chapitre 37

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Pénélope se détache d'Enée avec un regard porté vers nulle part et partout à la fois semblable à ceux qu'ont les personnes qui se relèvent d'un rêve. Aussitôt, les yeux d'Enée se remplissent de songes. Elle incline timidement la tête sur le côté pour détourner son regard de la princesse. Leurs mains se détachent, puis Enée se retourne avec une pesante légèreté pour reprendre sa place auprès des autres héritières.

On a failli attendre.

Jehona avait la mauvaise habitude d'écrire comme s'il s'agissait de son journal. Harper lui reprochait depuis le moment où elles avaient commencé à travailler ensemble quelques années auparavant. Heureusement, elles mettaient leurs notes en commun tout en coupant les pensées de la chanteuse avant de rendre le document officiel.

Le feu de camps brûlait, les couvertures étaient alignées autour. L'atmosphère était tendue car personne ne savait vraiment comment réagir. Les héritières parlaient peu, conscientes qu'elles venaient de découvrir ce qui pouvait les attendre lors des prochaines épreuves. Mais ce fut surtout la fatigue et la pression qui flottaient entre tous.

Enée considérait Pénélope entre deux pensées. Elle était certaine que le temple exerçait une emprise envoutante. Mais peu importait, elle était en train de déguster ce que les élèves avaient chassé pendant qu'ils attendaient. Elle ne s'était pas rendu compte à quel point elle avait faim jusqu'à ce qu'elle sente l'odeur de la viande en train de griller.

La nuit était plus calme au milieu de cette étendue d'herbe qu'en pleine forêt.

C'était aussi plus facile de s'endormir.

A l'aube, les voyageurs reprirent leurs affaires et la route pour descendre du premier sommet jusqu'au village. L'humidité avait imprégné les habits et les cheveux d'Enée. Elle se sentait recouverte d'une couche de saleté. Belladonna tentait de cacher la misère sous sa cape qu'elle avait noué au niveau de son coup, ne laissant échapper que quelques mèches blondes qui avaient fini par perdre leurs ressorts.

Le chemin s'étirait, rétrécissant et s'épaississant au rythme des sillons et des plaines. La fraicheur du matin était une aubaine pour avancer le plus possible avant que la chaleur ne transforme les perles de rosées en perles de sueurs.

C'était plus agréable sur une fleur que sur l'arrête d'un nez.

Le cliquetis des sabots nuançait le silence.

En face, une silhouette avançant dans leur direction sembla mettre un terme à l'infini.

Tous s'arrêtèrent à bonne distance.

─ Qui êtes-vous ? s'écria Pénélope.

La silhouette marqua une pause en pressant ses paumes contre ses genoux, penché vers l'avant.

─ Je suis votre messager, je viens de Sian.

─ Approchez, ordonna Belladonna.

Son visage était anguleux et ses muscles saillants sous sa chemise de lin qui séparait sa peau d'une armure aux couleurs d'Antasion. Ses cheveux bruns bataillaient sur son front.

─ C'est bien un messager, confirma Enée.

Ici, ils portaient une armure pour être confondus avec des guerriers afin de ne pas être attaqués en possession d'une information confidentielle.

─ Que voulez-vous ? continua Pénélope.

─ Je viens vous guider jusqu'à la meilleure auberge de Sian. C'est le maire qui m'envoie pour vous éviter de passer par les rues fréquentées. Ainsi, vous pourrez vous reposer avant de vous présenter aux festivités car tout le monde vous attend.

Le trône des héritièresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant