Chapitre 11

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Ariane

  Quand les gens parlent du temps, c'est souvent pour dire qu'il passe trop vite ou trop lentement. Moi, le temps est certainement ma plus grande peur. C'est vrai, si on y réfléchit qu'est-ce que nous, en tant qu'êtres humains, nous représentons à l'échelle du temps ? La réponse est simple : rien. Nous ne sommes rien aux yeux du temps, juste de petites choses qui interagissent dans l'espace qu'il façonne au fil des âges. Les gens pensent pouvoir le capturer pour l'aménager à leur façon et pour cela, il organise des programmes, des emplois du temps ou des minuteurs. Cependant le temps et une entité indomptable. Si on y regarde de plus près, on ne contrôle pas le temps, c'est lui qui nous contrôle et nous balade à sa guise. Le temps bouleverse tout. Nous pouvons rire une seconde et celle d'après nous pouvons nous faire renverser par une voiture. On se lève le matin en pleine forme et le soir, on peut se retrouver à l'hôpital. Ma vie a basculé il y a six mois et pourtant ce jour-là, je n'aurais jamais cru que je perdrais la personne la plus chère à mon cœur. Je m'étais levée de bonne humeur. Je discutais en riant de la tenue que je porterais le soir même avec ma mère et huit heures plus tard, je pleurais la perte de la seule personne dont j'avais toujours pensé ne jamais pouvoir surmonter la mort. Huit petites heures ont suffi à bouleverser ma vie et mon être tout entier. Le temps nous emporte et nous façonne à sa guise. Il nous vieillit, nous abîme, nous stresse et j'en passe. Je suis terrifiée par cette notion de temps qui s'écoule. Il va trop vite et j'ai l'impression de ne jamais avoir suffisamment de temps pour me relever avant de recevoir la prochaine catastrophe en pleine figure. Je commence sérieusement à douter de son efficacité à guérir les peines.

Je soupire longuement et décide de me changer les idées. Assez déprimé pour aujourd'hui ! Décidai-je en sortant du canapé. Je monte les escaliers et décide d'aller courir un peu pour me vider la tête. Une fois dans ma chambre, je l'observe attentivement. Elle est grande. Dans un coin, repose mon piano et l'un des pans du mur est entièrement recouvert par une immense bibliothèque remplie de livres que j'ai presque tous lus. Une grande baie vitrée donne sur le balcon et une porte à l'opposé s'ouvre sur ma petite salle de bain. Mon bureau est collé au mur du fond près du piano et croule sous une pile énorme de papiers et de cahiers de musique en tout genre. Quant à mon lit, qui est tout aussi grand que ma chambre, il est encadré par une bonne centaine de photos. Je soupire en sentant la solitude me gagner. Je n'ai pas l'habitude d'être seule et j'en viens presque à regretter les habituels bavardages incessants de Cameron et Ondine. Cameron... Ça faisait un petit moment que je ne l'avais pas vu. Depuis qu'Ondine a failli lui mettre son poing dans la figure à vrai dire.

Une fois que je suis prête à partir, j'enfile mes baskets et part faire un tour. Le soleil tape fort et je sens la chaleur inonder ma peau. De petites gouttes de sueur roulent sur mon épiderme et mes muscles, qui n'ont pas étaient sollicité depuis un petit moment, me font mal, mais peu importe, l'adrénaline dans mes veines me portent et me pousse à continuer. Je cours en espérant me libérer de mes pensées, de mes émotions et de mes souvenirs. Je ne veux penser à rien d'autre qu'à mettre un pied devant l'autre et c'est ce que je parviens à faire. Mes pensées s'envolent et les émotions que j'ai enfouies en moi me propulsent. Lorsqu'elles me traversent, j'accélère le rythme et je finis par ne prêter attention qu'au paysage qui se présente à mes yeux. Je passe près de la plage et mes yeux se portent sur cette dernière. L'océan est calme et de petites vaguelettes viennent s'écraser sur le sable. Le vent marin apporte avec lui une odeur de sel. En temps normal, je me serais arrêtée pour observer, mais aujourd'hui je préfère continuer ma course. Je cours aussi vite que mes jambes le peuvent et ne m'arrête que lorsqu'elles refusent de me porter plus loin. Je tombe à genoux complétement haletante et réalise que je ne sais même pas où je suis. Géniale. Je me relève et observe autour de moi pour tenter de trouver quelque chose de familier ou qui puisse m'aider à m'orienter. Rien ! A croire que les panneaux en Floride ça n'existe pas.

- En plus, j'ai oublié ma gourde, marmonnais-je tout bas.

Je continue à marcher sans but précis quand une voix narquoise m'interpelle :

- Hé La Nouvelle !

Je fais volte-face et me retrouve nez à nez avec Cameron visiblement content de me voir.

- Qu'est-ce que tu fais là ? me demande-t-il.

- Je courais et je me suis perdue, lui répondis-je en soupirant.

- Tu as couru jusqu'ici ? m'interroge-t-il l'air interloqué. Mais tu habites au moins à sept kilomètres de là !

- Ouais... Ils ne connaissent pas les panneaux en Floride ? pestais-je sans prêter attention à sa moue surprise.

- Pas du tout ! me répondit-il en riant.

Je n'aurais jamais cru dire ça, mais je suis plutôt contente de le voir et son rire est contagieux. Nous rigolons tous les deux et commençons à marcher vers la plage.

- Allez, viens, je te paie un verre ! tu dois crever de soif ma pauvre, me propose-t-il avec un grand sourire.

J'accepte sa proposition en lui souriant en retour. Nous nous asseyons donc à une terrasse et commandons à boire.

- Et toi qu'est-ce que tu fais là ? lui demandais-je.

- Des courses pour ma sœur, répondit-il en brandissant l'un des sacs qu'il portait, j'ai perdu un pari alors je lui devais un service, continue-t-il en haussant les épaules.

- Tu as une sœur ??

- Ouais et elle est insupportable, dit-il avec une moue faussement exaspérée qui me fit rire, on a un an d'écart.

- Oh, je vois. Vous jouez bientôt une compétition en basket ? lui demandais-je pour changer de sujet.

- Ouais dans trois semaines et tu as intérêt à venir nous encourager ma belle, sinon je te jure que je me vengerai ! me menace-t-il avec un air faussement sérieux.

- Pffff, même pas peur ! répondis-je sans relever le surnom.

- Ah ouais ?

- Ouais ! De toute façon, évidemment que je viens puisque Ondine et Ayline jouent, répliquais-je.

- C'est vrai... Tu vas découvrir une nouvelle facette d'Ayline, me dit-il avec un sourire en coin.

- Comment ça ? demandais-je réellement intriguée.

- Ayline est un vrai ange, mais quand elle joue en compet' même moi elle me fiche la trouille ! s'exclame-t-il.

Et là, rien qu'à l'idée d'imaginer Ayline se transformer en démon, j'explose de rire.

- Je suis sérieux ! proteste-t-il en ricanant.

- On verra, lui répondis-je en gloussant.

- D'ailleurs, je voulais te demander...hésita-t-il.

- Oui ?

- Tu es amie avec Daemon ? J'ai eu l'impression que vous vous êtes rapprochés, me demande-t-il.

- Quoi ?! Non ! Enfin oui ! Ou... En fait, je n'en sais rien, répondis-je sans trop savoir pourquoi je panique.

- Ah bon ? En-tout-cas, tu devrais te méfier de ce type, il est froid et il finira par te briser le cœur si tu t'accroches à lui, répondit-il avec un air sérieux.

- Ah ouais ? Bizarre, figure-toi qu'il m'a dit la même chose à ton propos ! répliquais-je sans trop savoir pourquoi j'étais agacée ni même pourquoi je voulais le défendre.

Cameron leva les yeux au ciel et du percevoir mon agacement puisqu'il changea de sujet.

- Tu veux que je te ramène ? Ça fait super loin d'ici à chez toi, me propose-t-il en se radoucissant.

- Je veux bien, acceptais-je en me calmant à mon tour.

Quelques minutes plus tard, nous roulons en direction de chez moi en discutant de tout et de rien, il ne me demande pas pourquoi je n'ai pas été en cours et cela me va très bien. Je repense à Daemon, avec les événements de cette nuit, je l'avais oublié. Me considère-t-il comme une amie ? Non, j'en doute vu le regard qu'il me lance en cours. Pourquoi je pense autant à ce type, me demandais-je alors que nous bifurquions dans ma rue.

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Merci de m'avoir lu et à la semaine prochaine !!!

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