21 octobre 2015

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J-1 avant la première chimiothérapie. Si on m'avait dit 20 ans plus tôt, qu'à 42 ans, je serai sur le point de suivre un traitement anticancéreux, je ne l'aurai pas cru. C'est même quelque chose qui m'aurait paru impossible car en général on tombe malade à un âge plus avancé. Seulement voilà, dans mon cas, la maladie s'est manifestée plus tôt que prévu. Et rien ne sert d'être dans le déni. Il faut l'accepter et l'affronter, pas le choix. "La vie ce n'est pas d'attendre que l'orage passe mais c'est d'apprendre à danser sous la pluie", disait Sénèque. Et bien c'est ce que je vais tenter de faire ces prochains mois. A commencer par aujourd'hui, face à un jeune médecin, qui m'explique plus en détails mon protocole de soins pour les prochains mois, et notamment les effets secondaires de la chimiothérapie.
« Voici le déroulé de votre traitement, me dit-il. Vous allez suivre 2 protocoles de chimiothérapie qui comprendront chacun 3 cycles, soit 6 cures au total, à raison d'une toutes les 3 semaines. A partir de la 4ème chimiothérapie, vous débuterez les séances d'immunothérapie, espacées elles aussi de 3 semaines, il y en aura 18 au total. Ensuite vous aurez de la radiothérapie et enfin de l'hormonothérapie pendant 5 ans ».
Rien de nouveau sous le soleil, me direz-vous. Le médecin me tend ensuite une feuille qui concerne cette fois-ci les effets secondaires de la chimio. Je la parcours et c'est là que je comprends véritablement ce qu'il m'attend. Vous êtes prêt(e) ? Concernant les 3 premières cures, voici le programme des réjouissances : chute des cheveux mais aussi mucite, aphtes, nausées et vomissements. Petite précision : la mucite est une pathologie qui atteint les muqueuses en provoquant des ulcérations. Quand on a une mucite buccale, on parle plus communément d'aphtes. C'est la mucite la plus courante, mais la mucite peut aussi se développer dans le tube digestif au cours de traitements anticancéreux. Ça promet ! Le second protocole n'est pas en reste non plus : chute des cheveux, douleurs musculaires et articulaires, pigmentation et décollement des ongles, larmoiements ou sécheresse oculaire, mucite et aphtes. Plus rarement : réactions allergiques, fourmillements dans les doigts et les orteils. Au secours, je ne me sens pas bien, mais alors pas bien du tout. Mon cœur se met à battre plus fort qu'à l'accoutumée et le doute m'assaille de nouveau. Et si je refusais ? Et si je prenais mes jambes à mon cou là maintenant tout de suite ? Et si je fuyais loin, très loin de cet hôpital ? Je peux tout à fait le décider, c'est mon corps après tout, je fais ce que je veux avec. Après une longue respiration, je reprends mes esprits et je demande alors à l'interne.
« Ca fait beaucoup d'effets secondaires. Je comprends mieux pourquoi vous ne fournissez pas ces informations très longtemps à l'avance. C'est effrayant. Sans parler de la fatigue qui va s'abattre sur moi j'imagine
- Je vous comprends mais ne vous inquiétez pas, nous avons des médicaments à notre disposition pour vous aider à supporter ce traitement. Concernant le premier protocole, il y a une prémédication à prendre en prévention des nausées lors de chaque cure
- Ok, merci. Et si cela ne marche pas bien ?
- Si vous ne voyez pas d'amélioration, vous pouvez utiliser 2 autres médicaments. Voici d'ailleurs votre ordonnance à ce sujet, tout est indiqué. Je vous donne également votre prescription pour prévenir et soigner les aphtes
- Vous savez si je vais vraiment perdre mes cheveux ? (A nouveau cette question qui m'obsède)
- Oui...
- Je n'ai pas le choix de toute façon...
- Nous avons eu vos examens de sang, tout est ok, vous pouvez commencer votre première cure demain. Avez-vous votre bilan cardiaque ?
- Oui le voici, mon cœur va bien, enfin je l'espère encore pour très longtemps
- Merci. On va maintenant vous poser un PAC qui nécessite une intervention chirurgicale sous anesthésie locale
- Qu'est-ce que c'est exactement ?
- Ce dispositif est un système constitué d'un petit boîtier implanté directement sous la peau et relié à un cathéter qui va faciliter l'injection de votre traitement destiné à détruire les cellules cancéreuses. Vous verrez c'est une petite opération, d'environ 15 minutes
- C'est douloureux ? Je vais le garder longtemps ?
- Il faudra le conserver durant toute la chimiothérapie ».
Je me vois encore lui sourire pendant toute la durée de l'entretien même si je sens le sol se dérober sous mes pieds. C'est ma façon à moi de me protéger mais aussi de le soutenir dans sa lourde tâche, celle d'un jeune médecin qui doit m'annoncer que les prochains mois n'allaient pas être très glorieux. Je ne saurai dire si ce rendez-vous a été pire que celui de l'annonce de ma maladie. Ce dont je suis sûre c'est que je suis ressortie de cette pièce très secouée avec une folle envie de me flinguer. Etrangement je n'ai pas pu retenir toutes les informations qu'il m'a communiquées. C'est comme si mon cerveau ne voulait pas ou ne pouvait plus assimiler autant d'informations douloureuses et qu'il se mettait finalement à bugger...  

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