JULIAN

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Enfoiré de Jay !

— Je suis désolé, pour votre ex-femme Julian, il articule avec tact et prudence

Ma femme bordel ! Pas mon ex-femme !

Mais je ne dis rien, me contentant d'acquiescer impassible, alors que ma bouche se fait pâteuse.

— Je m'excuse aussi pour le comportement de Jay. Apparemment votre femme, Meghan, il précise en insistant bien dessus, a été un temps la petite amie de mon neveu. En tout cas d'après ses dires.

Comme un robot je hoche la caboche, le visage décomposé sans réussir à sortir un seul foutu son de ma gorge.

— En même temps vu le petit chou à la crème qu'elle est, je comprends qu'il puisse être en rogne, il ajoute en m'accordant un clin d'œil, ce qui me fait sourire comme un idiot. Un sourire gêné, mais un sourire quand même. Quoiqu'il en soit vu le soufflon que je lui ai passé, il ne vous importunera plus. S'il n'a pas su garder un trésor pareil, tant pis pour lui. Si je puis me permettre, il termine tout en se grattant sa barbe de trois jours, ne la laissez pas filer. Cette femme vous regarde comme si vous étiez un ange tombé du ciel. J'aurai donné cher pour que la mère de mon fils m'admire de cette façon-là. Malheureusement pour moi, en quinze ans de mariage seul mon portefeuille a réussi à bénéficier d'un amour sans failles.

Littéralement sur le derrière, la bouche en cul-de-poule, nous partons tous deux dans un fou rire général.

Décidément ce type est énorme.

Le ballon de baudruche que j'étais il y a de cela à peine quelques secondes vient de se dégonfler pour laisser le sang à nouveau affluer mon cerveau.

Meghan, Meghan, décidément tu fais tourner la tête à bien des hommes...

*****

— Vous savez Julian, en quarante ans de carrière vous êtes le premier mec qui mérite toute mon attention, il déclare platement tout en mâchouillant un bout de bœuf mariné au vin rouge.

Son compliment me touche au point que mes joues virent au cramoisies. Je ne suis pas un homme facilement intimidable, et pourtant ses quelques mots me déstabilisent complètement.

Je revois mon père, chauve et amaigri, ajustant mon chapeau de remise de diplôme sur ma tête, les larmes aux yeux. Un instant précieux où chacune de ses paroles me faisait redevenir le petit garçon timide qui au final a toujours fait partie de moi.

'' Je suis si fier de toi fils. Tu me l'avais promis et tu as réussi. Mon petit bonhomme est devenu grand. Je t'aime mon fils, ne l'oublie jamais. ''

Ses deux paumes fragiles et tremblantes pressant mes joues légèrement creusées, je savais à cet instant que son temps était compté.

'' Promets-moi de bien prendre soin de ta mère Ju. Elle aura besoin de toi.''

Clément était là, adossé au montant de la porte, dos à mon paternel. Il tenait la main à une Charlie en larmes. Mes deux soutiens absolus. Deux soutiens qui m'ont aidé en silence à ne pas m'effondrer face l'homme qui sera toujours mon exemple à suivre.

'' Promis papa. ''

Pas besoin de plus pour qu'il se laisse aller dans mes bras. J'ai prié le ciel pour qu'il ne me l'enlève pas tout de suite. Mais deux jours suivant la remise des diplômes, son souffle s'est éteint.

— Merci monsieur.

L'état mélancolique qui m'emporte ne passe pas inaperçu. Je le sais. Mais honnêtement je m'en tape.

Au-Delà Des ApparencesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant