JULIAN

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Trois pas. Juste trois pas pour me saisir de ses doigts. Pour la convaincre de ne plus écouter sa tête, mais son cœur. J'aimerais croire qu'un simple contact avec sa peau suffirait à dissiper le moindre de ses doutes. Mais je suis bien trop réaliste sur la situation. J'ai trop merdé pour me contenter d'emprunter une petite route de campagne. 

Ma dernière chance c'est maintenant.

Pas demain. 

Ni après-demain. 

Je veux qu'elle se rentre dans le crâne que tant que ses yeux s'enflamment à mon contact, je n'abandonnerais pas. 

Loin d'être un simple antiseptique, elle est la chirurgienne de mon cœur. Année après année, Fil après fil, elle a rassemblé les morceaux éparpillés. D'une douceur incomparable, j'ai laissé ses sourires cicatriser ma peine. 

L'admettre n'a pas été facile. L'accepter non plus. 

Ouvrir à nouveau ma cage signifie, libérer un oiseau que je retenais en otage. Un oiseau qui méritait pourtant la prison à perpétuité. Mais la nuit dernière, j'ai pris conscience de la réalité. Á la vieille de leur cinquième anniversaire, j'ai compris. 

Ma femme et mon fils occuperont toujours la même place dans ma poitrine. Même si je décide de voler à nouveau. Ils sont ancrés en moi, grâce aux marques indélébiles tatouées sur ma peau. 

Au-dessus de mon cœur. Dans mon dos. Dans mon âme.

Je veux m'accorder le pardon de ne pas avoir su les protéger comme je l'aurais voulu. Je veux m'accorder un nouveau souffle de vie qui n'est possible qu'aux côtés d'une femme bien précise. Le seul coin de paradis que je veux à mon bras, c'est elle. Et pas une autre.

Certain de ma décision, je lui tends ma main dans un silence de plomb. Un sourire timide sur le coin de sa bouche dénuée de maquillage, elle avance à pas lents dans sa paire de converse porte-bonheur. 

Son petit mètre soixante combiné à sa chevelure de feu, aura finalement eu ma peau. 

Ma Blanche-Neige n'a plus sa place dans un conte. 

Sa place est à mes côtés.

 Dans ma propre histoire. 

Mon propre livre.

Ses doigts glissés au creux de ma paume, je resserre ma prise pour ne plus qu'elle m'échappe. Avec toute la  douceur du monde  je soulève son menton, puis appose mon front contre le sien. Ses yeux humides examinent avec tendresse les traits apaisés de mon visage. Je la laisse faire. Je la laisse voir ce que je me suis obstiné à ne plus accorder. 

Le sanglot étouffé qui s'échappe de sa poitrine me suffit pour la serrer dans mes bras. Á travers ce petit son, je sais qu'elle m'accorde une dernière chance. Une chance dont le droit à l'erreur ne m'est plus permis. 

Plus de retour en arrière possible.

—  Je te demande pardon, pour ne pas avoir réagi à la distance que j'ai instauré depuis notre retour. Pour tout avouer, j'ai eu la frousse. J'ai eu la trouille de ma vie. 

Le nez enfoui au creux de son cou, je n'ose pas continuer la suite. 

— Tu as eu peur de quoi Julian ? elle demande tout bas en me caressant la nuque. 

Elle va me prendre pour un fou. C'est certain.

—  J'ai eu peur que tu me quittes pour la simple et bonne raison que je suis un taré. Un taré capable de coucher avec la propre sœur de sa femme. Un taré capable de tomber amoureux de sa propre belle-sœur. Tu es la seule qui peux m'anéantir mon petit bonbon, sache-le. Et je n'étais pas prêt à entendre de cette belle bouche, une sentence qui je sais m'aurait laissé à terre. Pour de bon. Je suis amoureux de toi, Meghan. Depuis que tu es rentrée d'Afrique, je ne vois que toi. Comme si ton absence m'avait ouvert les yeux. Tu n'avais pas besoin de Blanche-Neige pour me séduire, mais tu as eu raison sur le fait  de te servir de ce personnage de conte de fée. J'avais besoin de  comprendre. De tout comprendre. En dehors de ses courbes parfaites, sa façon d'agir et de réagir a fêlé mon armure.  Totalement incompréhensif pour le type fermé que j'étais devenu. Comme un aimant je me suis laissé aller. Comme un goût de déjà vu. J'aurai dû te reconnaître, même à travers la pénombre. Si seulement tu avais prononcé ne serait-ce qu'un seul foutu mot. Puis la proposition d'être ma femme pour un weekend, a pointé le bout de son nez. C'est là que j'ai envoyé valser Blanche-Neige à ton profit. Dans ma tête, il n'y avait plus que toi. Rien que toi. Même si au final j'ai deux nanas pour le prix d'une, sache que j'aurais toujours ma préférence. 

Au-Delà Des ApparencesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant