Après avoir lu tout le contrat, je suis surprise par ce que je viens de lire, ou plutôt de ne pas lire. Il doit y avoir anguille sous roche, c'est évident. Je ferme les yeux et réfléchis pendant quelques minutes. Comment vais-je pouvoir lui poser les questions qui me viennent à l'esprit ? J'ai déjà fait des efforts monstres en lui parlant, mais heureusement, il ne m'a pas posé plus de questions sur ce que j'ai pu vivre. Je crois que j'aurais encore pu avoir une crise de panique, et que je me serais vraiment renfermée.
Je me rends finalement jusqu'à son bureau en quatrième vitesse, les papiers en main et j'entre puisque sa porte était grande ouverte. Il me détaille de son regard bleuté pendant un instant et me désigne le fauteuil pour que je reprenne place.
-Tu as tout lu ? M'interroge-t-il en sirotant tranquillement son verre d'alcool.
Je hoche positivement la tête et il pose ses feuilles sur sa table basse.
-Est-ce que tu es d'accord avec ce qui apparaît ou tu veux rediscuter de quelque chose ?
-Eum... Pour ce qui apparaît, c'est bon, mais...
-Mais quoi ?
Je commence à bafouiller en cherchant mes mots et soupire en prenant ma tête entre mes mains. C'est beaucoup plus difficile à formuler que ce que je pensais, surtout vis-à-vis de ce que j'ai vécu.
Sans prononcer un mot, il se lève de son siège et je me crispe lorsqu'il passe à côté de moi. Je relâche tout l'air que je gardais dans mes poumons quand je vois qu'il va jusqu'à son bureau. Il saisit quelques feuilles ainsi qu'un stylo et me les tend. Je lève un sourcil d'interrogation en ne comprenant pas son intention et il m'explique alors.
-Si tu as du mal à me poser la question à haute voix, tu peux me l'écrire, si c'est plus simple pour toi.
Ma bouche s'ouvre légèrement sous la surprise lorsque je comprends qu'il cherche une nouvelle fois une alternative à mes problèmes. Je crois qu'il me comprend mieux qu'il n'y paraît, et ça m'étonne sincèrement, tout comme ça me fait très plaisir.
Je saisis ce qu'il me tend d'une main tremblante et griffonne sur le papier quelques mots, mes joues commençant déjà à chauffer.
"Il n'y a rien d'écrit sur les relations..."
Je lui tend la feuille en détournant le regard et il reste silencieux pendant un instant.
-Tu veux dire la relation qu'on doit avoir tous les deux ? Bien évidemment, on ne va pas se détester tous les deux, on doit montrer une relation de confiance devant les autres, ou de complicité, ce qui serait encore mieux.
Je fronce les sourcils en voyant qu'il n'a pas vraiment compris le sens de ma question et reprend la feuille pour ajouter un unique mot après mes points de suspension : "sexuelles".
Je lui rend en glissant dans le fond de mon siège et il reste bouche bée pendant plusieurs minutes. Pourquoi il a ce genre de réaction ?
-Tu... Hésite-t-il. Tu crois que mon but est de t'imposer des relations sexuelles ?
-Je... C'est qu'on nous a appris à... Enfin voilà, c'est ce qu'on nous a appris.
-Bordel, non. C'est hors de question. Je ne t'imposerai jamais ça, tu n'as rien à craindre. Après, si l'envie te prend, tu sais où j'habite et où est ma chambre.
Je relève les yeux vers lui en ouvrant légèrement la bouche et il éclate de rire. Je lâche un rire gêné, mais son regard intense me fait comprendre la sincérité de ses paroles. Je ne sais pas si je dois me focaliser sur le fait qu'il ne m'obligera pas et me laisse le choix, ou sur le fait qu'il ne serait pas contre si je suis d'accord.
