Chapitre 58 - James

534 50 6
                                    

Mark et moi venons de raccrocher.

Emilia était convoquée tôt ce matin au commissariat pour s'expliquer sur mon empoisonnement, mais elle a, sans surprise, tout nié en bloc.

Reconnaitre qu'elle m'avait drogué l'aurait de toute évidence exposée à des conséquences qu'elle n'était pas prête à assumer et même si de mon côté, le doute n'est pas permis, il ne nous a pas été possible de prouver avec certitude qu'elle était responsable de tout cela.

L'enquête va se poursuivre et je dois donc prendre mon mal en patience jusqu'à ce que les faits soient confirmés. En attendant, elle n'a plus le droit de s'approcher de moi ni de me contacter, ce qui me va très bien.

Concernant Stephen, rien de neuf.

Puisqu'elle n'a rien dit, les choses n'ont pas avancé sur ce sujet, mais j'ai un mauvais pressentiment.

Je ne parviens pas à me l'expliquer. D'autant que je n'ai jamais été très adepte du sixième sens que tant de gens se plaisent à invoquer pour justifier une intuition. Pourtant, je n'arrive pas à me sortir de la tête que quelque chose va arriver.

J'ignore de quoi il s'agit, évidemment. À vrai dire j'ignore même s'il va se passer quoique ce soit.. Peut-être bien que je me fais des idées et que cette histoire avec Emilia m'atteint davantage que ce que je veux bien admettre.

Nous serons convoqués prochainement tous les deux et j'espère bien avoir l'occasion de lui faire cracher le morceau.

— Est-ce que ça va ? Tu as l'air ailleurs.

— Ouais, désolé. J'ai un peu de mal à me concentrer.

— Je vois ça.

Parker prend place dans le siège face au mien.

— Tu t'inquiètes pour elle, n'est-ce pas ?

— Oui, dis-je en soufflant longuement. Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai le sentiment que toute cette histoire n'est pas terminée.

— Allie en pense quoi ?

— Elle me dit que tout va bien, que je n'ai pas à m'en faire.

— Mais... ?

— Mais je ne le sens pas.

— Mark dit que c'est un fils à papa. Tu crois vraiment qu'il pourrait être à l'origine d'un truc pareil ? Je veux dire, on sait que c'est lui qui cherche à nous mettre des bâtons dans les roues depuis plusieurs semaines, mais de là à...

— Oui, tu as peut-être raison. Je me monte la tête pour rien.

— Pas pour rien, non. Emilia a quand même vraiment pété les plombs sur ce coup-là, me rappelle mon ami.

— Clairement, oui.

Je consulte ma montre. Il est presque dix-sept heures.

— Ça t'ennuie si je vais ...?

— Retrouver Allie ?

— Je ne veux pas qu'elle rentre seule.

Face à moi, Parker rit.

— Va jouer les chevaliers servants, me dit-il.

— Merci mon ami.


****************

La discussion que je viens d'avoir aurait sans doute dû apaiser mes peurs, mais il n'en est rien et plus je me rapproche de mon point de rendez-vous, pire c'est.

J'essaie de rester rationnel, mais l'absence de réponse d'Allie à mes derniers appels m'inquiète de plus en plus. Ce n'est pas dans ses habitudes.

D'autant que, vu la situation, je doute qu'elle me laisse sans nouvelles volontairement.

J'en suis même convaincu.

Alors je reprends mon téléphone en main, une fois de plus, mais toujours rien. Je tombe une nouvelle fois sur sa boîte vocale. Je répète le même schéma depuis près d'une heure désormais.

Je ne suis plus qu'à quelques dizaines de mètres de son lieu de travail. Je vais rapidement pouvoir mettre un terme à toute cette angoisse qui me ronge depuis de bien trop longues minutes déjà.

Ne voyant Allie nulle part, je me gare rapidement et descends de ma voiture.

Je décide d'attendre encore un peu. Inutile de devenir irrationnel, elle peut avoir simplement du retard n'est-ce pas ? Et puis elle est tête en l'air, elle a très bien pu oublier son téléphone dans une pièce et ne pas y avoir accès. Ça se tient non ?

Sauf que les minutes défilent et qu'elle n'apparaît toujours pas.

Et mon mauvais pressentiment ne fait que se renforcer.

Ça suffit.

Je ne vais pas rester là comme un idiot à ne rien faire ou bien je vais finir par devenir dingue.

Alors je me dirige vers l'accueil d'un pas décidé.

La petite blonde qui m'observait depuis la fenêtre lorsque j'ai amené Allie est justement devant l'énorme porte d'entrée vitrée, fumant une cigarette. Cigarette qu'elle s'empresse de jeter au sol lorsqu'elle me voit arriver.

— Bonjour mademoiselle.

— Bonjour, me répond-elle avec un sourire charmeur.

— Je suis désolé de vous déranger, je crois avoir remarqué que vous travaillez ici ?

— C'est vrai, je m'appelle Karen, dit-elle en me tenant une main que je saisis poliment.

— Karen, je m'appelle James. Je suis le petit ami...

— D'Allie, m'interrompt-elle.

— C'est exact. Est-ce que vous sauriez où je peux la trouver ? Nous avions rendez-vous ici il y a près de quinze minutes, mais je n'arrive pas à la joindre.

La blonde se met à regarder ses pieds, comme si elle venait subitement de perdre sa langue.

— Je ne sais pas si je dois...

— Écoutez, je vais être honnête avec vous, je m'inquiète beaucoup. Est-ce que vous pouvez au moins me dire si elle est encore dans les locaux ?

Sans doute rassurée par le baiser qu'Allie et moi avons échangé sous ses yeux ce matin, elle semble décidée à me parler et relève la tête.

— Je crois que ma réponse ne va pas vous plaire.

— Je peux vous demander pourquoi?

— Parce qu'Allie a terminé le travail à quinze heures, comme prévu et qu'elle a quitté le laboratoire à ce moment-là.

Quinze heures ? Je suis pourtant certain qu'elle m'a dit dix sept-heures.

Et puis si je m'étais trompé, elle aurait pu me prévenir.

Ce qui me fait dire qu'elle m'a menti, sciemment.

On dirait bien que ce foutu pressentiment n'était pas là pour rien, finalement.

Mais où est-elle passée ?

Quelqu'un comme toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant