CALEB
J- 54
18h15
Quelque part à la frontière du désert, Égypte
Je sens bien que l'accueil qu'elle vient de recevoir l'a blessé plus qu'elle ne l'admettra jamais mais je me demande aussi à quoi d'autre elle pouvait bien s'attendre. Certes, elle n'était pas avec nous durant les deux mois qui viennent de s'écouler mais quand même. Elle a tout fait voler en éclat et s'étonne que nous ne sautions pas de joie à l'idée d'être à nouveau des pantins qu'elles déplacent selon des motivations qu'elle seule connaît.
Alors, je reste stoïque à sa droite, dans l'attente de la suite des évènements. Alexander, lui, ne semble pas aussi impassibles que nous. Il ne cesse de se retourner pour s'assurer qu'ils ne nous attendent pas plus loin, dans le salon de la maison. Je n'ai pas la force de le dissuader, de lui expliquer que tout est différent désormais alors je laisse le silence coutumier se prendre sa place entre nous trois tandis que Rosalia scrute l'horizon à la recherche de la force nécessaire pour laisser son visage aussi lisse et indéchiffrable que possible.
Après une minute à attendre sous le soleil déclinant sans prononcer le moindre mot, elle fait demi-tour et s'engouffre par la porte de la maison. Je la suis comme le gentil garçon que je suis. Le roux me bouscule quand j'atteins le salon aux baies vitrées grandes ouvertes et disparaît dans un le couloir qui s'étire jusqu'à l'exterminé de la villa. Il part à la poursuite de sa fiancée qui l'a traité comme un parfait inconnu et de sa meilleure amie qui l'a méprisé comme un parfait imbécile.
Rosalia ne s'encombre pas du même sentimentalisme. Elle me jette à regard, rien qu'un foutu regard qui m'ordonne pourtant de la suivre près des canapés et je m'exécute avec, toujours, cette abominable lassitude accrochée au bide. Je décline d'un geste de la main le verre qu'elle me propose après s'être assisse et je l'observe siroter sa boisson du coin de l'œil, peu désireux de devoir soutenir son sourire indéchiffrable.
Soudain, je regrette de ne pas avoir eu le courage de fuir comme les autres dans les recoins de la maison, loin de son hypocrisie accusatrice et de son indifférence blessante. J'aimerais pouvoir croire qu'elle a compris le sens de notre haine mais c'est à peine si elle a conscience que je rêve de la faire taire en serrant mes mains autour de son pour lui arracher des excuses.
— Raconte-moi comment ça s'est passé à Macao.
Sa demande sonne mal à mes oreilles, comme inapproprié dans un climat aussi tendu. Je relève le menton et la trouve à me dévisager, m'obligeant à détourner la tête pour ne pas soutenir ses pupilles qui me sondent. Si j'avais accepté son verre, j'aurais au moins quelque chose pour m'occuper l'esprit, pour me donner une forme de contenance et éviter de lui cracher ses quatre vérités à la figure. Je suis de nouveau le jeune homme impressionnable qu'elle a rencontré à Rome et je déteste ça.
— Tout s'est passé comme prévu. Alexander a eu raison d'insister pour que ce soit Thomas et pas un autre. Il est doué.
— Je n'en doute pas, répond-t-elle en m'observant par-dessus le rebord de son verre.
À chaque fois que je discute avec elle, j'en arrive à la même conclusion : je ne suis pas de taille pour l'affronter parce que derrière chaque phrase qu'elle prononce, se cache mes secrets les plus sombres. Peut-être que c'est juste moi qui devient parano avec le temps mais je peux jurer sur la tête de mon père, qu'elle sait que Thomas et moi ce n'est pas qu'une histoire d'alchimie professionnelle.
Au début, j'étais touché de cette faculté qu'elle avait à me comprendre, à me faire sentir à ma place puisqu'elle était un peu comme moi et car c'était le même homme qui avait détruit nos vies mais aujourd'hui, je hais cette ressemblance. Je hais la pitié que j'éprouve pour elle, la facilité que j'aurais à lui pardonner si je croise son regard vide plus d'une demi seconde. Je me hais aussi de devoir faire semblant que je vais bien alors que je suis las de tout, déçu d'elle et de ses promesses sans fondement.
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ANAIDÉIA | LES ROSES DE ROME T.2
Ação↪ ceci est le second tome de la duologie : il est nécessaire d'avoir lu NÉMÉSIS pour comprendre ANAIDÉIA ❀ Rome, Italie Ils étaient derrière vous mais vous ne les avez pas vus. Ils vous ont tout dit et pourtant, vous n'aviez pas compris. Vous n'ave...