Chapitre 28 - Lya -

40 5 0
                                    

 Le réveil est froid, le vide dans mon cœur me donne l'impression d'être gelée de l'extérieur. Ma mère a été violée. Kaden n'a laissé aucune place à l'imagination et ça me tue. Ma nuit a été peuplée de cauchemars ou je la voyais se débattre, appeler à l'aide et que personne ne vienne l'aider, elle était seule.

Je reste roulée en boule dans mon lit. Mon esprit cherche à comprendre comment j'aurais pu réagir à sa place. J'ai beau penser que je suis forte par moment, cependant je ne suis pas dupe. Me relever d'un viol aurait été impossible pour moi. Ma mère avait un courage que je n'ai pas. Il ne sert à rien de se voiler la face. Néanmoins, mon père et mon oncle l'ont vengé. Est-ce que je peux leur en tenir rigueur ? Non... Le système a abandonné ma mère à son sort, elle pouvait croiser ce monstre tous les jours. Pour un peu, il continuait de s'en prendre à elle ! Cette simple idée me donne envie de vomir et c'est ce que je fais. Je me précipite vers la cuvette et je rends le peu que j'ai dans l'estomac. Une fois que j'ai terminé, je me pose contre le carrelage froid derrière moi. J'essaie de respirer, mais l'air à du mal à parvenir jusque dans mes poumons.

Toute cette histoire tourne en boucle dans mon esprit. Je ne sais pas vraiment quelle est la bonne réaction. Mon père et mon oncle ont vengé ma mère, mais est-ce que c'est suffisant pour cautionner tous les meurtres qu'ils ont commis derrière ? Ils ont sûrement des milliers de victimes à leurs actifs, des femmes, des enfants et des hommes. Peut-être des familles au complet ! Cette pensée me soulève de nouveau l'estomac et je vomis de nouveau.

Tu es faible ma pauvre fille !

— Lya ?

Yuri...

— Salle de bain, réponds-je.

L'asiatique se pointe et bizarrement je lis de l'inquiétude sur son visage.

— Merde ! J'appelle le toubib, annonce-t-il.

— Pas la peine, je vais bien.

Il me scrute dubitatif, je peux le concevoir, mais c'est juste le temps que tout se fasse une place dans mon esprit.

— La Silent tue des enfants ? demandé-je les larmes aux yeux.

Il secoue la tête.

— Non, les femmes enceintes et les enfants sont intouchables autant chez nous que chez la Soulless Ones.

— Pourquoi ?

— Nous ne sommes pas des barbares, nous laissons ça aux mafieux, rétorque-t-il en soulevant les épaules.

Un rire m'échappe en entendant sa réponse. Ils ne sont pas des barbares, la bonne blague. Les tueurs à gage ont de l'humour finalement. Je secoue la tête avant de me redresser, de tirer la chasse puis de me laver les dents et le visage.

— Qu'est-ce qui te fait rire ?

— Ta réponse est incongrue, tu t'en rends compte.

— Je ne vois pas en quoi.

— Vraiment ? demandé-je en posant les mains de chaque côté du lavabo. Tu ne trouves pas ça paradoxal de dire que vous n'êtes pas des barbares alors que vous tuez des gens.

Il me scrute avec attention avant de s'accouder au chambranle de la porte.

— Lya, nous faisons ça proprement.

— Vous ne valez pas mieux qu'un tueur en série, craché-je.

Il se rapproche de moi, sa main saisit mon bras et il serre fort.

— Une tueur en série viole ses victimes la plupart du temps, il les découpe pour son propre plaisir et j'en passe. Si tu penses qu'une femme qui a été butée par son mari ne mérite pas la vengeance alors tu n'as rien à faire parmi nous Lya.

Je suis médusée devant autant d'agressivité. Ses iris sont noirs, il me toise avec froideur et pour la première fois j'ai peur de lui.

— Tu ne sais rien de la Silent, alors ne parle pas de sujet que tu ne connais pas ! Mais avant que tu continues de nous juger, je vais te mettre le nez dedans.

— Comment ça ?

— Avant de nous trahir, tu y réfléchiras à deux fois.

Je commence à craindre le pire.

— Habille-toi, princesse, je vais te montrer qui nous sommes.

Puis il me relâche avant de quitter la pièce. Je me masse le bras, j'ai bien senti sa force. Ne jamais prendre Yuri pour un agneau, l'espace de quelques jours, j'ai oublié qu'il était des leurs.

Je me prépare sans broncher, ce n'est pas le moment de le provoquer. J'enfile un pantalon noir, avec un haut à manches longues bleu et la veste qui va avec mon bas de tailleur. Une paire de chaussures plates, une touche de parfum et de maquillage et je le retrouve au rez-de-chaussée.

Une dizaine d'hommes sont dans le hall, visiblement ils patientent. Lorsque Yuri me voit, il me tend la main, j'hésite une seconde avant d'accepter de le suivre. Nous montons dans des SUV et ce dans le plus grand silence. Personne ne parle, la radio n'est même pas allumée, par contre les gars sont en hypervigilance. Ils regardent partout sur le chemin, j'essaie de voir où nous allons, mais je ne reconnais pas le coin. Nous roulons une bonne demi-heure avant que la voiture ne s'arrête. Nous sommes stationnés devant un immeuble, une métisse en sort avec une poussette contenant deux bébés.

— Marika, murmure-t-il. Son mari la violait sans arrêt et il la battait alors même qu'elle portait leurs enfants.

Je lâche un cri de surprise, mon cœur se serre pour elle, ça a dû être l'enfer.

— Il l'avait tellement battu qu'elle a failli mourir pendant qu'elle mettait les petits au monde.

— Oh mon dieu !

— Ce mec était un grand ponte qui se croyait intouchable, jusqu'à ce que la Silent entende parler de son calvaire. Alors oui, Marika a payé, mais pour sauver sa vie et celles de ses enfants.

Il tape deux coups dans le siège de devant, la voiture redémarre. Nous roulons encore deux rues avant de se garer de nouveau. Nous patientons quelques instants, Yuri me montre un bureau. Nous y voyons un homme de trente ans environ.

— Amoric, cadre dans une boite de pub, sa sœur a été violée et tuée sous ses yeux. Il aurait dû crever dans cette ruelle, après avoir subi le même sort, mais il s'est relevé et il a payé nos services.

— Vous avez retrouvé...

— Oui, nous avons traqué ce chacal et nous l'avons exécuté.

Il recommence son manège pour nous arrêter devant une école. Les enfants courent vers l'école, Yuri se dévisse presque le cou avant de me montrer un petit bonhomme.

— Caleb, son paternel nous a contacté pour traquer la mère du petit.

— Pourquoi ?

— Elle et son amant abusaient du petit à tour de rôle.

— Oh mon dieu ! Stop ! Stop !

Mes mains se portent à mes oreilles, je ne veux pas en entendre plus.

— Voilà qui nous sommes, déclare-t-il lorsque la voiture redémarre.

Si la Silent disparaît, je mettrai un terme à toutes ses vies sauvées...

Est-ce que je suis prête à ça ? 

Volontairement Captive - The Silent Death - DR -Où les histoires vivent. Découvrez maintenant