Les pupilles dilatées, la dernière phrase imprimée sur ma rétine, je ne suis plus que souffle coupé. Incapable de respirer, je me concentre sur le petit rire de Clément, sans jamais quitter l'écran des yeux. Mon intuition était bonne. Et le mot Reflet, semble avoir gagner la partie.
Mon entourage est si restreint... que je ne vois qu'une seule personne capable de jouer avec mes nerfs.
L'enfoiré...
D'un geste franc, je referme son ordinateur, sa barbe de bûcheron dans le viseur. Sans crier gare, j'attrape la queue de Mickey.
— Bordel, mais t'es malade ? il grogne tout sourire, avant de tirer à son tour sur ma tignasse sombre.
Assez douloureux, pour lui accorder mon plus beau doigt d'honneur. Sous son ricanement de sale gosse, je croise les doigts pour avoir raison.
— Jamais tu ne m'arrivera à la cheville, Clem'.
Sans un mot de plus, je plonge le nez dans mon gobelet. Avalant difficilement une gorgée de mon nectar, je tente de garder la face.
Reflet et Clément. Ensemble ? Clément n'irait jamais jusque-là...
Une pierre dans la gorge, prudemment mon visage retrouve le sien. Un air innocent sur la tronche, il m'assène le coup de massue.
— Je te promets que je ne suis pas responsable de cette proposition cochonne, Julian. Mais avoue, ça tombe à pic, hein ? Reçu hier soir à 23h51, donc impossible d'en être l'auteur. Tu le sais aussi bien que moi, j'étais bien trop occupé avec la blondinette du bar.
Le cœur en alerte, je sonde ses yeux noirs à la recherche d'un potentiel mensonge. Mais cet enfoiré a toujours été un vrai coffre-fort. Mes blagues n'ayant rien à envier aux siennes, peut-être a-t-il voulu, cette fois-ci, inverser la tendance ?
Histoire que mon froc, termine sa course sur le fil à linge.
— Jenetecroispas, je lâche d'un seul et même tenant, mon regard s'évadant déjà aux quatre coins de la pièce vitrée, donnant sur Central Park.
À première vue, aucune caméra cachée à l'horizon. Mais insuffisant, pour me donner tort. Monté sur ressorts, je file en direction de sa grande plante verte adossée contre le seul pan de mur plein. Trois petits mètres en ligne droite, et je me transforme en tempête. Son brushing impeccable entre mes mains, il n'en reste maintenant plus aucune trace. Sur ma gauche, l'imposante étagère en bois clair encombrée de dossiers, me fait déjà de l'œil. Suffisamment, pour la mettre à sac, à son tour . Toujours pas de petit point rouge. À deux doigts de retourner son espace de travail, Clément m'arrête d'une main ferme posée sur mon torse.
Dans un fou rire à n'en plus finir, il me demande quelques secondes avant de cracher le morceau.
— Je te jure que je n'y suis pour rien, il persiste. Pour être honnête, une fois ton message lu, je n'ai pas pu résister à l'envie soudaine de consulter ma messagerie. On sait jamais, elle aurait pu craquer sur ma belle gueule, aussi !
Le nez pincé entre le pouce et l'index, impossible de ne pas le dézinguer dans la foulée.
— Le jour où une nana se faufilera entre tes cuisses sans mon aide, alors peut-être qu'une telle occasion se présentera à toi, je rétorque fier comme un paon, avant de recevoir son majeur pile à un centimètre de mon pif. Maintenant, reste à savoir dans quel merdier tu viens de me fourrer...
Si l'humour a toujours été ma porte de sortie, cette fois-ci, mes mots sonnent vrais.
Une coïncidence. Je ne vois que ça.
À trop vouloir tout contrôler, mon cerveau finit par me jouer des mauvais tours. Une respiration en entraînant une autre, je le retrouve.
Mon monde.
Où la peur et l'ennui, n'ont pas leur place.
Où je ne suis qu'un volcan, aux éruptions sans fin.
— Le Grand Julian Harper, aurait-il peur de ''fourrer'' sa précieuse queue, dans un minou qu'il n'a pas choisi ? il profite de mon ouverture, pour venir titiller mon caractère de feu.
Les sourcils froncés, je lui assène une tapette à l'arrière de son crâne.
— Jusqu'à présent, aucune chatte n'a encore présenté de dent. Alors ta frousse, tu peux te la carrer où je pense.
Son poing contre la bouche, il étouffe un rire à se pisser dessus. Dans ma bulle, les mains solidement accrochées au plateau du bureau, je passe en revue mon lot de conquêtes. Si nombreuses, que ma tête menace de partir en fumée. Jouer dans la catégorie — Grand romantique — n'a jamais été ma came. J'ai toujours préféré le tir à l'arc. Une fois ma cible atteinte, je passe à la suivante.
À mon grand étonnement, mon 160 de QI semble bien avoir atteint ses limites.
Perdu dans mes âneries, Clément me fait retomber sur Terre en sept mots.
Sept mots, qui ont le don de réveiller ma soif de compétition.
— Alors, cap ou pas cap, mon pote ?
— Ravale-moi ce sourire de vicieux et regarde-moi bien. Il n'y a pas de cap ou pas cap qui tienne. Primo, je sais que je n'ai pas le choix. Secundo, une petite leçon avec fessée ne sera pas de trop pour cette gonzesse. Il n'y a qu'une couronne et pas de chance pour elle, ses épaules ne sont pas assez solides pour en assumer la charge.
Le poing levé face à mon ami de toujours, je signe notre accord.
— Cap de réduire en fumée la confiance de cette nana, je lance ambitieux, son poing s'abattant fermement contre le mien.
— Cap, même si elle a l'âge de Neandertal ?
Un sourcil à la limite de son cuir chevelu, il tente le tout pour le tout dans l'espoir de me voir déstabiliser. Mais soyons honnête, il m'en faut beaucoup plus.
— Je veux bien jouer avec ce phénomène, mais entends-moi bien : Hors de question de poser un seul foutu pied sur son plateau de jeu, sans avoir au préalable une ébauche de ses courbes. Elle a ses règles. J'ai les miennes. Et tout comme cette midinette, elles sont non négociables. La couronne est sur ma tête, mais ça, elle semble déjà l'avoir oublié !
Mon petit doigt entremêlé au sien, je lui promets que ma vengeance sera terrible.
Mais d'abord, occupons-nous de ce petit numéro.
À nous deux ma jolie !
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Au-Delà Des Apparences
Roman d'amourAvocat au caractère bien trempé, Julian ne lésine pas sur les moyens, quand il s'agit de sa carrière. Un pion après l'autre, il se joue des plus grands. Un appétit insatiable, qui ne se cantonne pas aux salles d'audiences. En quête perpétuelle d'...