Voilà des heures que Cersei veillait son fils. Le soleil commençait à décliner, et Jorran était toujours à moitié inconscient, respirant lourdement, comme si son corps allait abandonner à la prochaine inspiration. Elle restait là, agenouillée à son chevet, lui caressant ses mèches dorées, surveillant plus que contemplant son si beau visage mutilé par les cernes, la pâleur et l'inquiétude.
Elle l'aimait. Elle l'aimait de tout son coeur. Le voir souffrir, le voir torturé par ses propres organes, tout cela était insupportable pour la reine. Combien de fois avait-elle veillé, de cette manière ? Combien d'heures, depuis la naissance de son bébé, de son petit Jo', avait-elle fait glisser ses doigts dans les cheveux de sa chair, attendant qu'il se remette de chaque crise ?
Elle aurait pu mourir pour lui. Elle serait prête à le faire si cela pouvait lui assurer bonne santé. Elle serait capable d'arracher ses propres poumons pour les donner à son cadet, si cela pouvait lui permettre de mener une vie normale. Mais la lionne restait impuissante, et ce depuis des années. Elle baignait dans l'angoisse constante qu'il ne survive pas une année de plus, qu'il s'étouffe dans son sommeil, sans qu'elle puisse le voir, sans qu'elle puisse intervenir. Et plus le temps passait, plus elle remarquait la violence des crises de son fils accrues. Il était trop faible pour ce monde, mais elle ne pouvait rien faire pour y remédier. Et savoir cela la rendait tout simplement folle de rage.
Folle de rage, contre la cruauté des dieux, leur cruauté d'avoir puni sa descendance pour du simple amour. Ses deux aînés étaient maudits pour la simple faute d'aimer quelqu'un ayant partagé le même ventre pendant neuf lunes. Mais également, Cersei était folle de rage contre elle même. Folle de rage de ne pas pouvoir arranger les choses, de n'absolument pas pouvoir agir. Elle ne pouvait débarrasser Jorran de sa maladie, et n'était pas capable de ramener Joffrey à la raison. Tantôt, elle avait bien cru que son fils, l'héritier, avait tué son propre frère. Après cela, il avait été incontrôlable, avait continué de hurler sa colère pendant de longue minutes, si bien que l'incident avait fait le tour du Donjon Rouge en un rien de temps. Pourquoi ? Pourquoi donc Joffrey était-il si imprévisible, si dérangé ?
Par ailleurs, combien de temps avant que les deux plus jeunes, Myrcella, Tommen, combien de temps avant qu'ils ne présentent des problèmes similaires que ceux de ses deux grands garçons ? Tous les deux souffraient déjà, du tempérament de leur aîné, et de l'inquiétude constante découlant de l'état de Jorran.
Cersei fut tirée de ses pensées par la porte de la chambre s'ouvrant et se refermant. Ne bougeant pas, elle attendit simplement que le visiteur ne parle.
-Comment va-t-il ?
Le Régicide était venu prendre des nouvelles du prince cadet. Voyant que Cersei ne lui répondait pas, et continuait de caresser les cheveux de Jorran, il reprit :
-Notre chère Main est venu me parler. Il dit que sa fille Arya est très inquiète. Par ailleurs, savais-tu que ton fils avait décidé de suivre les cours que paye le Stark à sa fille auprès d'un étranger ?
La reine se crispa à l'entente de ce nom.
-Je ne veux plus qu'il fréquente cette peste, Jaime.
Le chevalier soupira.
-Et pourquoi donc ? Ce n'est pas elle qui s'est battue avec lui, que je sache, aussi détestable te semble-t-elle.
-Elle lui pollue l'esprit. Elle lui rempli la tête d'idées absurdes, et il n'a pas besoin de cela.
Oui, il n'avait pas besoin de tout cela. Elle avait déjà tant de mal à lui faire comprendre que son état ne lui permettait pas de faire absolument tout ce qu'il souhait, à lui faire comprendre que si elle lui refusait tant de choses, c'était par inquiétude, par vœux de protection. Depuis longtemps était révolu le temps où Jorran était pleinement son Jorran, bien qu'elle n'arrêterait jamais de se battre pour retrouver ces lointains jours si doux.
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The Sick Lion
FantezieJorran est un jeune garçon de 14 ans, à la santé fragile. Ses poumons malades le clouent au lit, le plongeant dans une fatigue constante, et des douleurs chroniques. Incapable de fournir un effort physique, sa seule façon de se démarquer est son esp...