L'un d'eux était resté toute la journée. J'avais, pourtant, bien vérifié par la fenêtre si la voie était libre. Ils n'étaient pas là. Le type, aux cheveux noirs et bouclés, s'avançait vers moi. Je reculais d'un pas, puis de deux, avant que mon dos ne percute une masse solide. Je me retournais et tombais sur le deuxième. Ils m'avaient piégé de la pire des manières. Le gars, aux cheveux en brosse, m'immobilisa en s'emparant de mes deux bras, pendant que l'autre montait sur le trottoir pour nous rejoindre. Mon enfoiré de père aura eu ce qu'il voulait. Je pouvais aisément l'imaginer jubiler. La colère s'empara de moi. Je commençais à gesticuler pour me libérer mais je savais que cela était en vain. Ils devaient peser trois fois plus lourds que moi. La poigne du connard, à l'allure militaire, était bien trop forte.
Je voyais bien que les gens observaient la scène sans oser s'en mêler. Je comprenais qu'ils n'en fassent rien. Les deux hommes étaient armés et ne s'en cachaient pas.
- Tu nous as faits galérés mais c'est fini, annonça le surfer, d'un air menaçant.
- Une vraie petite anguille, susurra l'autre à mon oreille.
Je lui mis coup de pied pour l'écarter de mon visage. Ils me dégoûtaient.
- Tu vas nous suivre, maintenant. Et pas de tour de passe-passe, compris ?
Par la haine, je me débattis et cracher à la gueule du surfer. Il eut un moment de choc, qui m'apporta une joie malsaine. Il s'essuya le visage en me regardant avec hostilité. Dans un mouvement rapide, il me gifla si fort que j'en perdis l'ouïe durant quelques secondes. Tout s'enchaîna à ce moment-là.
Le surfer tomba au sol, le nez en sang. Les mains qui me retenaient, me libérèrent. Lorsque je me retournais, lui aussi était en sol. Les sourcils froncés, je zieutais l'homme, aussi massif que les deux gorilles, aux poings fermés, se tenait près de moi, l'air coléreux.
- Vous n'avez rien ? S'inquiéta-t-il.
Méfiante, je me contentais de secouer la tête, pour lui assurer que j'allais bien. Il m'attrapa la main et me tira à sa suite alors qu'il quittait la rue rapidement. Trop hébéter, je le laissai m'entraîner quelques rues plus loin. Je devais fuir, quitter la ville, maintenait que j'avais, une nouvelle fois, échappé à la vigilance de mon père. Je contraignais l'homme à me lâcher la main.
- Je ne vais pas vous faire de mal.
Il m'observait intensément, ce qui me mit mal à l'aise.
- Je dois y aller, commençais-je à m'éloigner.
- C'est risquer de rester seule. Vous ne voulez pas que je vous emmène au commissariat le plus proche. Il faut que vous portiez plainte. Ils doivent être arrêtés.
Sa prévention me permit de me détendre. Malgré tout, je secouais la tête, à nouveau, avec énergie.
- Tout va bien. C'est inutile. Merci d'être intervenu mais il faut vraiment que j'y aille.
Une main apparut sur mon visage et l'odeur du chloroforme envahit mes narines. Les yeux écarquillés, je levais les yeux sur l'homme, face à moi, dans l'espoir qu'il réitère sa protection mais mon espoir disparu lorsque je vis le sourire en coin qui naquit sur ses lèvres. Il était de mèche et je m'étais laissé berné par « l'héroïsme » de l'homme. Mes yeux se plissèrent de colère avant que l'obscurité m'engloutisse.
J'ouvris les yeux difficilement. Un marteau-piqueur me vrillait le crâne. Je sentis du mouvement. Où étais-je ?
La panique s'empara de moi lorsque je constatais que je me trouvais dans un avion. Que faisais-je dans un avion ?
Je me redressais, doucement. La terre semblait bouger dans tous les sens. Je m'asseyais au bord du lit, sur lequel je reposais, plus tôt. Le crâne reposant dans les mains, je tentais de réfléchir à ce qui s'était passé. Le type qui m'avait sauvé des deux gorilles m'avait tendu un piège. L'enfoiré avait joué au héros pour mieux me la mettre à l'envers. Travaillaient-ils ensemble ?
Lorsque la terre cessa de tourner devant mes yeux, je me levais lentement pour m'assurer que je n'allais pas tomber dans les pommes. J'observai la cabine. Elle transpirait le luxe. Un luxe pourri que j'exécrais.
Je n'avais aucune échappatoire dans le ciel. J'étais véritablement coincée, sans recours. Du moins, pour le moment. Lorsque nous atterririons à Los Angeles, j'aurais des opportunités qui s'ouvriront à moi.
Je scrutais la porte, hésitant à tenter de la franchir. Était-elle ouverte ?
Je ne voyais pas pourquoi ils m'enfermeraient aussi haut de la terre ferme. Ils n'avaient rien à craindre. Aucune possibilité. Cependant, je n'étais pas sûre de vouloir faire face à ces connards.
Huit ans. Huit ans que j'aurais eu de liberté, loin de son monde dégueulasse. Je le haïssais profondément. J'espérais pour lui qu'il ne s'attendait pas à ce que je lui tombe dans les bras. Il avait beau être mon père, il n'en demeurait pas moins, qu'il me donnait envie de gerber.
La porte s'ouvrit brutalement sur celui qui semblait mener le jeu.
- Tu nous auras fait courir.
Sa voix était sombre, puissante. Si je n'avais pas grandi dans ce monde, j'en aurais certainement eu peur mais cela n'était pas le cas. Il pouvait aller se faire foutre !
- Il te paye combien ? Demandais-je, gravement. Combien tu touches pour être son larbin ?
Il haussa un sourcil, l'air amusé.
- Ainsi, j'avais raison. Je ne suis pas le seul qui te cours après.
- De quoi tu parles ? Questionnais-je avant que la lumière se fasse dans mon esprit.
Il était vrai que mon père n'était pas le seul à me rechercher. Je m'en étais si peut soucier, après mon départ de Calhoun, que je n'avais pas pensé à ces bandits qui allaient tuer un homme.
- Tu bosses pour qui ? Ne m'étendis-je pas.
- Je travaille pour personne, jeune fille.
- Qui tu es ?
Il souriait, à nouveau, en coin. Je sentais que j'allais détester ce sourire.
- Dis-moi ! Exigeais-je entre mes dents.
- Tu le saurais bien assez tôt...
- Tu m'emmènes où ? À L.A ?
Son sourire s'accentua.
- Joue pas au mec mystérieux avec moi. Tu as l'air d'un abruti à sourire comme ça. Parle !
Enfin, il effaça cet air stupide. Il s'approcha brutalement vers moi et me prit à la gorge.
- Fait attention aux mots qui sortent de ta bouche... tu pourrais le regretter...
Dans une insurrection, je levais mon majeur devant son visage. Il me relâcha brusquement, me faisant tomber sur le lit de tout mon long avant de quitter la pièce.
Ce fut à mon tour d'afficher un sourire en coin... car je venais de comprendre quelque chose d'essentiel... il ne voulait pas me tuer... du moins, pas tout de suite...
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Dance in the flames
RomanceLake était une jeune femme rebelle et tenace. Fuyant un passé insipide et froid, elle vivait au gré de ses envies et du chemin qui s'ouvrait devant elle. Solitaire, marginale, elle vagabondait de ville en ville de façon aléatoire jusqu'à voir ce qu'...