Chapitre 23.2

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J'avais fini par lui hurler dessus et je ne suis pas sûre d'avoir crié en anglais ou en français, mais j'avais hurlé ma dernière phrase à m'en faire péter les poumons. J'avais le souffle court, je sentais ma poitrine se lever et s'abaisser à grande vitesse, mon cœur s'affolait, ça me faisait mal, mais je ne dis rien. Sa respiration n'était pas mieux que la mienne, ses yeux passèrent de la colère à l'étonnement en passant par la douleur avant de s'écarquiller de surprise. Au final, j'avais dû crier en anglais car je sentais son regard glisser sur moi juste avant qu'il ne fasse un geste vers moi, doucement, comme à un animal apeuré, ce que j'étais à ce moment précis.

Il ne se découragea pas devant mon mouvement de recul, son regard s'embrasa.

— Ne me regarde pas comme ça, je ne me retiendrai pas si tu me regardes avec ces yeux.

Il me dit ça dans un murmure de souffrance alors que ses yeux brûlaient mon âme. J'étais perdue, bouillante de colère et d'incompréhension. J'avais mal, tellement mal. Mon coeur saignait. Je n'arrivais plus à vivre normalement.

Avant même que mon cerveau ait pu se connecter, je sentis une de ses mains dans le creux de mes reins, l'autre sur ma joue et ses lèvres contre les miennes. J'écarquillais les yeux de stupeur, incapable de bouger, alors que lui avait les siens de fermer. Il avait les lèvres douces ce qui contrastait avec sa barbe courte. Son corps était chaud par rapport au mien encore ruisselant d'eau. En un instant mon cerveau se réveilla, avec la pensée la plus incohérente qu'il existait : j'allais finir par le mouiller, c'est tout, rien de plus. Je n'étais que sensation et incohérence et ce qui me troubla le plus était que je me sentais à ma place.

Il détacha ses lèvres des miennes avant que je ne réalise ce qu'il passait pour poser son front contre le mien.

— Je fais tout de travers avec toi. J'aurai dû te parler hier au lieu de rester avec les autres, faut pas m'en vouloir. J'avais peur de pas te blesser ou te faire peur, et au final c'est ce qui est arrivé. J'ai compris maintenant, j'arrête de faire le con, me confia-t-il. J'aurai dû faire ça depuis longtemps. Je ne veux pas te brusquer, tu es libre de faire ce que tu veux, mais sache que je ne te lâcherai pas. Dans un sens ou un autre, peu importe ce qui se passera.

Il souffla en me regardant alors que oui, je devais avoir un regard terrorisé en ce moment même. Il caressa ma joue avant de m'embrasser le front.

— Je te laisse te préparer maintenant.

Je restais hébétée un bon moment à fixer la porte par laquelle il venait de partir. Je me reconnectais à la réalité par automatisme, tant et si bien que j'allumais l'eau en portant toujours la serviette sur moi. Je réglais la température sur froid. Inspirer, expirer. Inspirer, expirer. Inspirer, expirer.

Je voulais me rouler en boule dans un coin et qu'on m'oublie, juste pour une journée, mais je ne pouvais pas. Ma volonté avait fondu comme neige au soleil dans ses bras et j'avais aimé ça. J'avais un trop plein de trop d'émotions contradictoires, je ne savais plus où j'en étais. Je me préparais sans faire attention à ce que je prenais comme vêtements, de toute façon, je ne voulais plaire à personne, pas même moi. Je fis quand même l'effort de mettre une vraie paire de chaussures et enfilais mon pull le plus grand et le plus confortable en ma possession en plus de ma veste.

Je montais dans la voiture Petit Chef et Bear comme chauffeur, direction le parc. Bien entendu on n'était pas seul, une partie du MC faisait le déplacement avec nous sur leur moto, même Annie avait enfourché la sienne.

— Alors, tu finis par me raconter ? me demanda-t-il et je le regardais sans comprendre. La moitié du bâtiment t'a entendu crier, il s'est passé quoi ?

— Rien d'important, fis-je en tournant la tête par la fenêtre, j'étais encore un peu absente, je le sentais.

— Oh, oh, on dirait qu'il y a de l'eau dans le gaz avec Phénix... remarqua-t-il.

What a shitty American Trip.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant