Chapitre 8 - James

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Assis à la table du restaurant dans lequel j'ai rendez-vous avec Allie, je patiente désormais depuis presque trente minutes.

J'avoue que je suis tenté de l'appeler pour comprendre pourquoi elle n'est toujours pas là mais je ne veux pas paraitre trop intrusif.

Elle ne peut pas m'avoir posé un lapin...

Dans d'autres circonstances, je ne dis pas. Mais là, j'ai sa valise.

Je ne vois pas pourquoi elle agirait ainsi tout à coup. Ça n'a aucun sens.

Elle pourrait avoir eu un problème en chemin, ou bien n'avoir pas trouvé l'endroit.

— Bonsoir, m'interpelle tout à coup une voix que j'ai découverte lorsqu'elle a répondu à mon appel tout à l'heure. 

Je relève le nez du menu, que je relisais pour la troisième fois, histoire de me calmer.

Et la jeune femme de l'aéroport se tient juste devant moi, arborant un sourire nerveux.

Je me lève précipitamment de ma chaise pour l'accueillir et fais le tour de la table.

— Bonsoir. J'ai cru que vous ne viendriez pas.

— Je... Oui, désolée, je suis en retard. J'ai voulu prendre un taxi, mais je me suis aperçue que j'avais laissé mon sac à main dans mon appartement. Sauf que je n'avais pas les clés... Il a fallu que je passe par le concierge, qui a dû demander confirmation à ma meilleure amie... Tout ça a mis un temps fou.

Je ne comprends pas un traître mot de ce qu'elle me raconte, mais ça n'a pas beaucoup d'importance.

— Je voulais vous appeler, mais je n'avais plus de batterie, dit-elle en posant son téléphone éteint sur la table comme pour me prouver sa bonne foi.

— Aucun problème. J'ai relu le menu en long, en large et en travers en vous attendant. Je crois pouvoir dire que je le connais par cœur.

Elle sourit lorsque je tire sur sa chaise pour l'inviter à s'asseoir.

— Merci beaucoup. La galanterie se perd de nos jours.

Je ne peux m'empêcher de sourire à mon tour. Si elle apprécie le geste, tant mieux. D'autant qu'il m'offre une vue imprenable sur son décolleté au moment où elle s'exécute.

Cette petite robe lui va à ravir.

On dirait qu'elle a cherché le vêtement qui offrirait le compromis parfait entre le fait d'être sexy et le celui de ne pas être vulgaire. Et c'est réussi.

Je fais de mon mieux pour me reconcentrer sur autre chose.

Après l'avoir franchement reluquée à l'aéroport, il serait probablement malvenu d'en faire autant ici.

Je reprends à nouveau ma place, mais cette fois-ci en charmante compagnie.

— Oh, votre valise est dans le hall... L'homme qui m'a accueillie m'a dit de la laisser là. Que vous en aviez fait autant...

— C'est exact. J'imagine que dans le cas contraire, les gens se seraient interrogés sur le pourquoi vous et moi nous promenons avec ces deux valises identiques...

Elle se met à rire. Dieu qu'elle est mignonne.

— C'est fort probable en effet.

— J'ai quelque chose qui pourrait peut-être vous intéresser, dis-je en fouillant dans la poche de mon pantalon sous son regard intrigué. Tenez.

Elle regarde avec intérêt l'objet que je viens de déposer sur la table.

— C'est une ...?

— Batterie externe, oui. Pour votre téléphone.

Elle semble surprise pendant une fraction de seconde puis se saisit de l'objet en question.

— Merci, vraiment.

— Je vous en prie.

Je la regarde brancher son téléphone tandis qu'un air soulagé prend place sur son visage.

— Alors... dites-moi tout. Vous êtes de New York ?

Je la vois se raidir. C'est très bref. Presque furtif... Elle tente de ne rien laisser paraître de plus, mais... Je l'ai vu. C'est peut-être un peu trop personnel pour une première question. Même à quelqu'un dont j'ai vu les sous-vêtements en détail.

Bon, dans une valise, certes... Mais quand même !

— Non. Je... Je suis ici pour voir ma meilleure amie.

J'ai bien senti le malaise alors je choisis de ne pas insister davantage.

— Et vous ?

— J'ai grandi dans une petite ville du Missouri, mais je suis installé à New York depuis cinq ans.

— Oh, vous devez bien connaître la ville alors.

— On peut dire ça, oui. Vous cherchez un guide ? Si votre meilleure amie n'a pas le temps de vous faire visiter, je me ferais un plaisir de m'en charger. Il y a un tas de choses que je pourrais vous faire découvrir !

Je vois ses joues se parer d'une légère teinte rose. Le double sens de ma phrase était-il si évident ?

Le serveur nous interrompt alors qu'elle s'apprête à répondre.

— Avez-vous choisi ?

— Je suis désolée, non. Pas encore. Je viens tout juste d'arriver.

— Aucun problème. Je vous laisse le temps de regarder le menu et je repasse dans quelques minutes.

Allie acquiesce tandis qu'il s'éloigne.

— Vous avez choisi ?

J'ai relu ce foutu menu trois fois en l'attendant alors oui, j'ai eu le temps de choisir.

— Oui. Je crois que je vais opter pour le saumon.

— Ça me semble être une excellente idée, dit-elle après avoir consulté rapidement la carte.

Je fais signe au serveur qui nous rejoint aussitôt pour lui passer commande.

— Vous buvez du vin ?

Elle acquiesce.

— Et une bouteille de votre meilleur vin blanc, s'il vous plaît.

Le serveur s'éloigne, nous laissant à nouveau seuls.

— Un restaurant chic, du bon vin... Vous invitez souvent des femmes que vous ne connaissez pas ici ?

Pourquoi ai-je l'impression qu'il y a un double sens aussi à cette phrase ?

— Vous êtes la première, dis-je en riant.

— Et la première avec qui vous échangez votre valise ?

— En effet. Il y a un début à tout.

Elle rit tandis que le serveur revient avec notre vin et le verse dans nos verres, l'un après l'autre.

Je lève le mien en sa direction.

— Aux premières fois.

Quelqu'un comme toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant