Chapitre 38

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Nous revenons au bateau une fois le soir tombé. Je n'ai pas osé bouger du reste de l'après-midi de peur de mourir à cause des bêtes sauvages, être écrasée sous un éboulement provoqué par les nombreux tremblements du volcan et aussi parce que la cendre a commencé à nous tomber dessus, obscurcissant le ciel. J'ai même cru que la nuit était tombée. Papa a arrêté d'écrire lors de ce changement soudain de luminosité, semblant inquiet. Il s'est dirigé vers le bord de notre abri de fortune pour scruter les cendres qui formaient déjà une couche d'une dizaine de centimètres sur le sol. Il déchire un bout de son pantalon qu'il pose sur son nez et sa bouche.

« -Nous ne devons pas rester ici. »

Par la suite il trace vers l'embarcation me plantant sur place. Je suis son exemple, me couvrant le nez avec un bout de mon tee-shirt, avant de le suivre du mieux que je peux. Les flocons de cendre, aussi nombreux que les gouttes de pluie lors d'un orage, m'empêchent de voir très loin et je finis par perdre de vue mon père au détour d'un arbre. Heureusement que j'ai un bon sens de l'orientation. Je le retrouve sur le pont du bateau en train de regarder le sol et de shooter dans la couche de poussière volcanique. Je le rejoins aussi vite que je peux, la plupart des prises étant devenues dangereuses. Je me place à ses côtés, il grommelle des choses incompréhensibles jusqu'à dire.

« -Nous allons changer de place. Je navigue, tu balayes le pont. Il ne doit plus rester de cendre. »

Sur ces mots il me laisse pour aller détacher la corde qui rattache le bateau à l'île. Je vais chercher un vieux balai que j'utilise d'habitude pour nettoyer la chambre et le garde-manger puis commence à faire de gros tas que je place dans un sceau avant de le passer par dessus bord. Pendant que je balaye grossièrement le pont, essayant de le nettoyer plus vite que les cendres ne le salissent, mon père manœuvre pour nous éloigner de la côte. Un concert de cris à vous glacer le sang retentit soudain. Pétrifiée, je regarde le volcan assombri par l'ombre de sa fumée. Il semble plus menaçant avec à son sommet une lueur rouge se reflétant sur les nuages. Est-ce de lui que vient ce son ? Papa ne bouge plus lui non plus. Il fixe l'île qui est encore visible grâce au peu de ciel bleu visible derrière le volcan.

« -C'était quoi ce bruit papa ?

-Nous verrons bien. »

Nous restons à bonne distance de Choc-Ott pendant un temps sans ajouter un mot de plus, puis nous revenons nous plaçant cette fois-ci dans un renfoncement creusé dans la côte suffisamment large pour que l'embarcation puisse s'y abriter. La mer est plus calme ici. Les vagues sont petites. Je continue mon travail en demandant.

« -Pour quelle raison faut-il retirer la cendre ?

-Parce que les cendres sont en réalité des bouts de roche. Si trop de ces bouts sont agglutinés ensemble cela pèse lourd et peu faire s'écrouler des maisons par exemple.

-C'est pas dangereux alors d'être sous des rochers ?

-Les rochers peuvent supporter des tonnes. Il faudrait une éruption pour que ça s'écroule. Je vais voir ce qu'il y a aux alentours. Finis de nettoyer tout ça et vas préparer à manger. N'oublie pas le nid de pie et le toit de la cabine de la barre. »

Il s'éloigne. Je m'échine à retirer tout le gris que je trouve pendant quelques heures avant d'aller faire chauffer une boîte de flageolets sur la gazinière. Une fois le repas prêt, je le laisse au chaud dans la casserole et attends que mon père arrive. Je n'ai pas le droit de manger sans lui. Il finit par revenir un peu plus tard et sépare la nourriture en deux parties : une grosse pour lui et une petite pour moi. Nous mangeons en silence jusqu'à ce qu'il prenne la parole.

« -Dis moi Gdamynee, que penses-tu de cette île ?

-Elle fait peur... »

Il me regarde sans rien dire. Ça n'annonce jamais rien de bon... Il finit par m'interroger doucement.

One Piece : La Huitième Grand CorsaireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant