Chapitre 47 : Le retour de Legolas

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Quelques décennies plus tard...

Le voyage de Legolas s'était étalé en pointillés sur presque soixante-deux ans. Cela faisait six ans qu'il n'était pas rentré chez lui, six longues années. Voilà déjà six ans qu'il vadrouillait sans repos ni répit avec Gimli, son ami qui l'avait rejoint pour cette noble mais secrète quête. Ensemble, ils avaient cherché pendant soixante ans, explorant de la plus luxuriante des plaines aux recoins les plus reculés et accidentés. Dans leur aventure, tous deux avaient perdu la notion du temps, préférant concentrer toute leur énergie à la recherche des ents plutôt qu'à estimer le manque de leurs proches. Mais même si leur dévotion et leur bonne humeur demeuraient tout aussi intactes qu'aux premiers jours, ces dernières années d'aventure leur parurent plus épuisantes encore que toutes autres, leurs dernières recherches les ayant menés à revenir sur les ruines mais non moins inhospitalières terres du Mordor.

Bien que le territoire ne comptait plus aucun arbre pouvant suspecter la présence d'ents, ils s'étaient attelés à l'exploration des lieux avec le même espoir que tout autre endroit, car la vie y reprenait doucement ses droits depuis la chute de Sauron. Legolas et Gimli ne désespéraient pas de retrouver les ents femmes exilées de Fangorn, peut-être nichées au creux de la montagne ou au fond d'une des nombreuses grottes de la région. Aussi désagréable cela fut-il, le territoire fut minutieusement quadrillé. Cette terre, damnée et sombre, n'offrait plus aucune ressource pour s'y établir. On n'y trouvait ni eau, ni nourriture, ni air pur. En Mordor, le soleil restait caché, étouffé par un permanent brouillard gris, rendant leurs recherches sans lumière plus difficiles et épuisantes encore. Même pour des arbres millénaires peu gourmands en confort, ces terres demeuraient invivables et les deux se ravisèrent à les retrouver vivantes.

Malgré son tourment et la difficulté qu'il rencontrait en cette nouvelle étape, Legolas pouvait toujours compter sur Gimli. A deux, ils avaient abordé chaque voyage avec vaillance et enthousiasme. Mais aujourd'hui, les joyeuses années étaient derrière eux : le nain accusait des signes de vieillesse qui les ralentissaient dans leur périple, et ce même avec le soutien infaillible de l'elfe. Gimli était un fier nain qui niait son affaiblissement, compensant ses accès de fatigue par un humour décapant. Même épuisé, le nain s'attachait à encore défier l'elfe autour d'épreuves futiles, mais son optimisme débordant quant à sa condition physique lui renvoyait le reflet de son triste état, n'ayant plus la force de terminer les propres défis qu'il se lançait. Cela inquiétait l'elfe qui essayait de ménager son compagnon de route, mais le nain s'avérait toujours aussi coriace et têtu, et ne se défilait jamais. Avec le temps, Legolas apprit à jouer volontairement de ses faiblesses pour laisser gagner son ami, ne souhaitant nullement qu'il perde de son entrain pour une simple question d'égo.

Un soir, autour d'un feu et d'une cervoise, les deux amis discutèrent longuement et réévaluèrent sagement leurs plans. Ils décidèrent là d'un commun accord que l'étape au Mordor serait la dernière pour Gimli qui devait cesser ce train de vie infernal. L'elfe en informa Jaheira. Par courrier interposé, elle soutint son époux dans ce choix, elle aussi la mort dans l'âme de voir Legolas se séparer ainsi de son meilleur ami et compagnon de route.

Après un long voyage en direction du vent, retrouvant les terres fertiles et les plaines de l'Ouest, vint le jour du départ du nain. Ce matin-là, l'heure n'était plus à la fête ni à la célébration de leur joyeuse complicité. Le trajet de legolas et Gimli jusqu'au port s'effectua en silence, interrompu par quelques souvenirs amusants de leurs déboires. Malgré le bonheur qui attendait Gimli et son infinie préservation qui lui était promise en Terres d'Aman, Legolas ne pouvait s'empêcher de déjà regretter son vieil ami. Il se devrait dès à présent de poursuivre seul son aventure, arborant sa même jeunesse et fraîcheur d'antan. L'elfe ne pouvait que culpabiliser de sa longévité et de son agilité préservée quand son meilleur ami fatiguait un peu plus chaque jour. L'espace d'un instant, il regretta de ne pouvoir vieillir à ses côtés et se dit que ce sentiment, bien que tragique, devait être une expérience formidable à vivre.

L'ombre de Fangorn # Gagnant Wattys 2020 # Seigneur Des anneaux & Legolas X OCOù les histoires vivent. Découvrez maintenant