Chimère - saison 2 - La dame

Episode 3 - Henri - Le décès

Sa reine était la personne la plus proche de lui physiquement, mais également la personne la plus opposée à lui dans sa manière d'être. Le sentiment du roi était très ambigu, il était à la fois pret à tout pour la garder près de lui, mais il la fuyait régulièrement. Car souvent elle lui faisait mal, il se rappelait que trop bien de la fois où elle l'avait rejeté de tout son être, juste parce qu'il avait osé s'exprimer sincèrement. Henri était conscient qu'Anna aimait ce qu'il paraissait de lui, mais il voyait bien qu'elle n'aimait pas tout ce qu'il y avait de plus profond en lui.

Il l'aimait de cela il était sûr, mais il ne l'aimait pas totalement. D'ailleurs Henri n'aimait pratiquement personne totalement, c'était son plus grand regret. Lorsqu'il évoquait ce sentiment, la seule personne qui lui venait était la Bohémienne.

Toutefois il y avait un aspect de la reine que la Bohémienne n'avait pas. Anna était pour Henri une réalité physique. Là où la Bohémienne paraissait belle de cœur, de corps et d'esprit, la réalité d'Anna était tout autre : elle avait un esprit limité à la réalité des choses, un corps qui la trahissait chaque jour au point qu'elle en pleurait et enfin un cœur ... celui-ci était beau, mais il était caché sous des tonnes et des tonnes d'immondices, des suggestions, des programmations de comportements que l'extérieur lui imposait, mais dont elle n'avait pas la force de combattre, car tout cela elle n'en avait pas conscience.

Henri priait pour qu'un jour Anna trouve la source de sa maladie. Le roi savait qu'elle faisait des recherches, elle était aidée en cela par son auditrice et médecin Calisse Mervern Krabic. Anna considérait son auditrice comme une amie à qui elle pouvait tout confier. Henri jalousait secrètement la reine de pouvoir faire ainsi, car lui de son côté n'avait qu'un personnage fictif, mort au demeurant et un autre qu'il considérait comme un père et donc conflictuel et distant.

∞

Au plus profond de sa lassitude d'être roi, il vint un jour où un silencieux lui signifia qu'il était temps de préparer les obsèques de Charles. Au début surpris, Henri demanda le pourquoi. Le silencieux lui expliqua que Charles était très diminué, que sa mort approchait, étant auditeur du roi, c'était à Henri d'organiser la crémation.

Il se rendit dans la journée au chevet de Charles. Son auditeur était alité, un appareil l'aidait à maintenir la saturation en oxygène à un niveau acceptable. Dès que Henri rentra dans la chambre, il s 'arrêta. Il n'avait pas imaginé que la santé et l'âge de Charles l'amèneraient si rapidement dans un tel état d'impuissance. Le roi en fut attristé, en plus d'une culpabilité : il n'avait rien vu venir, il n'avait rien voulu voir. Finalement ce fut Charles qui lui demanda d'avancer.

- Majesté, pardonnez ma convalescence, mais je crains de ne pouvoir vous donner une meilleure image de moi que celle-là.

Henri resta silencieux, il songea même à sortir de la pièce tant il n'arrivait pas à prendre conscience de l'état de Charles. Cet homme qu'il considérerait comme un père, le roi l'avait délaissé de ses visites pendant tant de temps. Charles reprit dans un souffle

- Majesté, ne vous sentez coupable de rien. Ce n'est pas vous qui êtes responsable ni de ma vieillesse, ni de ma santé. J'ose encore espérer que vous n'avez pas l'orgueil de croire que vous contrôlez également ma vie. Vous êtes puissant, mais que je sache vous n'êtes pas encore un Doos ... malgré le fait que certains vous jugent père du soleil ... qui sort d'ailleurs par un des orifices les plus malaisés pour une telle chaleur.

Henri sourit et s'approcha.

- Charles, à mes yeux vous disposez de tellement de qualité que je ne pensais pas qu'il restait de la place pour de l'humour.

Charles laissa échapper un sourire.

- Majesté, considérons que le protocole a été respecté. Veuillez vous asseoir. Avant de passer de vie à trépas, j'espérais vous confier quelques derniers mots. Pour votre information, c'est moi qui aie signifié au silencieux qu'il était temps de préparer mon grand départ. En ma qualité d'auditeur, je savais qu'ils vous en feraient part.