Si l'envie me prend... Ça fait bien longtemps qu'on ne m'a pas demandé si j'étais d'accord pour quoi que ce soit. Ça me fait bizarre, mais ça me fait aussi très plaisir. Le problème, c'est que même si je le voulais, je ne pourrais pas. Mes démons me rattraperont toujours, ils ont ruiné ma vie et c'est impossible de me reconstruire après ça. Je ne vis plus, je survis depuis des années.
-Plus sérieusement, je n'attend rien de toi si ce n'est ce qui est écrit dans le contrat. Je veux juste que tu m'accompagnes dans la haute société et je ne te forcerai à rien si tu ne veux pas ce que je peux également te proposer.
-Comme... Comme quoi ?
-On verra plus tard, mais je suis sûr que tu pourras m'aider lorsque tu voudras faire autre chose que rester enfermée dans ta chambre. Tu as d'autres questions ?
-La durée du contrat.
-Un an, c'est écrit.
Un nœud se forme dans ma gorge lorsque je pense à ce qui m'arrivera d'ici l'année prochaine.
-Qu'est-ce que... Qu'est-ce que je deviendrai après la fin du contrat ?
-Je pense qu'il vaut mieux laisser du temps à ce qui peut arriver demain. Voyons comment se passe cette année et on décidera tous les deux si on renouvelle le contrat ou si on part chacun de notre côté. Si tu décides de partir, je te rendrai ta liberté et tu ne seras plus ma protégée aux yeux de l'Italie. D'autres questions ?
Je réfléchis un instant, mais il a répondu à tout ce que je me demandais. Je secoue négativement la tête en regardant fixement le contrat.
-Maintenant que tu connais toutes les conditions, je te laisse prendre la décision de signer ce papier ou de le déchirer.
Je reprends les feuilles et m'attarde sur le titre "Contrat de protection." C'est vraiment ce que je recherche, mais j'ai terriblement peur d'être déçue, comme toujours... Je ne sais pas ce qui est le mieux pour mon bien.
D'un côté, j'ai peur que sous cette façade d'homme compréhensif se cache un véritable tyran, comme ils l'étaient tous, mais d'un autre côté, j'ai l'impression que personne ne m'a jamais autant écouté et compris. À déjà deux reprises, il a su m'écouter et agir en conséquence : la première fois avec mon lit, la deuxième fois avec le papier. Il a compris que je ne me sentais pas en sécurité et que j'avais du mal à parler de mon vécu, et il a trouvé des moyens pour m'aider.
J'aimerais pouvoir réaccorder ma confiance un jour, mais je sais que ce n'est pas possible. Malheureusement, j'ai été trop naïve et je ne veux pas refaire les mêmes erreurs, pour rien au monde. Je ne pense pas pouvoir aller mieux un jour parce que tout ce que j'ai vécu est ancré dans mon esprit, dans chaque parcelle de mon corps et mon cœur saigne chaque jour. Je ne pensais pas que je vivrais de telles choses en décidant de quitter la maison à dix-huit ans, et je regrette énormément.
Est-ce que je vais enfin savoir me relever et aller de l'avant ? Je voulais un nouveau départ, une chance de devenir une nouvelle personne et j'ai enfin la possibilité de le devenir, mais cela arrive trop tard. Phoenix aurait dû arriver avant...
Comme dit le proverbe "Mieux vaut tard que jamais". Alors je signe ces papiers, ainsi que le second exemplaire dans le silence.
-Ça va ? Se renseigne-t-il en me voyant muette et neutre.
-Je sais pas...
Comme un fantôme, je me relève du siège et me rend jusqu'à ma chambre qui me paraît bien loin. Je retourne dans mon lit et laisse couler les larmes. Faîtes que cette signature atteste un nouveau départ...
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Protected by the devil
RomanceDans la haute société italienne réside un comité prestigieux : celui des protecteurs. Ces hommes riches achètent la protection de jeunes femmes qui ont tout pour plaire. Elles sont jeunes, belles, intelligentes et sûres d'elles. Enfin... C'est ce de...