Chapitre 20 - James

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Quand les gars m'ont proposé de sortir un peu plus tôt dans la soirée, je n'étais pas emballé, mais je dois admettre que l'endroit est sympa.

J'ai eu un boulot monstre cette semaine et les jours ont défilé à une vitesse folle.

Je ne me plains pas.

C'est un métier où rares sont les opportunités de briller et le fait que Parker et moi ayons pu en saisir une nous a ouvert une voie prometteuse.

Mais ce n'est pas simple tous les jours.

Et parfois j'ai le sentiment de me noyer dans le boulot et de peiner à en émerger.

— Alors bourreau de travail, quel effet ça fait de voir à nouveau le monde réel ? s'amuse mon ami d'enfance.

— Je vois le monde réel tous les jours, je te signale.

— Regarder la rue depuis ton bureau, ça ne compte pas !

Je hausse les épaules en souriant.

Mark est un type super, mais le fait que je puisse passer des heures enfermé dans mon bureau sans même voir la lumière du jour le dépasse complètement.

C'est quelque chose qui lui paraît inconcevable.

— Ça ne compte pas, mais ça paye.

Et c'est vrai. Si plus jeune on m'avait dit que je me dirigerais vers ce genre de métier bien rangé, je ne l'aurais pas cru.

Ado, je me voyais devenir une star du football ou inventer un truc qui... je ne sais pas moi... révolutionnerait le monde et me rendrait plein aux as.

Mais la réalité s'est rapidement heurtée à mes rêves de gloire et mes parents m'ont obligé à choisir une voie plus conventionnelle.

Je ne les blâme pas pour ça.

J'étais un petit con et j'avais besoin de cadre.

S'ils n'avaient pas fait le nécessaire à l'époque, je n'aurais pas misé cher sur ce que je serais devenu.

Et puis, j'aime ce que je fais. Ça m'oblige à être attentif, rigoureux, créatif.

C'est un travail dans lequel il faut penser à beaucoup de choses même si, au fur et à mesure des années qui passent, nous avons réussi à nous construire une petite équipe qui tient la route.

— Ouais, sur ce point-là, je ne peux pas dire grand-chose, concède-t-il.

Quand Parker et moi avons choisi de suivre la même voie, lui s'est dirigé vers un extrême opposé en intégrant l'école de police. Comme son père et son grand-père avant lui.

Pour sa mère, qui a perdu son mari en service, ça a été un déchirement.

Je la revois encore dans les bras de la mienne, en pleurs, le jour de son intégration.

On y pense parfois... Aux risques qu'il prend du fait de sa fonction, mais il est le premier à dire que la vie ce n'est pas ça... Et qu'au contraire, s'il doit mourir demain, alors il vaut mieux qu'il en profite aujourd'hui.

— Ceci dit, les filles adorent les menottes, ajoute-t-il soudain.

Nous éclatons de rire.

De nous trois, Mark est sans aucun doute celui qui a le plus de conquêtes à son actif.

Il faut dire qu'il mène une vie... comme qui dirait légèrement en dehors des standards de la société. Sur le plan sexuel. Car au boulot, il est irréprochable.

— Tu les attaches pour qu'elles ne partent pas une fois qu'elles ont réalisé l'erreur qu'elles ont faite d'accepter de sortir avec toi ?

— Ah. Ah. Ah. Je suis mort de rire. Vraiment.

C'est agréable de se retrouver ici tous les trois.

Malgré les années qui passent, nous restons inséparables.

— Comment va Noa ?

Noa est son fils. Un petit bonhomme de deux ans que sa mère, l'une des femmes avec qui il avait une aventure depuis quelques semaines, lui a laissé un beau matin avant de disparaître, décidant tout à coup que le rôle maternel ne lui convenait pas.

— Il va bien. Ma mère le garde pour le weekend parce que je suis de nuit.

Ça n'a pas été la période la plus simple de sa vie, mais on l'a épaulé du mieux qu'on a pu et il s'en sort aujourd'hui vraiment bien.

— D'ailleurs, elle vous embrasse. Elle voudrait que vous veniez manger un de ces jours. Elle n'arrête pas de me tanner avec ça, vous la connaissez...

Eileen est un phénomène... Et elle est un peu notre deuxième maman, à Parker et moi. Alors, aller manger chez elle, ce sera avec plaisir.

Nous convenons d'ailleurs rapidement tous les trois d'y aller le dernier dimanche de ce mois-ci, pour le troisième anniversaire de Noa.

Comme nous, Mark a grandi dans le Missouri, mais rêvait d'une carrière que seule une grande ville comme New York pouvait lui offrir alors il est venu s'installer ici, nous précédant de quelques mois.

Sa mère, ne supportant pas de le savoir loin d'elle, l'a suivi et vit ici elle aussi.

— Bien, maintenant que c'est réglé... Est-ce qu'on peut passer aux choses sérieuses ? Cette bière est infâme. Je crois que je préférerais me mettre un truc sous la dent.

Le connaissant, je suis certain qu'il a déjà repéré la nana avec qui il passera la nuit.

J'aimerais pouvoir faire comme lui, mais la vérité c'est qu'Allie ne quitte pas mes pensées.

Merde, ça fait une semaine maintenant. Et je ne l'ai pas rappelé... Je sais qu'elle me l'a demandé, mais il m'arrive souvent de m'interroger sur le fait de savoir si c'était vraiment ce qu'elle voulait.

J'ai hésité à le faire au moins une cinquantaine de fois, mais je me dis que si elle avait eu envie qu'on se revoit...

Bref.

Je me focalise trop sur cette histoire de toute façon.

Oui, cette nana m'a fait tourner la tête, mais il est temps que je me remette sur le marché.

Tant pis pour elle.

— Oh, je crois que j'ai trouvé.

Nos regards se posent sur deux jolies filles, assises au comptoir. Une blonde aux longs cheveux bouclés et une brune, légèrement plus petite, dont la nuque est dégagée par une queue de cheval relevée.

Elles rient tout à coup et font trinquer leurs verres tandis que Mark se tourne vers nous avec un sourire assuré.

— Observez et prenez-en de la graine.

— Quel enfoiré, lance Parker qui lève les yeux au ciel.

Nous rions tous les deux et lorsqu'il arrive au niveau des filles, la jolie blonde lui offre un grand sourire. C'est vrai qu'elle est mignonne.

Son visage ne m'est pas inconnu... Pourtant, je n'arrive pas à savoir d'où je peux bien la connaitre.

Je ne sais pas ce qu'il leur raconte, mais elles semblent le trouver très drôle.

On le regarde faire pendant quelques secondes jusqu'à ce qu'il pose ses mains sur leurs épaules, à chacune.

C'est à ce moment-là que son amie se retourne.

Et que je comprends mieux mon impression de déjà vu.

Quelqu'un comme toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant