Adossé contre le battant de la porte, les yeux clos, je savoure le franc sourire logé sur mes lèvres. Juste une petite seconde, où je réalise que cette fois-ci, le faux semblant n'est pas de la partie. Aussi déstabilisante soit-elle, cette Rachel, me plaît. Beaucoup. Mais pas dans le sens où vous l'entendez. Volcanique à souhait, son côté sans filtre m'en rappelle un autre.
Moi.
Moi, au présent.
Sans ce second souffle, jamais je n'aurai tenu bon.
Jamais, je n'aurai pu... le buter.
Le nez froncé, une forte odeur de tabac à mes côtés, mon combat se trouve là, juste derrière mes paupières closes. Sourire intimidant en place, sur le champ mes yeux retrouvent la lumière.
Numéro1811, Bonsoir !
OU PAS.
En dépit de la pénombre étouffant la vaste pièce toute de pierre vêtue, impossible de passer à côté de l'armoire à glace, pointée à seulement un demi-centimètre de ma tronche. Tel un boomerang, le mot guet-apens revient d'emblée hanter mon crâne. Silencieux, les traits sévères, il ne bouge pas. Une goutte de sueur dévalant ma joue, je me prépare au pire. Malgré trois entraînements de boxe par semaine avec mon pote, ce type est bien trop taillé dans la roche pour réussir à lui faire bouffer la moquette blanche de cette salle. Les poings serrés contre mes cuisses, j'attends le top départ.
Le petit carnet, logé dans la poche arrière de mon jean, aura sa FIN.
La gueule en vrac, ou pas.
— Bonsoir Monsieur, puis-je vous inviter à vous asseoir ? il ouvre le bal d'une voix si suraiguë , que tout mon corps termine au garde-à-vous.
Figé, la situation m'échappe complètement. Alors que "Barracuda" alias Mister T., s'avance en direction d'un immense canapé rose, à cet instant précis, deux options s'offrent à moi : Foutre une baffe à mon imagination débordante, ou pisser de rire. Trop obnubilé par sa gueule de taulard et sa taille hors norme, je ne suis pas descendu plus bas que son visage aux traits anguleux et saillants.
Si seulement, j'avais remarqué qu'il portait... une robe
Les lèvres massacrées par mes dents, je me fais la promesse de ne plus jamais regarder un seul foutu film d'horreur. La pression en chute libre, mes jambes me mènent non sans difficulté vers le sofa à l'allure de plumard. De son côté, Barracuda où — Barracoudette — se laisse glisser vers une table que je reconnaîtrais entre mille.
Les bras étendus de tous leurs longs sur le dossier en velours, mes iris brûlent d'impatience devant l'immense table de poker, mise en valeur par trois luminaires tout en transparences.
Un terrain qui se devait d'être neutre. Il l'était — jusqu'à ce que mes yeux plissés entrent en collision avec un objet un brin prétentieux—. Trois cartes représentant une Dame de cœur, ont été glissé à l'intérieur des cercles de verre, inondés d'une lumière douce. Non sans un sourire en coin, je prends note que cette nana a un ego surdimensionné.
Me provoquer de la sorte, ce n'est pas beau du tout. Me défier à La marelle ou à l'élastique, tu aurais eu toutes tes chances. Mais le joueur de poker invétéré que je suis, va faire sauter ta belle dame de cœur... dans tous les sens du terme.
Pas le temps de placarder dans mon esprit une image bien nette de nos deux corps liés, qu'un léger grincement vient signer avec évidence, le début de la partie. Rêve ou réalité, je crois que mon cerveau vient à l'instant de griller. Elle est là. À seulement deux petits mètres.
Et je suis déjà foutu.
L'arrière de son crâne appuyé contre la porte, ses iris d'un bleu cristallin, limite irréels, embrasent instantanément mes rétines. Immobile, les bras croisés dans le dos, elle me fixe, une lueur de défi inondant son regard. Sérieuse, elle ne laisse transparaître aucune émotion qui pourrait la trahir. Quand de ses dents, elle vient saisir sensuellement sa lippe inférieure maquillée de rouge, je me décompose littéralement. Les pupilles dilatées à l'extrême, je ne suis plus qu'un gigantesque brasier. Si puissant, qu'une énorme éruption volcanique menace Junior.
Seigneur...
Malgré son demi-masque en dentelle noire dissimulant partiellement la partie haute de sa belle bouille, son teint diaphane aux paillettes rousses inondant ses pommettes saillantes, n'en reste pas moins un délicieux spectacle. Ajoutez à cela, une chevelure noire ébène retenue par un ruban rouge, une robe mi-cuisse évasée d'un jaune hypnotisant au décolleté plongeant bleu nuit , et vous obtenez la réincarnation même, de Blanche-Neige.
Une Blanche-Neige revisitée, pour mon plus grand plaisir...
Envoûtante à souhait, son petit mètre soixante — si je supprime les quinze bons centimètres de ses escarpins rouges — finit par me couper le souffle.
Aussi magnifique soit-elle, impossible d'ignorer l'ombre qui s'impose à moi.
Un autre format Pocket, au goût plus amer.
Un Minimoy aux cheveux roses, qui contre toute attente, m'a enfoncé davantage au cœur de l'obscurité.
Un sourire carnassier sur les lèvres, je laisse mon putain de cœur continuer à creuser... sa propre tombe.
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Au-Delà Des Apparences
RomanceAvocat au caractère bien trempé, Julian ne lésine pas sur les moyens, quand il s'agit de sa carrière. Un pion après l'autre, il se joue des plus grands. Un appétit insatiable, qui ne se cantonne pas aux salles d'audiences. En quête perpétuelle d'...