— Est-ce que tu m'écoutes au moins ?
Le claquement de doigts sous mes yeux me fait sortir de la torpeur dans laquelle cette conversation m'a plongé.
— Bien sûr que je t'écoute.
C'est faux. Et si elle me demandait de restituer la moitié de l'échange que nous venons d'avoir, j'en serais foutrement incapable.
Emilia et moi ne sommes pas vraiment en couple. On se voit de temps en temps quand j'ai du temps libre et on passe de bons moments.
Mais en dehors du sexe, il n'y a rien.
Pas d'étincelle, rien qui ne me fasse vibrer chez elle et emballe mon cœur. En revanche, elle est canon, ça oui.
J'ai une boîte qui fonctionne, des amis super et une famille plutôt sympa bien qu'un peu trop conventionnelle selon moi. Ça me suffit.
— Et donc je lui ai dit... Mais je n'ai pas pu... Alors que Matt... Et...
En général, on ne discute pas elle et moi. Ou presque pas.
Emilia n'est pas une fille désagréable en soi, mais en dehors de son nombre de followers sur Instagram, on ne peut pas dire qu'elle ait de nombreux sujets de conversation à aborder.
Ça me va bien à moi.
On se voit pour faire l'amour, puis hop. Chacun chez soi.
Sauf ce soir, ou elle a visiblement décidé de me parler de je ne sais quoi.
Je fais mine de l'écouter tandis qu'elle s'attaque aux boutons de ma chemise.
J'étais tendu aujourd'hui.
Mon retour en ville ne s'est pas passé comme prévu. Et ce couac à mon arrivée m'a vraiment mis sur les nerfs. Alors quand elle m'a envoyé un message me disant qu'elle était dans les parages pour la soirée, j'ai sauté sur l'occasion.
— Tu en penses quoi, toi ?
Merde, je ne sais franchement pas quoi répondre à ça. Je n'ai pas écouté un traître mot de ce qu'elle a dit depuis qu'elle est arrivée ici. Alors j'opte pour une réponse bateau et, je l'espère, passe partout.
— Tu devrais le faire.
Elle immobilise ses mains et me sourit.
— Tu as raison ! Je vais le faire ! Je vais me lancer.
J'ignore si c'est une bonne ou une mauvaise chose, mais je m'en fous. Parce qu'elle reprend enfin ce qu'elle a entamé et que sa main glisse désormais dans mon boxer.
J'apprécie le geste. Et le silence qui l'accompagne.
J'ai toujours considéré le sexe comme un exutoire.
Je m'envoie en l'air et tout roule à nouveau. Du moins pendant un moment.
Et quand l'effet s'estompe... Il n'y a plus qu'à recommencer.
Je pense qu'Emilia attend un peu plus de moi, même si elle se garde bien de me le dire.
Elle sait que je ne veux pas m'engager. Mais elle répond toujours de façon positive quand j'en ai besoin alors rien que pour ça... Je l'apprécie.
Elle me lance un sourire charmeur avant de tomber à genoux.
— Et maintenant, je m'occupe de ça.
*************
— Regardez qui nous fait l'honneur de sa présence !
Je gratifie mon ami, et collègue, d'un doigt d'honneur, tandis que je file m'installer dans mon bureau.
Helen, notre standardiste se penche un peu plus en avant que nécessaire lorsqu'elle me salue et me tend le dossier sur lequel je dois travailler aujourd'hui.
— Bonjour, Monsieur Harper.
Elle fait rouler le « r » quand elle prononce mon nom. J'imagine que c'est sa façon de me faire comprendre qu'elle sait faire un tas de trucs avec sa langue. Enfin, je n'imagine pas tant que ça puisqu'elle me l'a fait comprendre à plusieurs reprises et de façon bien plus nette qu'une consonne subtilement appuyée.
C'est une jolie fille, je ne vais pas dire le contraire. Et elle a des... atouts qui ne peuvent qu'attirer le regard, j'en conviens.
Mais ce petit numéro de charme, qu'elle me fait chaque matin, elle le fait aussi à la plupart des types portant un costume de plusieurs milliers de dollars qui passent ici alors...
À titre personnel, je préfère m'abstenir.
Je ne mélange de toute façon jamais le travail et le plaisir.
— Bonjour Helen, merci, dis-je en saisissant le dossier qu'elle me tend, veillant à toujours garder cette distance professionnelle entre nous en toute circonstance.
Ce n'est qu'une fois installé dans mon bureau que je souffle et me mets rapidement au travail.
J'ai créé cette société avec Parker il y a près de cinq ans. Notre existence est récente, mais même si nous sommes encore loin de rivaliser avec les grands de la ville, installés d'ici depuis des décennies, l'écart entre nous se réduit de façon considérable chaque année.
Nous n'avons peut-être pas leurs ressources, mais ne manquons ni d'idées ni de motivation pour les mettre en œuvre et jusqu'ici, ça nous réussit plutôt bien.
Le nombre de zéros sur mon compte en banque peut en témoigner.
Il nous a fallu du temps pour arriver jusqu'ici et chacun d'entre nous a donné sa sueur et son sang pour que cela fonctionne.
— Alors... ce mariage ?
Comme à son habitude, Parker vient prendre place face à moi tandis que je commence à mettre de l'ordre dans les papiers qui s'étalent sur mon bureau.
— Fleuri.
Il éclate de rire et je finis par en faire autant. Cet enfoiré a toujours eu un rire communicatif.
— Fleuri comment ? Roses et hortensias ?
— Plutôt fleurs des champs à vrai dire. D'ailleurs il me semble que le thème était « voyage champêtre » ou une connerie du genre.
— J'imagine bien le truc, surtout connaissant Riley.
— Dieu sait à quel point j'aime ma cousine, mais j'ai eu envie d'emplafonner le futur marié au moins douze fois pendant la soirée. Qu'est-ce qu'elle fait avec un type pareil ?
— J'en sais rien mon pote, mais il n'y a pas une connerie qui dit que l'amour rend aveugle ou je ne sais quoi ?
Nous éclatons de rire une nouvelle fois.
— Ouais... Dans le cas de Riley, il a dû lui crever les deux yeux à coup de fourchette.
Parker secoue la tête, son rire se calmant peu à peu tandis que nous revenons à des sujets plus sérieux.
Lui et moi avons grandi ensemble, dans la même petite ville du Missouri.
Il y a dix ans, lorsque j'ai décidé de venir tenter ma chance à New York, il m'a suivi.
Nous étions déjà les meilleurs amis du monde à l'époque, alors c'était rassurant pour moi de ne pas me retrouver complètement seul.
Au boulot comme à la vie, nous formons tous les deux une sacrée équipe.
Des coups légers frappés à ma porte nous tirent de notre échange.
Tout sourire, Helen s'approche et dépose nos cafés, se penchant encore une fois de façon excessive afin que nous puissions profiter du spectacle.
Nous la remercions poliment avant de rire à nouveau une fois la porte fermée.
— Putain de merde, cette nana a vraiment chaud au cul, s'exclame-t-il.
— Je te le fais pas dire !
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Quelqu'un comme toi
RomanceAllie vient de débarquer à New York pour y rejoindre sa meilleure amie lorsqu'un parfait inconnu confond leurs valises et la ramène chez lui par erreur. James, de son côté, se rend rapidement compte de sa méprise et contacte l'aéroport pour obtenir...