Raconte.

- Tu sais qu'une fille serait mieux ?

- Tu veux vraiment que l'une d'elles te voit pleurer ?

Elle secoue la tête et il s'installe à côté d'elle, sous le bureau.

- Le dernier membre de ma famille qui pensait un peu à moi vient de décéder.

- Je suis désolé.

- Depuis le temps... je devrais... je ne sais pas... je ne comprends pas pourquoi sa mort me tracasse à ce point. On ne se parlait plus. On ne se voyait plus. Depuis des années. Je ne savais même pas avant de le revoir l'autre jour qu'il était toujours vivant. Et on n'est même pas... du même sang.

- Le type de la ruelle ?

Elle acquiesce lentement.

- C'était ce qui se rapprochait le plus d'un grand frère, je crois.

Il hésite.

- Vous étiez plusieurs enfants, chez Monsieur Hikawa ?

- Non. Lui... je le connaissais de ma vie d'avant.

HérosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant