JULIAN

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21h03.

Deux heures et quinze minutes, a errer à travers les rues de mon chez-moi. 

Astoria. Notre Astoria. 

Vivre loin du tumulte de cette foutue Grosse Pomme. Se construire une bulle éloignée de toutes paillettes.  Elever notre future tribu de bébés dans la simplicité la plus totale. Un choix de vie que nous avions fait à deux.

Casquette sur la tronche, j'avance tel un automate. Même les nombreux coups de klaxons ne me sortent pas de ma léthargie. 

Je ne suis pas à un cyclone de force 5 près...

Après un clément silencieux tout le long du trajet retour sur le ferry, un sms s'est invité dans mes pensées.

Le temps file à une vitesse folle, Julian...

Je comprends ou il veut en venir. Mais faire un pas en avant signifie, faire un pas vers l'oublie. D'où mon besoin précieux de solitude, à cet instant précis. Me refaire le film de ma vie. Marquer un temps d'arrêt devant nos endroits préférés. Comme ce petit coffee shop, où nous passions nos weekends à étudier, une tonne de café en guise de stimulant. 

En deux heures, le sourire ne m'a pas quitté. Chacun de mes pas sont rythmés par un son qui ne quittera jamais ma poitrine. Son rire. Le seul et l'unique qui aura toujours sa place auprès de moi.

Une goutte en plein sur le nez, je relève la tête vers le ciel. Le grondement qui éclate tout près de mes tympans n'annonce rien de bon. En dix secondes mon tee-shirt finit trempé.

Avant de me mettre à courir pour trouver un refuge où abriter ma carcasse, une voix que je reconnaitrais entre mille me fait lever la tronche.

— Julian...

Meghan est là. Assise sur les marches de mon immeuble.

Merde, comment j'ai atterri là, sans m'en rendre compte.

Les bras autour de ses jambes nues, une joue sur ses genoux, elle ne bouge pas. Tout comme mon corps. Qui ne veut plus faire un pas de plus. Le déluge de flotte n'a plus aucun effet sur moi. Ses prunelles remportent la partie. La douleur que j'y décèle me coupe le souffle. 

Pourquoi ... elle. 

Mes yeux rivés aux siens, je la laisse venir à moi, l'anxiété palpable à travers ses pas . Sa robe blanche est en communion totale avec sa peau laiteuse. 

Une déesse, sortie tout droit d'Athènes.

Les poings serrés le long du corps, je n'ai qu'une envie. Une putain d'envie, où céder serait l'erreur de trop. 

—Je ne serai pas ton prince, Blanche-Neige. 

Le ton de ma voix est sans équivoque. Des mots qui me rappent la langue. Mais que je me dois de prononcer. Pour le bien de son cœur. 

— Je sais, elle me souffle son front reposant contre le mien. je sais, elle répète un sourire triste naissant sur ses lèvres humides. C'est pour ça qu'il faut que je parte, Julian. je...

— Hors de question bordel, je la coupe furibond ses poignets entre mes doigts. Tu ne peux pas me laisser tout seul. Encore une fois. J'ai besoin de toi pour trouver le bon chemin. Tu es ma boussole. La seule qui ne perd jamais le nord. S'il te plaît ne m'abandonne pas, toi aussi.

Au-Delà Des ApparencesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant