22 octobre 2015

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Je n'ai quasiment pas dormi la nuit dernière. Impossible de fermer l'œil. Du coup je me suis levée tôt pour me préparer. J'ai encore du mal à croire que je vais faire de la chimiothérapie aujourd'hui. Et si tout cela n'était qu'un rêve finalement ?Malheureusement non, c'est bien la réalité qu'il va falloir affronter. Je sais que cette journée va être difficile mais je n'ai pas le choix. Je pourrai toujours dire non à ce traitement mais qu'est-ce que je peux espérer ? Autant essayer car ce serait dommage de finir au cimetière plus tôt que prévu.
A l'hôpital au service chimiothérapie que je découvre pour la première fois, une jeune infirmière m'explique le déroulement de la matinée et m'indique également la liste des produits à se procurer pendant la phase « chimio », notamment l'achat d'un vernis au silicium et d'un soin hydratant pour protéger mes ongles. J'avoue que je n'écoute pas toujours ce qu'elle me dit. C'est un peu comme si j'avais coupé le son autour de moi et que je ne souhaitais pas en savoir plus sur ce qu'il m'attendait. Des informations j'en ai eu bien assez comme cela hier lorsque l'on m'a présenté la liste des effets secondaires. De quoi vous donner envie de vomir avant d'avoir vraiment envie de vomir.
Une fois cet entretien terminé, je croise le jeune médecin de la veille dans le couloir qui me conduit à la salle d'attente :
« Je souffre vous savez suite à l'intervention de la veille et je ne me sens vraiment pas en forme aujourd'hui
- Prenez du doliprane », me répond-il.
Avoir fait autant d'années d'études pour me dire cela. Merci pour cette réponse pertinente, je n'y aurais pas pensé. Je crois surtout que je vais prendre mon mal en patience. Autour de moi, je remarque qu'il y a du monde, beaucoup de monde qui fait la queue pour son traitement contre le cancer. Les visages sont fermés, chacune ou chacun essayant de s'occuper comme il le peut avant le moment tant redouté : certains lisent, une autre femme fait de la broderie, quant à moi j'écoute de la musique pour me détendre.
Une heure plus tard, une infirmière m'invite à la suivre, d'autres patients faisant de même. Direction la salle de soins. Je dois bien avouer que ma seule véritable expérience du cancer se résumait jusqu'à maintenant à ce que j'avais appris en visionnant la série à succès « Breaking Bad », bien avant de tomber malade. Le héros américain, diagnostiqué d'un cancer du poumon, apprenant qu'il lui reste peu de temps à vivre, se met à devenir dealer de drogue pour assurer un avenir financier confortable à sa famille à sa mort. Je me souviens notamment de certaines scènes à l'hôpital, où le héros en position assise, reçoit son traitement de chimiothérapie entouré d'autres malades. A cet instant précis, je me demande si cela sera la même chose pour moi. En fait oui, car je traverse une première salle avec des patients assis ou allongés les uns à côté des autres. Je suis ensuite conduite dans une grande chambre séparée par une sorte de paravent avec un lit de chaque côté. Pour la première cure, je serai donc isolée. Tant mieux. Une fois allongée sur le lit que l'on m'a indiqué, une autre infirmière m'apporte le fameux casque réfrigéré censé prévenir la chute de mes cheveux. Quel look d'enfer ! Je patiente de nouveau un long moment avant que l'infirmière ne revienne pour me demander mon nom et ma date de naissance tandis qu'elle vérifie ces informations sur les étiquettes des produits qu'elle a en sa possession et qui me sont destinés. La prochaine étape consiste à m'injecter une prémédication anti-allergique et anti-nauséeuse directement dans la chambre implantable : cela sera donc double ration car j'ai déjà pris ce matin une pilule anti-vomito ! J'enchaîne ensuite avec le traitement en lui-même, qui comprend l'injection de trois poches, chacune correspondant à un médicament anti-cancéreux : l'épirubicine, le cyclophosphamide et le fluoro-uracile. La première, de couleur rouge orangé, provoquera d'ailleurs une coloration rouge de mes urines dans l'heure suivant la chimiothérapie. Histoire de me changer les idées, je discute avec Caroline une collègue touchée, elle aussi, par cette maladie. Julien, quant à lui, m'attendra à la sortie car je n'ai pas souhaité qu'il me voit comme cela.
« Encore un rinçage et dans quelques minutes ce sera terminé », me dit l'infirmière aux alentours de 16h00.
10 minutes se passent avant que la sonnerie de l'appareil ne retentisse. L'infirmière revient alors vers moi pour me libérer et poser un pansement sur la chambre implantable.
« Vous pouvez rentrer chez vous. On se revoit dans 3 semaines ».
Une de faite, plus que cinq ! Une fois dehors nous décidons de prendre un verre avec Caroline et Julien qui nous a rejoint. A ce stade de la journée, je peux encore dire que je ne ressens aucun effet secondaire. Tout va bien... Il est 18h00 lorsque Julien et moi décidons de rentrer. Toujours rien à signaler. Tant mieux... Je finis même par me dire que je supporte plutôt bien ce traitement. C'est finalement aux alentours de 19h00, alors que nous dînons tranquillement à la maison, que les nausées commencent à se manifester... Sans parler de Monsieur Vomito qui s'est aussi invité. C'est comme si une très vilaine gastro-entérite s'était emparée de mon corps. Tordue de douleur, incapable de tenir debout, je suis obligée de m'allonger sur mon lit. J'ai mal, j'ai très mal au ventre. Cette douleur étant à la limite du supportable, je tente alors de trouver une position dans mon lit qui pourrait me soulager. Rien n'y fait. Absolument rien. Que faire ? Pas grand chose si ce n'est d'attendre que cela passe....  

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