Chapitre 32.

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Je suis resté planté là, au milieu du restaurant, partagé entre l'idée d'arrêter Thomas ou de l'admirer casser la gueule de Minho. C'était jouissif de savoir que Thomas menait le combat alors que Minho essayait seulement de l'atteindre, en vain. J'ai fini par réagir, et j'ai attrapé Thomas par son T-Shirt en lui demandant d'arrêter. Il a continué de frapper Minho, il fallait que je fasse quelque chose où il allait avoir de sérieux problèmes. Je me suis baissé à sa hauteur, j'ai attrapé ses épaules et je l'ai tourné presque violemment face à moi.

- Tommy, arrêtes. Il a eu son compte. Minho gémissait de douleur sur le sol, j'avais juste envie de lui dire de souffrir en silence, mais je me suis retenu.

Thomas tremblait de tout son corps, il me regardait la mâchoire serrée, la respiration forte. Je l'avais rarement vu dans un tel état, si ce n'est jamais.

- Il a ruiné ta vie, Newt. Il a murmuré. Je pouvais lire de la peine dans son regard, j'en avais le coeur serré.
- Je sais, mais ce n'est pas le seul. Et je n'en ai plus rien à foutre d'eux maintenant. Il savait que c'était faux, que rien ne refermerait jamais les blessures de mon passé. Il faut y aller, les flics doivent être en route.

Il a hoché la tête en signe d'approbation, on s'est levés, j'ai jeté un coup d'oeil au patron du restaurant qui aidait Minho à se relever, et on s'est barrés en courant le plus vite possible. Ma jambe était en feu, mais il ne fallait absolument pas qu'on se fasse chopper.

On est arrivés à la voiture, Thomas a mis le contact et a démarré en trombe. Une vingtaine de minutes plus tard, on claquait la porte d'entrée et je lui ordonnais de s'asseoir sur le canapé en attendant que je revienne.
Tout se bousculait dans ma tête. Et si Minho portait plainte pour coups et blessures? Et si tout recommençait à nouveau, et que cette fois, c'était Thomas qui perdait tout? Et s'ils nous retrouvaient ? S'ils essayaient de me recontacter? Après tout, Minho voulait me parler. Si j'avais accepté, est-ce que Thomas se serait tout de même battu?

- Newt, tu t'en sors?
- Ehm, oui oui, j'arrive.

J'ai respiré un bon coup pour tenter de me détendre, j'ai pris la trousse de premiers soins et j'ai rejoins Thomas dans le salon.

- Qu'est-ce qui t'a prit?
- J'en sais rien. J'ai repensé à tout ce que tu avais subi à cause d'eux, et ça m'a mis dans une rage folle.
- J'ai vu ça. J'ai dit avec un léger sourire, et Thomas s'est détendu. Il avait sûrement dû penser que je lui en voudrais. T'y as pas été de main morte.

J'ai doucement posé une compresse sur son arcade sourcilière, et il a reculé légèrement en serrant les dents.

- Désolé.
- C'est rien.

Je l'ai fixé un instant, regardant l'ampleur des dégâts. Son arcade et sa lèvre saignaient encore un peu, et il avait un hématome sur la joue. Ça aurait pû être pire, il n'avait pas besoin de points de suture.

- Newt? Est-ce que ça va? J'ai relevé les yeux vers lui, sortant de mes pensées.
- Oui, tout va bien.

Même comme ça, abimé de partout, il était beau. Thomas s'était battu pour moi. Ça avait quelque chose de... romantique, non? Toujours pas gay? Non. Avec Tommy, c'est différent, c'est tout.

J'ai doucement nettoyé sa lèvre inférieure avec une deuxième compresse, une tension étrange régnait dans la pièce. J'ai dégluti, mon regard fixé sur ses lèvres, et j'ai lentement rapproché mon visage. Mon coeur battait tellement fort que Thomas aurait presque pu l'entendre. Thomas a souri avant de coller son front au mien. On s'était déjà embrassé, deux fois. Et pourtant ce soir, c'était différent. Après que Thomas m'ait prouvé à quel point il tenait à moi ces derniers temps, qu'il se soit battu avec Minho, pour moi.. Je ne savais plus très bien ce que tout ça signifiait, aussi bien pour moi que pour lui. Je ne m'étais jamais posé de questions sur mon orientation sexuelle. Je n'ai jamais eu de jugement par rapport à ça non plus. Pour moi, on ne tombait pas amoureux d'un sexe, mais d'une personne. Et même si je l'avais voulu, j'étais bien trop attiré par Thomas pour pouvoir lutter contre ces sentiments.
J'aimais la sensation que nos souffles mélangés me procurait. J'aimais cette proximité entre nous. Et plus que tout, j'aimais ses lèvres sur les miennes.

