Chapitre 54

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L'aveu inattendu de Jorran avait lâché une littérale bombe dans l'assemblée. Des murmures stupéfaits s'élevèrent parmi le public, tandis que les juges, Cersei et Tyrion dévisageaient chacun le prince avec une expression différente, pour l'instant sans prononcer un mot. Le blond non plus ne parlait plus. Lui et Tywin se fixaient en chiens de faïence.

-Tu as tué Joffrey ? Demanda finalement la Main du Roi, circonspect.

Le jeune malade opina du chef. Il voulait rester impassible, mais l'angoisse lui montait progressivement, en même temps que ses poumons s'alourdissaient toujours plus. Ses doigts étaient tellement crispés sur la barre qu'il commençait légèrement à trembler.

-Je suis le meurtrier.

Oberyn se redressa sur son siège, fronçant les sourcils. Il était plutôt surpris de la tournure que prenait le procès. Qui plus est, quelque chose dans le comportement de Jorran lui laissait penser que quelque chose n'allait pas.

-Pourquoi avoir fait cela, si vous avez refusé le trône ?

Le regard du prince se posa sur le Dornien. Il déglutit avec peine. Beaucoup trop d'émotions étaient en train de le secouer dans tous les sens en cet instant précis, d'autant plus qu'il se sentait s'affaiblir à chaque nouvelle seconde qui passait.

-Je ne pouvais plus supporter le comportement de mon frère. C'était un homme cruel, sadique et dérangé. Qui ne vivait que pour le plaisir de voir la souffrance d'autrui, dont le passe-temps était la torture et l'humiliation. Il marqua un temps de pose, ses bronches lui faisant émettre un râle des plus inquiétants. Cependant, il reprit. Outre le fait d'être un mauvais roi, il n'était rien d'autre que la pire personne qui puisse exister.

Le blond tremblait de plus en plus. Était-ce à cause de la fatigue ? De la colère ? De la situation qui lui faisait battre le cœur toujours plus rapidement ? Ou bien un mélange de toutes ces choses ? Il n'aurait su le dire.

-Comment vous y êtes-vous donc pris ? Demanda Mace Tyrell malgré le choc.

-La vraie question serait ... intervint enfin Tywin, avant que le jeune homme ne puisse répondre, comment de simples querelles fraternelles auraient pu mener à un crime aussi grave qu'est le fratricide ?

Il ne le croyait pas. Il pensait qu'il mentait. Jorran le savait, Jorran l'avait bien vu. Oui. A présent, il était presque certain que la haine était la raison pour laquelle il tremblait comme une feuille.

-Avez-vous seulement vu ce qu'il m'a fait vivre ? Avez-vous seulement été témoin de la façon dont nous avons grandi, lui et moi ? Toutes ces moqueries, ces humiliations qu'il m'a fait subir tout le long de mon existence, ces menaces ? Vous osez appeler cela de "simples querelles fraternelles ?" Depuis que nous sommes en âge de parler, Joffrey m'a toujours soutenu que je mourrai avant lui. C'est ironique, n'est-ce pas ? N'est-ce pas ? Sa voix s'était brisée, lorsqu'il s'était mis, presque à bout de souffle, à lever le ton. Cette rage qui l'animait, elle le rendait presque crédible. Une colère sourde avait pris part de l'entièreté de son corps. Il avait mal. Si mal. Partout. Mais il ne pouvait plus se taire.

Un long silence s'ensuivit du côté des juges, uniquement perturbés par les éternels murmures du public. Tyrion s'était mis à fermer les yeux. Il n'arrivait pas à croire ce dont son neveu était capable pour le tirer d'affaires. Porter le chapeau pour lui sauver la vie. C'était beaucoup trop osé. Le prince savait-il seulement quelles conséquences cela pouvait-il avoir si jamais il arrivait à convaincre l'assemblée ? A quoi rimait tout cela ? Un sacrifice ? Pour lui ? C'en était presque absurde. Lui qui pensait que le jeune blond allait simplement faire tout son possible pour avancer des preuves de son innocence, quitte à en inventer pour lui rajouter crédibilité. Il était en train d'aller trop loin.

The Sick LionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant