♦ Le Pays Imaginaire ♦ «Let's play»

Chapitre 34 : Châtiment

Je venais de laisser le contrat entre la protection de mon ombre tandis que j'avais pris l'immense risque de libérer Peter Pan pour le conduire avec moi jusqu'au crâne. Là-bas, les garçons perdus étaient prisonniers depuis un temps conséquent et lorsque je voyais du ciel la marée grimper, je déglutissais avec angoisse. Comment savoir s'ils avaient survécu à la montée de l'eau ? Je comptais sur Pan pour les sortir de là au plus vite en échange de cette liberté surveillée mais je l'avais prévenue d'une chose...

"Fais un seul écart, Pan, lançais-je lors du trajet en vol, et je te promets que ma prochaine action sera de te tuer en déchirant le bout de papier auquel tu tiens tant !

-Je serais alors ravie de te retrouver avec moi en Enfer, Gwen ! Il grimaça. Mais... Je n'ai pas prévu de mourir maintenant."

Je me satisfaisais de sa réponse qui signifiait que j'avais encore un peu de pouvoirs sur lui avec la capacité de ruiner sa vie... Et la mienne par ailleurs. Mais cette dernière ne m'importait que peu sans les enfants, sans Chris, sans Charlie. Le jeu n'avait plus de sens s'ils n'étaient pas là car si avant je me battais pour une simple envie de vengeance qui ne ressemblait pas à la Gwendoline que j'étais initialement, maintenant j'avais réellement une raison, une motivation. Ils étaient auprès de moi et l'idée de les rendre heureux me rendait heureuse. C'était assez ironique de se dire que pour les retrouver, je devais compter sur celui que je voulais anéantir.

Nous atterrissions avec une synchronisation presque étrange sur le sol de la pièce principale de la grotte. Sans perdre de temps sur ce détail perturbant, je me tournais vers Peter en croisant les bras. Il devait me montrer la direction de la cachette des garçons et cela sans tromperies. Seulement, ce dernier prenait le temps de s'avancer vers nos sabliers comme s'il venait de les découvrir pour la première fois. Il toucha l'un. Le sien. Puis s'avança vers le mien.

"Nous perdons exactement la même quantité de temps. Nos sabliers sont égaux... Il tourna les talons face à moi. Et pourtant, regarde-nous. Si différents."

Essayait-il de jouer avec les mots encore une fois pour me déstabiliser ? Ça semblait presque trop prévisible pour être vrai. Je n'allais pas marcher une énième fois.

"Je sais. Ne perdons pas ce temps, dis-moi où sont les garçons."

Levant les yeux au ciel, il montra du doigt le couloir étroit à ma gauche. Je me souvenais de ce couloir-là car lors de la confrontation entre père et fils qu'il y avait eu la dernière fois, je m'étais réveillée en retrouvant la silhouette d'Henry cachée au bout. Seulement, je n'avais jamais pris le temps de m'y aventurer car Pan me stoppa avant... Ce passage m'est donc totalement inconnu lorsque j'y pénétrais à tâtons.

"Chris ! Charlie ! Où êtes-vous ?"

Un sourd bruit se fît entendre. Quelque chose frappa contre la paroi mais si la grotte ne résonnait pas, plongé dans le silence, je n'y aurais jamais prêté attention. L'idée de savoir les garçons en vie me réchauffait le cœur tel que j'en oubliais l'acte horrible de Peter de les avoir enfermé derrière ce mur. L'eau devait forcément avoir accès au centre de la grotte... C'est pour quoi il me demandait de me méfier de la marée.

"Ils sont là ! Ils sont vivants... Pan ! À toi de jouer !"

Je sortis du couloir pour retrouver Pan aux sabliers qu'il devait toujours observer pour nous faire perdre du temps. Je n'attendais pas moins de lui. Il devait sûrement préparer son prochain plan pour éviter que ça se passe comme je le voulais mais il savait également que j'étais celle qui avait le dessus pour le moment. J'avais le contrat.

"Pan ?" rappelais-je une seconde fois.

Il ne répondait pas. Pire... Je ne le voyais plus. Avait-il osé prendre la fuite malgré mes avertissements ? Cet idiot prenait-il vraiment le risque de tous nous tuer ?

"Peter, tu as intérêt à te montrer sinon -

- Ne t'énerve pas si rapidement."

Mon regard se détourna vers les escaliers de sortie qu'il grimpait pour me rejoindre.

"Je suis là.

-Oui... je vois ça. Dis-je en plissant les yeux. Mais tu avais décidé de partir, pourtant.

-Je sais prendre des risques quand il le faut, Gwen, et là... Je préfère m'abstenir.

-Sage décision. J'ai trouvé les enfants, va les délivrer.

-Bien sûr, acquiesça-t-il. Je t'ai promis de le faire et je vais le faire... Mais je veux d'abord savoir ce qu'il va se passer après."

Durant ses paroles, il avait pris de la marge jusqu'à moi pour se poser les bras le long du corps et attendre ma réponse. Tant que je ne l'aurais pas fait, il restait figé sur place, sans même lever la main pour délivrer les enfants. Pourtant, en soi, je trouvais la question absurde et seulement digne de nous faire perdre du temps. Or, je ne voulais pas en perdre.

"Pour poursuivre le jeu et découvrir qui sera le seul et unique maître de l'île." Avais-je alors froidement répondu.

Il souriait, non seulement car il connaissait la réponse, mais également car il savait quoi rétorquer à cela. Tout comme son fils, il avait l'incroyable capacité de tout prévoir mais surtout de prendre mille chemins pour arriver au même résultat. Simplement pour son plaisir.

"N'est-ce pas ce qui était prévu, Pan ? M'irritai-je en fronçant les sourcils.

-C'est ce que vous avez prévu, oui. Moi, par contre...

-Arrête tes bêtises. Tu m'aurais tué un moment ou un autre si tu en avais eu l'occasion, simplement pour garder ta place au pouvoir et m'éviter d'y grimper. Tu me l'as déjà montré par bien des reprises.

-Justement... Il prit un air plus sérieux, baissant la tête. C'est de cela que je veux qu'on parle."

Le vent soufflait toujours un peu plus fort dehors et j'avais cette étrange impression de le ressentir que quand nous nous retrouvions face à face. Il sifflait doucement, la mer prenait ses aises en frappant contre le crâne... Je repensais pâlement aux garçons qui nous attendaient. Peter Pan reprit d'un regard quasi-méprisant :

"Pendant que tu commençais à prendre les rênes du Pays Imaginaire... Il s'est passé quelque chose, en bas."

Nous marquions tous les deux une pause. Lui car il voulait que je comprenne par moi-même. Moi car j'avais peur de mal comprendre.

"En... Enfer ?"

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Mes plus plates excuses ! Les cours prennent mon temps libre !