Nos lèvres n'étaient plus qu'à quelques millimètres lorsque le portable de Thomas a sonné. J'ai soupiré de frustration, il a rigolé en déposant un baiser sur mon front en ébouriffant mes cheveux et s'est levé pour répondre.

- Allo Papa, ça va ?... Oui, c'est arrangé... On viendra le 24, dans la mâtiné... Je sais, mais je travaille et j'ai déjà été arrêté pas mal de temps. J'ai un loyer à payer... Oui, on restera dormir... Ok, bonne nuit. Ah, et papa ! Il s'est arrêté quelques secondes en me regardant avec sourire. Il s'appelle Newt.

Je lui ai souri, mais je me sentais coupable. Il allait me présenter à sa famille, alors que moi je lui mentais. Mais c'était pour son bien. Non, ça c'est ce que tu penses pour te donner bonne conscience.
Il a raccroché et est revenu s'asseoir après avoir mis un DVD et ramené des paquets de gâteaux. Je me suis allongé contre lui, il m'a entouré de ses bras et j'ai pris ses mains. Elles étaient écorchées de partout.

- Newt? Je savais qu'il se demandait pourquoi je détaillais ses mains depuis cinq bonnes minutes.
- Je suis désolé pour ce soir, Tommy...
- C'est pas grave, on y retournera au restaurant.
- J'ai gâché ce moment encore une fois, tu t'es battu, t'es blessé, et encore une fois tout est de ma faute.

Il a serré mes mains dans les siennes avant de les porter à ses lèvres et d'y déposer un baiser.

- Arrêtes Newt. Tu ne m'as pas demandé de me battre, si? Et t'y es pour rien s'ils sont venus dans le même endroit que nous. C'était le hasard. Le destin voulait juste qu'ils sachent que tu pouvais vivre sans eux.
- Je ne crois pas au hasard Tommy. Et encore moins au destin.
- Et nous alors ?

Réfléchis avant de parler Newt, réfléchis.

- Nous, c'était pas le hasard Tommy. Tu passais par là tous les jours.
- Et? Je n'ai pas fait des recherches pour tomber sur toi dans la rue la première fois, Newt. Le hasard a fait que tu as croisé mon chemin, et le destin a fait qu'on en est là aujourd'hui.

Fermes ta gueule Newt. Avant de regretter ce que tu vas dire.

- Je n'étais pas destiné à finir SDF et drogué. Ma famille était l'une des plus riches de Londres, j'étais dans une grande école, j'avais tout ce que je souhaitais. Et tu penses vraiment que c'est le destin qui t'a mis sur mon chemin? Abruti.
- Excuses-moi de n'être qu'un serveur.

Il a lâché mes mains et s'est redressé. Et l'oscar du plus gros crétin est décerné à... Newt Johnson!

- C'est pas ce que j'ai dit Tommy.
- C'est ce que tu as sous-entendu. Qu'un gars aussi important que toi ne pouvait pas rencontrer un pauvre mec dans mon genre.

J'ai soupiré en relâchant ma tête en arrière, avant de m'asseoir face à lui.

- Tu ne comprends pas...
- Je suis sûrement trop con.
- Putain Tommy, arrêtes! Il avait le regard rivé sur la télé, alors j'ai tourné son visage vers moi. Ce que je veux dire, c'est que tout ça n'était pas écrit. Sans cet accident, on ne se serait jamais rencontré parce que je serai toujours ce petit gosse de riches, qui ne connait rien à la vraie vie, qui aurait fini dans la boite de son père et n'aurait fréquenté que des gens du milieu. Mourir dans un accident de voiture n'était pas le destin de mes parents.

Il n'a pas répondu, continuant de me regarder. Je ne croyais peut-être pas au destin, mais je croyais en nous.

- Je ne sais même pas pourquoi on s'engueule à cause de ça, parce que hasard ou pas, tu es la plus belle chose qui me soit arrivée.

I Hated The Place, Tommy.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant