EMILIO
J- 63
15h41
Parvis du Louvres, Paris, France
En m'assurant que personne de notre groupe ne me voit faire, je sors mon téléphone de ma poche et photographie les bâtiments qui m'entoure avec quelque chose sur les lèvres qui ressemble à un sourire. Je n'ai jamais été un grand amateur d'art mais mon périple au cœur de Rome m'a appris à remettre en question ce que je pensais être de simple coups de pinceaux sur une toile. Ce n'est pas vraiment de l'impatience mais plutôt comme une envie irrépressible d'entrer dans le plus beau musée du monde pour voir enfin de mes propres yeux ces œuvres dont on m'a rabâché le nom depuis ma naissance.
J'ai passé la journée d'hier à dormir et à prier pour que Julia arrête de se comporter si bizarrement avec moi, arrête de m'obliger à me souvenir du discours à deux balles que je lui ai sorti à Macao. C'est pour ça qu'aussitôt arrivé à Paris, j'ai laissé mes amis se balader dans les rues sans moi et ai préféré m'enfermer dans l'une de nos chambres d'hôtel pour ressasser encore et encore chaque once de cette rancœur qui bataille en moi sans relâche. Alors, c'est un peu ironique d'avoir l'impression de respirer à nouveau quand je suis comprimé par une foule de touristes de toutes les nationalités et que plane sur moi la menace que la sécurité du musée voit clair dans notre petit jeu dès que nous aurons franchi la pyramide de verre.
Je veux croire que la vie ça peut être ça aussi ; j'en ai besoin.
Je range mon téléphone avant que Caleb ou Thomas ne remarque mon sentimentalisme en carton et croise brièvement le regard de Julia. Elle baisse si vite la tête que je me demande un instant si je n'ai pas imaginé le fait qu'elle était en train de m'observer mais la manière dont elle triture son billet entre ses doigts me laisse croire que je ne suis pas devenu fou. J'hésite à faire un pas vers elle avant de me rappeler que je ne suis qu'un con qui fait des promesses qu'elle a sûrement oublié dans la minute. Je sais que le manque de communication est sans doute la chose la plus agaçante au monde mais on ne comprends le silence des autres que quand on se retrouve soi-même dans une relation qui n'est pas vraiment une histoire mais tellement plus qu'une simple fable.
— Tu viens ?
La voix de Caleb me sort de ma contemplation. Je remarque aussitôt que la file de touristes est en mouvement et, quand je tourne la tête, je tombe nez à nez avec une mère de famille qui me regarde de travers puisque je n'avance pas pour rejoindre mes amis. Je me dépêche de rattraper mon groupe et retire mon sac à dos de mes épaules à la vue du panneau qui indique que nos affaires vont être fouillées.
Cece est la première à passer la porte qui donne sous la pyramide. Quand vient mon tour, je suis forcé de lever les yeux pour admirer les reflets du soleil de l'après-midi sur les carreaux puis de les baisser pour me rendre compte de l'impressionnante architecture du lieu. Thomas qui s'est retrouvé à mes côtés ale même regard béat sur le visage et je suis soulagé de constater que je ne suis pas le seul débile qui s'émerveille de découvrir un lieu que je n'ai vu qu'en photo jusque-là.
Je récupère mon sac et me rallie à mes amis qui descendent l'escalier pour atteindre le sous-sol de la pyramide. Tandis que j'attrape un plan du musée traduit en italien, Julia prend sa sœur en photo sous tous les angles possibles et Caleb fais de même avec Thomas et moi, alors même que je ne le regarde pas. J'adresse un doigt d'honneur à la caméra ce qui provoque le rire de mon frère et m'éloigne de lui pour me plonger dans la lecture de ma brochure.
J'ai beau savoir que nous sommes là pour faire du repérage de tout sauf des tableaux, je ne peux pas m'empêcher d'avoir envie de m'égarer parmi les couloirs qui regorgent de trésors tous plus précieux les uns que les autres. Depuis que je me suis éveillé à un monde si longtemps étranger pour moi, j'ai un besoin avide de comprendre comment on peut ruiner sa vie pour acquérir une ou deux toiles de maître. Il faut que je comprenne ce qu'il y a de si précieux dans une œuvre, de tellement précieux qu'on peut imaginer sacrifier sa vie pour l'obtenir.
VOUS LISEZ
ANAIDÉIA | LES ROSES DE ROME T.2
Acción↪ ceci est le second tome de la duologie : il est nécessaire d'avoir lu NÉMÉSIS pour comprendre ANAIDÉIA ❀ Rome, Italie Ils étaient derrière vous mais vous ne les avez pas vus. Ils vous ont tout dit et pourtant, vous n'aviez pas compris. Vous n'ave...