Au-Delà Des Apparences

JULIAN

Ma tête, ma tête...

Les trois dossiers que je devais traiter ce matin me servent de coussins depuis au moins trois bonnes heures maintenant. Ma joue droite est écrasée sur la petite pile, quant à mes yeux, ils sont rivés sur la petite poubelle qui me fait face.

La gerbe est tenace.

D'accord, je sais. C'est bien fait pour ma gueule.

L'aspirine n'a pas eu l'effet escompté. Bien au contraire. La nausée devient limite supportable mais ce n'est pas pour autant que mon traître de corps se décide à expulser le mal.

Et comme si cela n'était pas suffisant voilà que ce foutu bip strident me bousille les oreilles.

Je maudis le petit con qui a inventé l'interphone !

Mon index presse sauvagement la touche de mon téléphone et la voix aiguë de ma secrétaire s'anime à toute vitesse.

Elle a bu combien de café celle-là ?!

—Monsieur Harper une certaine Meghan demande à vous voir. Puis-je la faire monter ?

Il ne manquait plus que ça. Les images de la veille me sont revenues en boucle et savoir que j'ai en quelque sorte flirté avec elle me donne encore plus envie de m'enfermer loin de tout.

Mais c'est ma femme après tout, non ?

Bordel, vu la tronche que j'ai je ne sais pas comment je vais réussir à lui soutirer un beau ''oui'' pour ce weekend.

— Pas de soucis faites-la monter, c'est une amie.

Une amie que Junior aurait aimé baiser hier soir....

Putain suis-je à ce point dominé par ma queue ?

Il faut que j'appelle Clément ! Un poing dans la tronche, il me faut un poing dans la tronche !

Un léger bruit contre la porte me parvient une petite minute après avoir raccroché et un ''ouai'' à peine audible s'extirpe aussitôt de ma gorge.

Impossible de lever mon melon. J'ai l'impression que ma caboche pèse une tonne.

Cette odeur... de rose, me fait sourire dans le vide. Elle est tout près de moi, je le sens.

—Julian, pourquoi tu n'es pas resté à la maison pour te reposer ?

J'aime qu'elle prenne soin de ne pas parler trop fort, mais je déteste le fait qu'elle me traite comme un bébé chétif.

—J'avais beaucoup de dossiers à traiter ce matin, je marmonne les yeux clos.

Je l'entends souffler, et même défoncé il m'est impossible de ne pas rire.

—Je t'ai apporté de l'aspirine. Tiens, bois ça.

Dans un effort surhumain, je parviens à tourner la tête en sa direction. Lorsque je croise les iris de mon cher petit bonbon, je ravale aussitôt mon rire.

Les vaisseaux de ses pupilles sont rouges et ses cheveux en bataille réunis sur le dessus de son crâne m'indiquent clairement qu'elle n'a pas beaucoup dormi elle aussi.

L'arrière de ma tête trouve rapidement mon fauteuil et cette position semble apaiser mon estomac.

J'avale d'un trait le verre au goût amer en grimaçant et le tends à Meghan pour qu'elle le jette.

—Merci. J'ai l'impression d'être passé sous un camion. Mais je l'ai mérité je le reconnais. Viens ici mon petit bonbon.

Mes pieds poussent sur le sol et les roulettes du fauteuil font le restant du boulot en reculant légèrement du bureau.