Dès l'instant où elle avait décroché le GPS de son socle pour entrer l'adresse de l'endroit elle voulait se rendre, j'avais su notre destination. Cela m'avait contrarié mais je n'avais fait aucun commentaire. Je lui en avais déjà beaucoup demander en si peu de temps. Je ne voulais pas la braquer plus que cela.
Nous n'étions plus très loin de ce fameux lieu. Je ne comprenais pas pourquoi elle ressentait le besoin de s'y rendre, mais là, encore une fois, je me tus. Plus nous approchions, plus elle semblait nerveuse. Elle ne cessait d'avoir la bougeotte. Habituellement stoïque, il n'était pas difficile de deviner son agitation. Cela posait plus de questions.
Aimait-elle se torturer ?
Peu de temps plus tard, je garais la voiture dans l'allée. La villa était comme dans mes souvenirs. Clinquante et ostentatoire avec ses façades en verre teintés. L'allée était bordée par des parterres de fleurs rouges conduisant à la porte d'entrée. La villa était grande, trop grande. Je me tournais vers Lake qui semblait hypnotiser par ce spectacle.
— Tu es sûre de toi, Lake ?
Elle hocha la tête sans quitter la maison des yeux. Ceux-ci étaient secs et durs.
— Parfaitement sûre ! Tu m'as enlevé la joie de pouvoir enterrer Omarosa de manière ignoble alors je vais m'occuper de son bijou. Cette maison était son trésor... système de sécurité à la pointe. Pièces secrètes dernier cri. Salle de contrôle coûteux. Bunker luxueux. C'était son premier achat lorsque les affaires ont commencé à bien marcher pour lui, enfant des quartiers pauvres Philadelphie. Il n'en était pas peu fier. Je veux juste la voir une dernière fois avant d'appeler une entreprise de démolition.
Jusqu'ici, je n'avais ressenti de la fierté que pour mon père et ma personne. Cependant, en la regardant fixer cette maison avec une haine non dissimuler, je me sentais fier de sa force. Lake était une femme majestueuse et puissante. S'en rendait-elle, au moins, compte ?
Lorsqu'elle entreprit de sortir du véhicule, je la suivis de près. Observer la maison de l'extérieur était une chose. Cela en serait, peut-être, différent à l'intérieur. Je ne savais pas où cela s'était passé mais si je pouvais lui éviter ce moment, je le ferais.
Les banderoles de la police entouraient une partie du jardin et clôturaient la porte. Elle ne s'embarrassa pas de cette barrière et tira dessus. Elle se pencha pour relever une petite trappe. À l'intérieur, il y avait un petit bouton. Elle appuya dessus et une nouvelle trappe s'activa. Elle y fourra la main et en sortit une clé. Elle leva la clé devant son visage en me regardant.
— Il était paranoïaque, expliqua-t-elle en haussant les épaules.
Je ne fis aucune remarque. Chacun avait ses petits travers. S'il lui fallait cela pour se sentir en sécurité, je ne m'étonnais plus de la facilité que nous avions eu Esteban et moi à entrer sur sa propriété.
Elle ouvrit la porte en grand mais ne bougea pas durant quelques secondes.
— C'est la première fois que je remets les pieds ici, depuis mes seize ans.
— Tout va bien.
Elle se tourna vers moi, un demi-sourire aux lèvres.
— Je vais très bien. Un certain mafieux m'a débarrassé de lui, allégea-t-elle l'atmosphère.
— Tout le plaisir était pour moi, plaisantais-je à mon tour.
Elle eut un rire rauque avant de pénétrer dans les lieux. Elle levait les yeux comme pour enregistrer tout ce qui composait la demeure de son enfance. J'en fis de même. Je n'avais pas vraiment pris le temps d'observer l'endroit lors de mes deux visites. La maison était aussi grande qu'elle en avait l'air. Tout en baies vitrées, elle donnait une vue périphérique à trois cent soixante degrés. Lake aurait pu la vendre à plusieurs millions de dollars mais de toute évidence, l'argent n'était pas sa priorité.
Après avoir jeté un coup d'œil au rez-de-chaussée, elle se tourna vers moi.
— Où ?
Je pointais du doigt la salle à manger, près de la cuisine. Elle se dirigea vers la pièce indiquée et s'arrêta à la porte.
— Il a souffert ? Me questionna-t-elle.
— Il n'a pas eu le temps pour ça. Chose que j'ai regretté par la suite.
Elle hocha de la tête, le regard perdu sur la pièce avant de faire demi-tour et quitter l'entrée pour grimper les étages. Elle traversa à toute vitesse les couloirs pour s'arrêter devant une porte fermée. Elle avança la main pour ouvrir mais je l'arrêtais avant.
— Quelle est cette pièce ?
— Ma chambre.
— Est-ce que c'est là ?
Elle secoua la tête en signe de négation. Aussi, je la relâchais et la laissais continuer son exploration. Elle entra à pas feutrés, tournant la tête de gauche à droite. La chambre était très coloré où la prédominance était le rose. Cela me laissait perplexe, connaissant la femme à qui appartenait, jadis, cette chambre. Elle possédait un immense lit à baldaquin où des voiles blancs et roses voletaient au gré de la brise océanique. Lake s'en approcha et tâta le matelas.
— C'est ici que j'ai vécu les meilleurs moments de ma vie... avec Lorna. Il me la prise et maintenant, je n'arrive plus à nouer de lien avec elle. J'ai trop changé...
— Tu es plus forte !
Elle acquiesça.
— C'est vrai.
Ainsi, j'apprenais qu'elle ne se sentait plus aussi à l'aise avec sa nounou. Cela était d'autant plus bénéfique qu'elle doive les quitter, à nouveau.
Après une dizaine de minutes à tout toucher, elle me passa, enfin, devant, sans m'attendre pour aller vers un nouvel escalier, l'air décidé. Je la suivis à la trace jusqu'à une porte en bois. Un boîtier numérique était disposé près de celle-ci. Lake tapa un code et se précipita à l'intérieur avant que je n'ai pu m'assurer que cela était sûr pour elle.
Elle s'arrêta, subitement, si bien que je lui fonçais presque dedans. Elle tira son bras en arrière pour atteindre un interrupteur. Ses épaules s'affaissèrent lorsque les ampoules se mirent à grésiller et je savais... je savais que c'était ici...
— C'est dans ce grenier que toute ma vie à basculer...
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Dance in the flames
RomansLake était une jeune femme rebelle et tenace. Fuyant un passé insipide et froid, elle vivait au gré de ses envies et du chemin qui s'ouvrait devant elle. Solitaire, marginale, elle vagabondait de ville en ville de façon aléatoire jusqu'à voir ce qu'...