Chapitre 41

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Les jours se suivent et se ressemblent. La routine s'est installée depuis que je suis livrée à moi-même. Non pas que papa n'est plus présent mais il l'est moins qu'avant, passant le plus clair de son temps à explorer de plus en plus loin, pouvant mettre des jours pour revenir. Je dois toujours faire attention à ce qu'il y ait ce qu'il faut dans la grotte, que ce soit à manger, à boire, du feu ou autre. Comme il n'y a très peu de choses comestibles dans les montagnes je suis obligée de descendre dans la forêt à quelques heures de marche de là pour chasser. Ces allers-retours m'ont peu à peu fait gagner en muscle et en endurance. Escalader la montagne reste pénible pourtant je le fais plus vite qu'avant. Je suis aussi devenue une tireuse à l'arc correcte, de nombreux cochons sont morts avec une seule de mes flèches en bois.

En ce moment je cherche des noix sous une pluie de cendres. La seconde depuis que nous sommes arrivés sur l'île. Elle m'a surprise car quand je suis partie tout était normal. Ce n'est qu'en quelques minutes que le vent a changé de direction pour envoyer les cendres vers la forêt et peut-être même la grotte. J'ai hésité à rebrousser chemin mais je ne l'ai pas fait pour éviter que papa ne me frappe. J'ai juste mis un tissu sur mon nez et balaye la couche grise déjà tombée pour trouver les arbustes presque totalement recouverts. Soudain de nombreux hurlements se font entendre. Sur le coup je me fige, effrayée. Ce concert de sons me rappelle ceux que nous avons entendus la première fois sur l'île. Depuis nous ne l'avons plus jamais entendu, j'ai fini par pensé que c'était le fruit de mon imagination mais sûrement pas. Je reste immobile un moment avant de me remettre au travail. La journée est déjà bien entamée, je ne peux pas me permettre d'être paralysée par la peur.

« -Allez. Je dois en trouver plus. »

Quelques heures plus tard je me retrouve interdite face à des sapins dont certaines branches sont recouvertes de fleurs et de fruits. Des fruits. Choses que nous n'avons jamais vues tout au long de notre route. J'en cueille un qui se trouve être un fruit à coque de la taille d'une nectarine de couleur marron. Je ne sais pas si c'est mangeable, autant en ramener quelques-uns pour vérifier. J'essaye d'en prendre un autre mais ma petite taille m'empêche d'attraper les plus grosse.

Alors que je suis sur la pointe des pieds les bras tendus je sens une immense douleur me traverser le flanc gauche. Un cri se bloque dans ma gorge lorsque je suis soulevée dans les airs et pendue par l'endroit qui me fait souffrir. Je lève difficilement la tête pour voir une grosse bête noire avec six yeux rouges me tenant deux mètres au-dessus du sol par la gueule, ses longs crocs blancs recouverts de sang et de bave qui dégoulinent au sol en de longs filets bordeaux. Les larmes me montent aux yeux, la peur me tétanise. La douleur me fait me contracter ce qui ne semble pas plaire au monstre qui grogne en enfonçant un peu plus ses crocs dans ma chair. Je gémis puis cesse de bouger sous le choc. Une fois que la bête est sûre de mon calme elle se met à courir vers les montages en empruntant un autre chemin que moi. J'ai l'impression que cela fait une éternité que je suis ballottée dans sa gueule, perdant mon sang un peu plus chaque seconde à cause des secousses qui ouvrent un peu plus la plaie au fur et à mesure. Les seules choses que j'arrive à distinguer dans mon monde de douleur et de fatigue sont d'autres formes noires qui se rapprochent de nous ou s'éloignent, ça dépend, et le soleil. Pourtant le vent n'a pas tourné... Ce fut ma dernière pensée cohérente avant de sombrer dans un cauchemar peuplé de monstre à six yeux.

Mon réveil se fait dans une explosion de douleur, le monstre vient de me lâcher au sol. J'ouvre faiblement les yeux pour constater que je suis dans une grotte envahie de limaces, éclairée par le soleil. Ce qui me permet de distinguer une pile de cadavres de cochons d'arbres et de moinzeau fraîchement mort à ma droite avec des centaines de vers fluorescents dessus, un peu partout des os tapissant le sol et en face de moi la bête qui fait presque cinq fois ma taille qui se tourne vers la pile sanguinolente en glapissant. Le tas de cadavres se met aussitôt en mouvement et en sort quatre petites boules noires recouvertes de sang qui font presque ma taille. Ces monstres ressemblent à des loups mais en plus grand et terrifiant. J'essaye de bouger mais mes membres sont lourds, je regarde la source de la douleur pour remarquer que mes vêtements sont déchirés et imbibés de sang. Sur mon bas-ventre côté gauche se trouve une large plaie en forme de demi-cercle où il est possible de distinguer les marques de crocs. La même blessure doit apparaître dans mon dos. Un chouinement près de mon oreille me fait sursauter et je vois l'un des petits me regarder en se léchant les babines, la bave dégoulinant sur le sol en pierre de la grotte. La peur s'empare à nouveau de moi. Papa m'a raconté que les animaux qui mangent de la viande chassent leurs proies pour la ramener à leurs enfants, parfois ils les laissent vivantes pour que les bébés puissent apprendre à tuer. Cela risque d'arriver... Cela va m'arriver... Cette constatation fait naître des émotions que je n'arrive pas à reconnaître, mes larmes coulent, je pense à maman, à mes amis. Je veux les revoir...

One Piece : La Huitième Grand CorsaireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant