La piste à suivre (partie 3)

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ELENA

              Princeton hoqueta de surprise quand il découvrit le corps de son jeune ami ensanglanté. Il était devenu aussi pâle que la mort. Je m'empressai d'accourir vers Gordon pour pouvoir évaluer l'étendue des dégâts. Plusieurs plaies causées par arme blanche au niveau du ventre m'inquiétaient, en effet il risquait une hémorragie interne à tout moment si ses organes avaient été endommagés.

-        Princeton, donne-moi ta veste

Le jeune homme ne se le fit pas dire deux fois et il enleva son sweat afin de me le tendre. Ses mains tremblaient et je ne pensais pas qu'un roc comme lui pourrait être aussi impressionnable. J'appuyai fort sur les blessures de Gordon et entrepris de lui parler afin qu'il ne se rendorme pas en attendant l'arrivée des ambulanciers.

-        Princeton, appelle les secours !

-        Non.

C'était ma mère qui avait parlé. Son regard était froid, aussi glacial que son cœur. Je n'arrivai pas à croire ce qu'elle venait de dire à l'instant.

-        Maman. J'espère que tu plaisantes, même si je crois que ce n'est pas le moment idéal pour jouer de ton humour. Il est en train de perdre beaucoup de sang. Je n'ai pas de poches de transfusion en réserve. Les dégâts sont impossibles à observer, je ne sais pas si la rate a été touchée, ni si nous sommes face à une possible aggravation de son état. Il faut absolument le montrer à un médecin. Princeton il faut que...

-        J'ai dit non Ellie. J'ai une équipe médicale d'urgence qui nous attend dans un entrepôt, je les ai contactés dès que j'ai vu que ce pauvre garçon était à l'agonie. Je ne suis pas sans cœur, même si tu as l'air d'en douter visiblement.

-        Il y a de quoi...

-        Ça suffit Ellie, conduis-toi comme une professionnelle et demande plutôt à ton... « je ne sais quoi », de m'aider à le transporter...

-        Princeton. Il s'appelle Princeton Maman.

-        Oui voilà.

Princeton ne dit rien mais je pus apercevoir sur son visage toute la haine qu'il ressentait à l'égard de ma mère à cet instant. Je n'insistai pas, de toute manière plus je tergiverserais, plus Gordon serait dans un état critique. La seule chose que je pouvais espérer c'était que ma mère ne me mente pas.

Je m'avançai vers Princeton et lui pris le visage entre mes mains. Il était froid, il tremblait de rage et de peur. Ces deux sentiments étaient destructeurs en cas de situation d'urgence. Il fallait que je le calme.

-        Princeton, écoute-moi. Je sais que tu ne fais pas confiance à ma mère. Je peux de comprendre, crois-moi. Mais nous avons une chance de sauver Gordon, pour cela il faut quitter les lieux au plus vite.

-        J'appelle les secours et la police, j'en ai marre de cette histoire, je... putain Ellie...

Il se dégagea de mon emprise et entreprit d'aller vers Gordon pour appuyer sur ses plaies. Il déverrouilla son téléphone tout en ne cessant de parler à son ami, lui promettant que tout irait bien.

Soudain je vis ma mère sortir un Sig-Sauer P-226 et pointer son arme sur la tête de Princeton.

-        Lâche ce téléphone mon grand.

Mon Dieu, il fallait que j'arrête cela tout de suite. Je me postai devant l'arme en protégeant de mon corps Princeton et Gordon.

-        Pousse-toi Ellie. Ton ami nous crée plus de problèmes qu'il nous aide, je n'ai pas le temps de tergiverser. Tu es en danger et je ne laisserai personne, tu m'entends, personne, se mettre en travers de mon chemin.

-        Maman, je t'en supplie, je te promets qu'il n'appellera pas les secours, ni la police, il va nous aider, fais-moi confiance, je t'en prie ne le tue pas !

Quand Princeton vit l'arme qui était braquée sur lui à travers moi, il se releva d'un bond. Il s'approcha à grandes enjambées et me poussa sur le côté. Son torse se retrouvait à présent collé au canon du pistolet. Ses yeux étaient plus noirs que l'enfer et une énorme fureur transpirait sur son visage.

-        Allez-y tuez-moi. Qu'est-ce que vous attendez ? Juste une chose Mme David, si vous me tirez dessus, ce n'est pas ma mort que vous aurez sur la conscience, c'est la haine qu'éprouvera votre fille d'avoir tué un homme de sang-froid. Elle ne vous le pardonnera jamais.

-        Je m'en remettrai. Ce qui compte c'est sa sécurité à elle, les autres je n'en ai strictement rien à faire.

-        Vous mentez.

-        Je...

-        Les mères toxiques qui veulent le malheur de leurs enfants et la destruction autour d'elles je connais. Vous n'en faites pas partie. Je sens que vous êtes une guerrière mais vous êtes avant tout une femme qui aime profondément sa fille, alors je vous le demande pour elle. Ne faîte pas la bêtise qui vous vaudra de la perdre. Une fois le coup tiré, il sera impossible de revenir en arrière. Je fais confiance à Ellie. Si elle me dit que c'est sans danger, je vous accompagne, en revanche vous ne me facilitez pas la tâche.

-        N'appelez ni la police, ni les secours, nous allons nous occuper de lui je vous en fait la promesse.

-        Ce n'est pas à vous de me le dire.

Princeton se tourna vers moi et me fixa de son regard sombre. Ses yeux n'étaient plus emprunts de colère et son visage était plus doux. Je hochai la tête en essayant de lui sourire, vainement.

-        Est-ce que je peux de te faire confiance Elena ?

-        Oui Princeton... Ma mère tient ses engagements, c'est bien la seule chose que l'on ne peut pas lui reprocher.

Le jeune homme hocha la tête et se retourna vers ma mère avec défi. J'en avais assez, le temps était contre nous :

-        S'il te plait Maman, baisse ton arme.

Après une seconde d'hésitation, elle finit par ranger son pistolet à l'arrière de son jean moulant. Nous entendîmes soudain des pneus crisser dehors. Gordon était vraiment mal en point et il fallait l'aider au plus vite.

Ma mère sortit du bâtiment et je l'entendis parler en russe avec, ce qui me semblait être, Dimitri. Le géant arriva sur les lieux et entreprit, avec ma mère, de porter Gordon. Nous les suivîmes, moi et Princeton, afin de quitter cet endroit de malheur.  À ma grande surprise, une ambulance était juste garée devant. Je supposais que Dimitri avait du la voler pour ma mère. Je regardai Princeton en lui signifiant que je n'étais pas au courant. Après un instant d'hésitation, nous rentrâmes nous aussi dans le véhicule.

Comment ma mère faisait-elle ? Comment avait-elle prévenu Dimitri que nous avions besoin de soins médicaux ? Je décidai de laisser ces questions pour plus tard et m'installai avec Princeton à côté du brancard où le colosse russe avait installé Gordon. Le jeune homme ne pouvait pas parler tellement sa douleur devait être insupportable. Son visage était tuméfié, ce qui signifiait qu'il avait été roué de coups avant qu'on le laisse pour mort. En montant à son tour dans le véhicule, ma mère me tendit la lettre qui se trouvait sur les lieux.

Il y avait du sang sur l'enveloppe mais je déchirai le paquet afin de vite découvrir ce qu'il contenait : un téléphone prépayé. Ça y'est, le psychopathe qui me fichait la trouille voulait un lien particulier avec moi... Je sentais que les choses étaient loin d'être terminées et que l'on n'était qu'à l'acte un d'une longue pièce de théâtre macabre.

May It BeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant