28 | Point faible

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EMILIO

J- 53

17h00

Quelque part à la frontière du désert, Égypte

         

Elle m'a cherché des yeux toute la foutue journée.

Je fais de mon mieux pour m'intéresser au débat entre Caleb et Thomas mais mon attention est sans cesse attirer de l'autre côté de l'oasis où Ju et Rose s'amuse à tester la nouvelle cargaison d'arme que le Russe d'hier nous a vendu. J'essaye vraiment de me détourner d'elle mais c'est mon corps qui refuse de m'écouter.

— Emi ? T'en penses quoi ?

Ses cheveux courts se balancent dans son dos et son rire me percutent de plein fouet tandis qu'elle montre à son amie comment sortir le chargeur de l'arme automatique qu'elle tient. Elle tourne rien qu'un instant sa tête dans notre direction mais je sais que, quand elle détourne la tête comme si elle s'était brûlée, c'est parce qu'elle a remarqué que je n'ai d'yeux que pour elle. Je l'ai cherché des yeux toute la foutue journée.

— Emilio ?

Je tourne la tête vers Cal et scrute un instant son visage en espérant que ses sourcils froncés vont m'aider à trouver de quoi nous étions en train de parler. Assis parmi les rochers qui bordent l'oasis artificiel, je cherche quelque chose à faire qui ne me donne pas l'air d'un abruti fini incapable d'écouter son pote plus de trente secondes.

— De ouf. Je suis d'accord avec vous.

— T'as rien écouté en fait.

Thomas, en retrait jusque-là, éclate d'un petit rire qui, étrangement, ne m'horripile pas comme d'habitude. Il y a quelque chose chez ce type que je ne saisis pas. J'avais cru comprendre qu'il rêvait de devenir un criminel de renom et hier pourtant, il a été incapable de prononcer le moindre mot face à nos invités. Je peux concevoir qu'il n'a pas l'habitude de se retrouver face à tant d'hommes dont il a ruiné la vie en ligne, terré dans sa cave sordide, mais hier soir, il n'était pas le Thomas avide de violence dont j'ai fait la connaissance à Monaco.

Ce n'est pas un garçon qui semble avoir peur de la mort et dans un sens, il me terrifie pour ça. Je n'arrive pas à lire en lui, à comprendre ses motivations ou à me dire que s'il le souhaite, cet homme peut me détruire d'un clic sur l'ordinateur caché dans sa chambre. Caleb n'éprouve pas la même défiance que moi envers le hacker. C'est difficile de rater les sourires qu'ils s'échangent ou l'électricité qui crépite entre eux dès que leurs mains se frôlent.

Nous sommes assis au soleil depuis une trentaine de minutes maintenant et depuis le début, je sens bien que je suis de trop. Je soupçonne Thomas d'avoir posé des questions ce midi à table dans le seul but que Caleb se propose d'y répondre en lui expliquant tout le plan qui va suivre. Rosalia ne s'y est pas opposée car elle doit sans doute juger ça comme une récompense suffisante pour le sang qui a éclaboussé son visage quand Melkinov s'est effondré au sol.

— J'ai trop chaud, je me casse.

Je n'attends pas l'autorisation des deux abrutis qui décident de retirer leur chaussures pour se rafraîchir les pieds dans l'eau de la mare et me relève en époussetant mon short. Après un dernier regard vers Julia, je m'engage sur le sentier tracé par des pierres à même le sable et regagne la maison aux murs d'un blanc trop éclatant par la porte fenêtre.

Cece est en train de lire dans la salon et lève à peine la tête à mon passage. Face à elle, Hayden profite de la chaleur pour faire la sieste dans le canapé et c'est rageant de constater que, même dans son sommeil, ce bourge a une allure princière. Je traverse la pièce et gagne le couloir interminable qui dessert toutes les chambres de la villa. Quarante secondes plus tard, je suis dans ma chambre à vérifier que mon t-shirt ne sens pas la transpiration et que mes cheveux sont assez disciplinés pour me donner un air sage.

ANAIDÉIA | LES ROSES DE ROME T.2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant