Chapitre 13 - Lya -

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 Mes yeux sont fixés sur la nuque de celui qui se dit mon mari. Il drague la réceptionniste sous mon nez et mon envie de le tuer grandit. Lorsqu'il contourne le bureau et qu'il se positionne devant la jeune femme, je vois rouge. Ma respiration s'accélère et mon cœur se brise.

Il ne va pas oser me faire ça !

Les mains de la réceptionniste se posent sur les épaules de Kaden et je suis certaine qu'elle a enroulé ses jambes autour de sa taille. Rien qu'en voyant ce spectacle, j'ai envie de vomir.

Après il essaie de me faire croire qu'il m'a été fidèle ! Mon cul !

J'ai failli le croire, je ne suis pas passée loin de me jeter à nouveau dans ses bras. Et le pire, c'est que malgré sa trahison, j'aurai pu accepter.

Tu tournes vraiment pas rond, ma pauvre fille ! Il faudrait songer à voir un psy !

— Allons-y, déclaré-je en fermant la porte.

Yuri fait un signe de main, puis nous nous engageons dans la circulation. Laissant les bains nordiques de plus en plus loin. Nous parcourons la ville jusqu'à arriver dans un quartier que je connaîs bien puisque j'y ai grandi. Mon père et mon oncle m'y ont élevé. À cette pensée, mon cœur se serre. Les deux hommes qui ont partagé ma vie n'étaient que des menteurs...

Je sens les larmes monter entre eux et Kaden, je ne suis pas certaine de parvenir à rester debout. Je n'ai jamais été forte, enfin jamais comme je l'aurais souhaité. J'aurai adoré être de ses femmes badass, mais ce n'est pas dans mon tempérament. Soigner une plaie, aider au bloc, prendre soin de mes patients, oui sans soucis. Me battre, sourire face à la mort, lutter jusqu'au bout, non. Bien entendu, j'ai un instinct de conservation, mais je ne suis pas de celles qui se vengent. Certes je m'en suis sortie lorsqu'ils s'en sont pris à moi dans cette ruelle, la seule chose à laquelle je pensais c'était : « S'ils me violent, je ne me relèverai jamais ! Je dois me défendre, je préfère qu'ils me tuent plutôt que leur facilité la tâche ! »

Je sais ce qui va se dérouler dans les prochains jours. Je vais accuser le coup de tout ce que j'ai appris. Mon esprit va chercher tout ce que j'ai pu louper depuis que je suis venue au monde. Mon cerveau et mon cœur vont entrer en collision encore, encore et encore et je n'ai aucune idée du quel des deux gagnera.

La réalité me rattrape lorsque je vois le portail en fer forgé de ma famille s'ouvrir, le « S » gravé est assez distinctif. Je me redresse dans la voiture quand nous approchons du manoir. Rien n'a bougé, il est tel que dans mon souvenir.

Sa façade est typique des années deux milles, elle est élégante et discrète. Ce n'est pas une demeure « bling-bling ». Mon père disait que les immenses baies vitrées avaient tapées dans l'œil de ma mère. Il n'avait pu faire autrement que de lui offrir ce qu'elle désirait.

Savait-elle qui il était ?

La propriété est entourée d'un mur de près de trois mètres de haut. Je pensais que c'était pour éviter les intrusions et cambriolages, mais maintenant je vois sa véritable utilité. Il empêche quiconque de voir ce qui se déroule ici et il évite que nous soyons pris pour cible. Mon sang se glace.

Les plantes à l'entrée sont accueillantes, mais il ne faut pas se laisser prendre par leur beauté. Tout est faux, je le vois aujourd'hui.

— Je croyais qu'il avait été vendu, murmuré-je.

— Non, répond Yuri. Kaden a cherché un moyen de te pousser à revenir.

Mon regard se tourne vers lui.

— Il vous appartient à tous les deux. À vrai dire, tout ce qui appartient à Kaden est aussi à toi.

— Hein ?

La stupeur doit se lire dans mes yeux. Yuri hoche la tête avant de sortir de la voiture. Il vient m'ouvrir la porte, je descends mal à l'aise. Je ne suis pas revenue ici depuis six ans... Mes pieds se posent sur le gravier qui crisse aussitôt. Mon corps n'ose pas bouger.

— Tu ne te souviens pas ? demande Yuri avec douceur.

— Me souvenir de quoi ?

— À la mort de ton père et ton oncle, tout vous revenez.

Mon paternel et mon oncle sont morts quelques semaines avant que je ne découvre la nature de Kaden. Tout ce qui se rapporte à ce moment est assez flou pour moi. Je me souviens avoir dit à mon époux de gérer les choses, je ne m'y suis pas du tout penchée. J'ai signé quelques papiers, mais j'ai tout remis entre les mains de mon compagnon. Ma confiance en Kaden était totale et sans aucune limite.

Quand j'ai découvert ce qu'il était, je suis rentrée en quatrième vitesse, j'ai préparé un sac dans l'urgence, je suis allée retirer de l'argent et j'ai décampé le plus rapidement possible. Je ne suis jamais revenue. J'avais vu dans un journal que la propriété était mise en vente, j'ai même surveillé le site du courtier. En moins de trois jours, elle avait été vendue. Enfin ça c'est visiblement ce que mon « mari » a tenté de me faire croire. Par chance, j'ai réussi à me raisonner et à éviter de venir pour la voir une dernière fois.

— J'étais un peu à l'ouest. Mon univers s'est écroulé avec la mort prématurée des miens.

— Oui, logique, souffle Yuri.

Je serre les bras autour de moi en signe de protection. Je n'aurais jamais pensé remettre les pieds ici.

— Nous n'avons rien changé. Kaden a juste tout entretenu et il a pris le bureau de ton oncle.

— Tu sembles bien connaître les agissements de mon compagnon, murmuré-je en approchant de la porte d'entrée.

— Oui, je fais partie de l'organisation depuis huit ans. Quand Lincoln et Isaac sont morts, j'ai pris du grade et quand tu as disparu, je t'ai traqué.

Je me fige, puis je me tourne vers lui.

— Tu m'as traqué ? Pour me tuer ?

— Non, souffle-t-il en secouant la tête. Kaden et moi nous connaissions bien, il n'avait confiance qu'en moi pour te rechercher.

— Pourquoi ?

— Parce qu'il a sauvé ma peau plus d'une fois et parce que malgré tout nous étions amis.

— Mais je ne te connaissais pas...

— Non et c'était mieux ainsi. Les ordres étaient toujours clairs : la fille des boss ne devait rien savoir et elle était intouchable.

Il monte les quelques marches avant d'ouvrir la porte. Arrivée devant, j'hésite une seconde avant de rentrer dans la hall. La pièce est grande, plus que dans mon souvenir. L'escalier dans le fond n'a pas bougé, il doit toujours mener aux premières chambres. Je m'aventure tranquillement et sur la droite il y a toujours le salon. Étrangement, rien n'a bougé. Le canapé en cuir marron de mon père est toujours là avec quelques autres fauteuils, une cheminée où le bois brûle et une télévision accrochée au-dessus de cette dernière. Les tableaux de mes ancêtres sont à leurs places. La photo de ma mère trône toujours sur le mur de droite avec une de mon père et de mon oncle. Et en dessous de celles-ci, il y a une photo de notre mariage. Mes doigts se lèvent afin de les toucher et je décroche le cadre de ma mère.

Ma mère, Marissa Siddens, était une belle blonde aux yeux clairs. Une silhouette que je lui ai enviée pendant des années. Son sourire est lumineux, je me suis toujours demandé si je lui ressemblait, mais je sais que non. Je tiens plus du côté de mon paternel apparemment. Je n'ai hérité d'elle que sa chevelure et son petit nez.

Est-ce que tu savais qui tu as épousé ? 

Volontairement Captive - The Silent Death - DR -Où les histoires vivent. Découvrez maintenant